Au cours de l'hiver qui vient de prendre fin, de très nombreux automobilistes dont le véhicule est tombé en panne ou qui ont eu un accident sur les voies rapides de la région de Montréal se sont aperçus que le service de remorquage exclusif instauré par le ministère des Transports du Québec (MTQ) était efficace, mais très onéreux.

Au cours de l'hiver qui vient de prendre fin, de très nombreux automobilistes dont le véhicule est tombé en panne ou qui ont eu un accident sur les voies rapides de la région de Montréal se sont aperçus que le service de remorquage exclusif instauré par le ministère des Transports du Québec (MTQ) était efficace, mais très onéreux.

Depuis le 1er mars 2006, sur les autoroutes de l'île de Montréal, et depuis le 1er juillet dernier, sur l'ensemble des autoroutes de la région métropolitaine où le remorquage est exclusif, la Commission de santé et de sécurité au travail (CSST) exige qu'un véhicule de protection se positionne derrière une dépanneuse dont le conducteur est appelé à intervenir sur une voie rapide. Comme deux véhicules au lieu d'un seul sont nécessaires, il en coûte plus cher, soit 105 $ plus taxes, un total de 119,65 $, pour faire remorquer un véhicule sur une distance maximale de 10 km. C'est près du double de ce qu'il en coûtait en 2004. Si le véhicule doit être remorqué sur une plus grande distance, des frais de 2,50 $ par kilomètre additionnel sont facturés.

La CSST avait décidé de faire cette recommandation au MTQ à la suite du décès du caporal Antonio Arseneault, de la Sûreté du Québec, et du surveillant routier Jean-Yves Therrien, du MTQ. Les deux hommes ont tous deux perdu la vie, le 6 octobre 2002, sur l'autoroute des Laurentides à Laval, après avoir été fauchés par une automobile au moment où ils installaient des cônes de sécurité sur une voie de l'autoroute afin de détourner la circulation après qu'un autobus fut tombé en panne.

Le MTQ a décidé de mettre en vigueur graduellement la recommandation de la CSST, afin de permettre aux détenteurs de contrats exclusifs de remorquage de se munir de véhicules de protection et d'embaucher le personnel nécessaire. Plusieurs ne possèdent toujours pas les fameux véhicules de protection ou n'en ont pas suffisamment, et c'est le MTQ ou la Sûreté du Québec qui fournit alors le véhicule de sécurité surmonté d'un panneau lumineux et des gyrophares traditionnels.

Mais là où le bât blesse, c'est quand le remorqueur ne tient pas compte que le véhicule de protection a été fourni par le MTQ ou la SQ, et facture le plein montant au lieu de 75 $ plus taxes, soit le coût réel du remorquage. Mais on ne peut pas vraiment blâmer la compagnie de remorquage puisque le ministère des Transports n'a pas établi de tarifs distincts de dépannage, que le véhicule de protection appartienne ou non à la compagnie de remorquage.

Maria Sotériades, porte-parole du MTQ, précise que le ministère a décidé d'établir un tarif unique, peu importe que le véhicule de protection provienne ou non d'une entreprise de remorquage. «Gérer l'imposition de tarifs différents serait trop complexe», affirme Mme Sotériades.

L'automobiliste n'a donc pas le choix : il doit obligatoirement utiliser les services de l'entreprise de remorquage retenue par contrat d'exclusivité et payer dans tous les cas les frais déterminés par le MTQ. L'automobiliste doit acquitter la facture au conducteur de la dépanneuse, soit en espèces ou par carte de crédit.

Ces explications obtenues, La Presse a consulté Me Fredy Adams, de l'étude montréalaise Adams-Gareau, un spécialiste des recours collectifs. Selon lui, les automobilistes qui se sentent lésés ou floués par la compagnie de remorquage qui applique les tarifs prescrits par le MTQ, mais qui ne fournit pas de véhicule de protection, pourraient intenter un recours collectif contre la compagnie en question.

