Le vendeur d'autos d'occasion Carvana va inaugurer le 8 décembre une concession entièrement automatisée qui permet d'acheter sa voiture comme un sandwich au jambon ou une canette de boisson gazeuse dans une machine distributrice réfrigérée.

La concession de Nashville, au Tennesse, comprend une tour de verre de cinq étages, tout illuminée, où sont stockées les voitures, une par-dessus et à côté de l'autre, chacune dans une case montée sur un système de chaînes et de poulies. Pour faire descendre sa voiture, le nouveau propriétaire doit taper le code fourni à la fin de la transaction, puis mettre dans la fente de la machine une grosse pièce de monnaie. C'est le code qui trouve la voiture achetée dans l'entrepôt transparent multiétagé, mais c'est la pièce de monnaie qui met le contact du moteur électrique faisant descendre la voiture vers la sortie.

Cette «machine distributrice à autos» a l'air d'un outil de marketing et ne nous racontons pas d'histoires, même si elle est 100% fonctionnelle, c'en est un.

N'empêche, c'est le symbole parfait de ce que Carvana offre au client. Alors que d'innombrables compagnies s'efforcent de personnaliser le service au maximum et d'offrir un contact humain chaleureux, Carvana a découvert qu'en cette époque de commerce en ligne, bien des acheteurs ne veulent pas de contact humain du tout et sont parfaitement satisfaits d'obtenir du service en ne rencontrant absolument personne. En tout cas, pas un vendeur de voitures d'occasion.

Acheter une auto en ligne

Si le client préfère, Carvana peut aussi livrer les autos à domicile, comme une pizza.

En fait, Carvana a étudié en profondeur le processus qui mène à l'achat d'une auto et s'est efforcé de déterminer aussi bien les éléments qui irritent le consommateur que ceux auxquels il accorde de la valeur, a dit Ernie Garcia dans une entrevue à Bloomberg TV (la jeune compagnie ne vend pas de voitures au Canada et n'a pas répondu aux courriels de La Presse).

Carvana (un mot-valise avec «car» (auto) et «nirvana»), lancée en 2013, est une concession automobile sur l'internet, au rabais, et vise d'abord et avant tout la génération qui a toujours acheté en ligne. Elle est en expansion et le succès de son modèle d'affaires reste à démontrer.

La compagnie a divisé en étapes distinctes le processus du magasinage automobile: la recherche dans les voitures en stock, l'inspection visuelle, le financement, la commande, la signature du contrat, les arrangements pour la livraison, tout se fait en ligne.

La fonction inspection du site est ingénieuse: on peut examiner la voiture sous toutes les coutures et les «imperfections» visibles sont indiquées (on peut «zoomer»). Carvana dit acheter surtout des voitures d'occasion de trois ans ou moins ; donc encore sous la garantie du constructeur.

Carvana prétend que son client moyen passe en moyenne quatre heures et demie sur son site entre le premier clic et la signature. C'est la moitié du temps dont a besoin le client américain moyen quand il fait ça dans une vraie concession, dit Garcia. «Une fois, on a eu un client qui a acheté en 10 minutes!»

Oui, mais l'essai routier, lui? Ne dit-on pas partout que c'est crucial, dans l'achat, comme le premier baiser dans une relation? Garcia dit que c'est un peu un mythe. «Environ 11% des acheteurs n'en font même pas et 60% des gens en essaient juste une, affirme-t-il. Et l'essai moyen dure entre cinq et sept minutes. Nous, on vend la voiture avec le droit d'annuler la transaction durant sept jours, alors au lieu d'un essai routier de cinq minutes, vous avez un essai qui dure une semaine, dans vos conditions de conduite à vous.»

Garcia, qui est décidément un matheux, a établi la garantie Carvana à 100 jours ou 4189 milles (6742 km). Pourquoi ce chiffre bizarre? C'est la distance moyenne que l'automobiliste américain parcourt tous les jours - 41,89 milles - multipliée par 100 jours.

La brique et le mortier sont tenus au minimum: Carvana n'a que deux concessions et seulement 55 employés. Ces frais fixes bas permettent de refiler au moins 2000 $ de rabais aux consommateurs et peut-être - l'avenir le dira - de faire de l'argent.

Livraison à domicile

Pour la grande majorité des clients de Carvana - qui vivent trop loin de Nashville pour venir mettre la grosse pièce de monnaie dans la distributrice -, la compagnie livre le véhicule à la porte de l'acheteur. Comme une pizza. Mais ça prend quelques jours.

Et pour ceux qui veulent prendre leur auto dans la distributrice géante, il faut le dire d'avance : il n'y a que 20 places derrière ces vitrines bien éclairées et la compagnie y stationne seulement les voitures qui doivent être cueillies sur place.

Mais on peut aviser Carvana par courriel et ne pas avoir à parler à quiconque.

De plus, le kiosque où l'auto sort, en bas de la distributrice, a été construit un peu en retrait du bureau de vente - où certains clients viennent quand même - et sera ouvert 24 heures sur 24. Alors, oui, on pourra vraiment, si on y tient, acheter une voiture sans aucune interaction avec un être humain.

Quelle époque épique, quand même.