Ignorés de la plupart des automobilistes, négligés par les autorités compétentes, le ternissement et l'opacité des phares sont une source de danger sur la route. Chiffres à l'appui, le CAA-Québec prend son bâton de pèlerin, réclamant de nouveau une amélioration du rayonnement des phares.

Malgré le verre...

Si le phénomène d'opacité est plus observable sur les véhicules plus anciens, il n'épargne pas pour autant les véhicules d'aujourd'hui, et ce, à un rythme élevé. Le polycarbonate compose aujourd'hui la très grande majorité des lentilles des phares. Pourtant, le verre, longtemps employé, a toujours été plus robuste à l'abrasion. Si cette matière plastique a été choisie par l'industrie automobile, c'est essentiellement pour des raisons aérodynamiques. Plus facilement moulable, le plastique épouse les lignes des carrosseries, ce qui permet d'intégrer les phares à celles-ci dans un souci croissant de recherche d'aérodynamisme.

Un véhicule sur trois

Selon le kilométrage et les routes employées, les phares deviennent généralement opaques après trois ou quatre ans d'utilisation, selon le CAA-Québec qui vient de nouveau de publier une analyse sur le sujet. Les causes sont connues: rayons ultraviolets du soleil et projections de sable, de gravier, de calcium et d'autres matériaux. L'organisation automobile a évalué l'état du parc automobile québécois. Sur 500 véhicules observés dans des stationnements publics à Québec à l'automne 2014, 13,4% avaient des phares dont l'opacité était moyenne et 18,6% avaient des phares en très mauvais état. Des proportions légèrement plus élevées que celles relevées il y a cinq ans. On notera que 62% des véhicules aux phares nécessitant une réparation avaient 6 ans et plus dans l'échantillonnage de septembre 2014.

Un danger potentiel

Circuler avec une automobile aux phares opaques représente un danger. «L'éclairage, ce sont nos yeux le soir. L'humain est sensible à la différence d'éclairage. Et c'est la projection de l'éclairage qui est inefficace», précise Pierre Beaudoin, directeur principal des services techniques du CAA-Québec. En 2010, le club automobile a mesuré l'impact d'un phare en mauvais état sur la vision d'un conducteur. Lors d'un test avec des feux de route, un conducteur de véhicule aux phares restaurés a vu un premier panneau 60 m avant qu'il ne l'aperçoive avec un véhicule aux phares abîmés, soit 6 secondes plus tôt (si l'on considère que l'on parcourt 11 m par seconde à une vitesse de 40 km/h). On imagine les conséquences potentielles en situation d'urgence.

Mais qui s'en soucie?

Gouvernements, corps policiers, SAAQ, à en croire le CAA-Québec, «personne n'a réalisé l'importance du problème», souligne Pierre Beaudoin. «Et comme il n'y a pas d'inspection obligatoire des véhicules au Québec, le problème persiste», ajoute-t-il. La relative indifférence à l'égard de l'état des phares ne serait cependant pas propre au Québec. En fait, comme le fait remarquer le CAA, les constructeurs automobiles n'incluent pas de directives sur les lentilles de phares dans les manuels d'entretien des véhicules neufs.

Une solution toute simple

Pourtant, un bon entretien des phares améliore évidemment le rayonnement et la visibilité. Lors de ses tests menés en 2010, le CAA-Québec avait noté que l'éclairement d'un véhicule aux phares restaurés était supérieur de 1529% (jusqu'à 16 fois plus de lux) à celui d'un véhicule aux phares très opaques. Le club recommande encore aujourd'hui de faire vérifier l'état des lentilles des phares tous les trois ans et de les faire polir au besoin. Les garagistes devraient également les inspecter systématiquement, estime le CAA.