L'idée d'enfants qui dénoncent leurs parents à l'État touche un nerf en Grande-Bretagne, le pays de George Orwell, auteur de 1984, un roman sur le totalitarisme ou les enfants sont endoctrinés par le gouvernement et incités à dénoncer leurs parents.

C'est sans-doute ce qui incite l'Institute of Advanced Motorists à mettre la statistique suivante bien en évidence dans un rapport rendu public hier. Selon un sondage internet fait par l'IAM, 73 % des répondants signaleraient leurs vieux parents aux autorités s'ils pensaient que les aptitudes de conduite de leurs proches étaient érodées par la vieillesse.

 

C'est une question légitime et pertinente, mais disons que le petit côté sensationnel est une sacrée bonne façon d'attirer l'attention des lecteurs.

 

Ce qui intéresse vraiment l'IAM (et de nombreux automobilistes âgés à travers le monde), c'est que 68 % des 1628 répondants au sondage estiment que des tests de conduite obligatoires pour les conducteurs de 70 ans et plus rendraient les routes plus sûres. Or, ce n'est pas vrai, estime l'IAM.

 

C'est les jeunes qui font du trouble!

 

L'IAM, une association qui défend les intérêts des automobilistes, trouve «inquiétant» que le public anglais appuie fortement l'examen de conduite obligatoire à partir de 70 ans. Car les conducteurs âgés ne sont pas un risque disproportionné: «8% des conducteurs ont plus de 70 ans et ils sont impliqués dans 4% des accidents avec blessé», écrit Neil Greig, directeur de la recherche à l'IAM, dans un rapport publié récemment.

 

«À l'inverse, 15% des conducteurs ont moins de 20 ans et ils sont impliqués dans 34% des accidents avec blessés», ajoute M. Greig, qui se réjouit que 77% des répondants au sondage pensent que les jeunes conducteurs sont un plus grand risque routier que les aînés. Et donc, que «les jeunes sont le groupe d'âge qui a le plus besoin d'encadrement».

 

La SAAQ tient des statistiques qui regroupent différemment la jeunesse et la vieillesse, mais elles disent essentiellement la même chose. La peur des conducteurs vieillissants est «un faux problème», comme le résume Audrey Chaput, porte-parole de la SAAQ. «Au Québec, les conducteurs d'entre 16 et 24 ans ont 10% des permis et sont impliqués dans 23% des accidents avec blessé ou mort. Les 75 ans et plus ont 9% des permis et sont impliqués dans 8% des accidents avec blessé ou mort.

 

Évaluations et coaching pour les conducteurs âgés

 

«L'IAM considère qu'elle doit rassurer le public» et contrebalancer les perceptions négatives. Mais ce qui est original dans son approche, c'est qu'elle recommande qu'on offre des cliniques de conduite pour les personnes âgées, qui leur permettrait d'évaluer leur conduite et d'obtenir du coaching adapté. «Une évaluation suivie de conseils peut contrer la détérioration de certaines habiletés. Ainsi, on n'aurait pas à retirer leur permis à des conducteurs âgés sûrs», dit le groupe de lobbying.

 

L'organisme veut contrer l'idée, actuellement débattue en Angleterre, d'imposer aux conducteurs vieillissants un examen de conduite obligatoire à partir de 70 ans. Ce débat fait surface dans toutes les sociétés marquées par le vieillissement de la population, où la proportion d'automobilistes âgés sur les routes augmente.

 

«Imposer de nouveaux examens de conduite à 70 ans serait un monstre bureaucratique ne produisant aucune amélioration de la sécurité routière», affirme l'IAM dans son rapport.

 

Au Québec

Au Québec, la loi n'oblige pas les personnes âgées à passer un nouvel examen de conduite à partir d'un certain âge. Mais il y a des contrôles. «À 75 ans, tout détenteur de permis de conduire reçoit une lettre l'avisant qu'il doit subir un examen médical. Sa condition physique doit être évaluée et sa vue examinée», a dit Audrey Chaput, de la SAAQ. «Le même examen médical doit être fait à 80 ans, puis par la suite, à tous les deux ans.»

 

Le médecin peut faire une recommandation dans un sens ou dans l'autre, mais c'est la SAAQ qui prend la décision de maintenir, restreindre ou retirer le permis de conduire, a dit Mme Chaput.

 

Ici, contrairement à ce qui se passe en Angleterre, la SAAQ peut décider de restreindre le permis de conduire, soit en confinant le conducteur à l'intérieur d'un certain rayon d'action (par exemple, 30 km autour de son domicile), soit en lui interdisant de conduire après le coucher du soleil.

 

Tout ou rien

 

En Angleterre, à partir de 70 ans, les conducteurs doivent remplir à tous les trois ans une déclaration concernant leur état de santé (ce sont eux qui la signent). Sur la base de cette demande, les autorités routières accordent ou refusent un renouvellement. Et «c'est tout ou rien» déplore l'Institute of Advanced Drivers. Ou bien le permis est retiré ou le conducteur peut utiliser une voiture partout en Europe. À la place, l'IAM recommande des permis plus nuancés, conformément à l'usage nord-américain.

 

L'IAM recommande par ailleurs qu'on aménage les routes pour faciliter la conduite des personnes âgées et suggère aussi aux constructeurs automobiles de commercialiser des voitures pouvant aider les aînés dans les problèmes de conduite spécifique à leur état. C'est une idée qui est déjà dans l'air.

 

Source : Institute of Advanced Motorists