«À première vue, je crois que la compagnie de remorquage est fautive parce qu'elle facture un service qu'elle ne fournit pas tel que spécifié dans le contrat qui la lie au MTQ», a souligné Me Adams.

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LES CLUBS AUTOMOBILES NE COUVRENT PAS TOUT

Bien des automobilistes qui se fiaient à leur club automobile, à une assurance de dépannage privée ou à une assurance obtenue lors de l'achat d'un véhicule neuf ont été surpris de constater qu'ils ne bénéficiaient pas d'une protection couvrant la totalité des frais encourus pour le service d'une dépanneuse dans une zone de remorquage exclusif.

Roxanne Héroux, du CAA, explique que les dépanneuses du club automobile ne peuvent se rendre au secours d'un membre dont le véhicule est en panne sur un tronçon de route où le remorquage exclusif existe. Le membre doit donc obligatoirement avoir recours au service offert par la compagnie de remorquage qui détient les droits exclusifs sur ce tronçon et acquitter lui-même la facture.

Le membre doit par la suite faire parvenir la note au CAA qui évaluera chaque cas, en tenant compte de l'endroit où le remorquage a été effectué.

«Déjà, le remorquage dans une zone exclusive est plus cher qu'ailleurs. Habituellement, les tarifs de remorquage de base sont de 35 $ à 40 $; cependant, dans une zone exclusive, ils sont de 75 $ en moyenne. À cela, il faut ajouter le coût du véhicule de protection, soit une trentaine de dollars, plus les taxes. Le CAA ne paiera qu'environ 75 % du total de la facture, soit le coût du remorquage. Le CAA ne rembourse pas le coût du véhicule de protection», explique Mme Héroux.

Par ailleurs, le service d'assistance routière de General Motors, dont tous les propriétaires de véhicules neufs bénéficient, rembourse jusqu'à concurrence de 100 $ le coût d'un remorquage jusqu'au garage GM le plus proche, qu'il s'agisse d'un remorquage en zone exclusive ou non. Chez Ford, on affirme qu'on rembourse la totalité du remorquage, même en zone exclusive. Même son de cloche chez les autres constructeurs dont la garantie de base du véhicule couvre le remorquage; certains disent défrayer la totalité des coûts, d'autres jusqu'à concurrence de 75 %.

Une question de sécurité

C'est en 1967 que le ministère des Transports du Québec (MTQ) a instauré à Montréal un règlement portant sur le remorquage et le dépannage, d'abord sur le boulevard Métropolitain, dans le tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine et sur certains tronçons des autoroutes 25 et Décarie. À cette époque, 64 km de voies rapides étaient couverts par le remorquage exclusif. Le règlement a ensuite été modifié (le 5 août 1998) pour englober toutes les voies rapides de la grande région de Montréal, portant le territoire couvert à 325 kilomètres.

Le MTQ soutient que le remorquage exclusif est indispensable sur les voies rapides où l'affluence est grande. «Une voiture en panne représente un risque élevé d'accident et réduit grandement la fluidité de la circulation. En zone urbaine, chaque minute prise pour dégager une voie prolonge la période de congestion d'environ cinq minutes. C'est pour ces raisons que le ministère offre le service de dépannage exclusif aux usagers de la route», précise Maria Sotériades.

De façon générale, la dépanneuse de la compagnie qui détient le contrat avec le MTQ arrive rapidement sur les lieux de la panne ou de l'accident. À cause du nouveau règlement, toutefois, le conducteur de la dépanneuse doit attendre l'arrivée d'un véhicule de protection avant de quitter sa cabine et de procéder au remorquage.

«Comme les minutes sont comptées et que la sécurité des usagers de la route est en péril lorsqu'il y a une panne ou un accident sur les voies rapides, c''est le véhicule de protectio le plus proche qui sera affecté à la sécurité, qu'il s'agisse d'une camionnette du MTQ, d'un véhicule de la SQ ou encore d'un véhicule de protection de la compagnie de remorquage», ajoute Mme Sotériades.

Chaque année, près de 45 000 remorquages sont effectués dans les territoires exclusifs.