Plus de 70 organismes et simples citoyens ont commencé à défiler ce matin devant un panel de la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) afin de proposer de « nouvelles pistes de solution » pour améliorer le bilan routier du Québec.

Malgré une amélioration notable, depuis 10 ans, les accidents de la route ont fait 325 morts et plus de 1300 blessés graves, en 2015.

Depuis le 3 février, une tournée de consultations publiques sur la sécurité routière menée par la SAAQ a visité neuf villes du Québec. Elle s'arrête aujourd'hui pour trois jours à Montréal. Les échanges porteront sur un vaste éventail de sujets, de la sécurité des piétons à l'utilisation du cellulaire au volant, en passant par les équipements de sécurité des camions et la place des cyclistes et des personnes à mobilité restreinte dans les rues de nos villes.

Au coin de la rue Jean-Talon Ouest, et de l'avenue Victoria, dans Côte-des-Neiges il y a 14 voies de circulation. C'est une intersection compliquée pour les piétons. Photo: David Boily, La Presse

Mais à Montréal, comme ce fut le cas dans les autres villes durant toute la tournée de la SAAQ, c'est le réaménagement sécuritaire des routes, des carrefours et des rues qui sera au coeur des solutions proposées pour améliorer la sécurité de tous les usagers du réseau routier.

Vision Zéro : transformer l'environnement

Le maire de Montréal, Denis Coderre, ouvrira les discussions ce matin. Bien que la Ville n'ait pas donné suite aux demandes d'entrevue de La Presse, il relève de l'évidence qu'il fera état de la stratégie « Vision Zéro », adoptée par la Ville, dont le premier principe est : « La vie humaine est prioritaire - encore plus que la mobilité. »

Il y a deux semaines, l'exécutif de l'administration Coderre a chargé la Commission de transports et des travaux publics de dresser un état de la situation sur « la cohabitation entre les usagers vulnérables et les véhicules lourds en milieu urbain, et [de] recommander des pistes de solution afin d'améliorer la sécurité des usagers de la route ».

Dans ce contexte, la directrice générale du Centre d'écologie urbaine de Montréal, Véronique Fournier, estime que la consultation publique de la SAAQ « arrive à point » pour parler d'enjeux de sécurité routière « dans toutes leurs dimensions, soit la mobilité des gens, l'aménagement des infrastructures, et le principe de prudence qui devrait guider toutes nos politiques de transports ».

« Il faut que ça repose sur une vision entière de la ville, renchérit Suzanne Lareau, présidente de Vélo Québec. Cela suppose qu'on émette des directives aux ingénieurs et aux fonctionnaires pour que, lorsqu'on réaménage une rue, la place du vélo, des piétons, des personnes à mobilité réduite soit pensée en amont, et pas en réaction, après avoir dessiné le reste pour les automobiles. Et ça doit s'appliquer dans la rue, les voies cyclables et dans les parcs. »

Deux poids, deux mesures

Mme Lareau salue ainsi la décision récente de Montréal de lancer un concours d'architecture pour le remplacement du viaduc Van Horne-Rosemont et d'imposer d'avance la présence de trottoirs et d'une piste cyclable. « Un beau réflexe », dit-elle.

En revanche, la promesse du premier ministre Couillard d'élargir l'autoroute 50 à la suite d'une série d'accidents mortels, entre Gatineau et Mirabel, lui laisse l'impression qu'il existe toujours à Québec « deux poids, deux mesures » dans la manière d'établir les priorités en matière de sécurité routière.

« C'est tant mieux qu'on veuille améliorer la sécurité sur l'autoroute 50 parce qu'il y a eu des morts, dit Mme Lareau, mais j'aimerais ça qu'on ait la même énergie quand il y a des morts de cyclistes à cause d'un Code de sécurité routière dépassé et d'un partage de la route qui ne se fait pas bien. »

Un piéton tué à chaque semaine

Le cofondateur de Piétons Québec, Félix Gravel, croit pour sa part que la consultation de la SAAQ, et les moyens déployés pour tâter le pouls des Québécois sur les questions de sécurité routière, « ne peuvent pas aboutir à des demi-mesures. Ça fait des années qu'on en parle. On connaît les problèmes, on connaît les solutions, c'est à Québec, maintenant, de bouger ».

Depuis trois ans, des accidents tragiques, très médiatisés, où des piétons et cyclistes ont perdu la vie, ont mis en relief le besoin de sécuriser davantage les rues de Montréal. Curieusement, cette vague de fond survient alors que le bilan routier du Québec n'indique pas de tendance à la hausse des accidents avec morts ou blessés chez ces deux catégories d'usagers.

« Avec une moyenne de 58 décès par année depuis cinq ans, les statistiques montrent tout de même que chaque semaine, il y a au moins un piéton qui va mourir, quelque part au Québec. C'est comme une fatalité. Et on ne fait rien ? »

BILAN ROUTIER 2011-2015, PIÉTONS ET CYCLISTES

Piétons-Ensemble du Québec

58 morts, 293 blessés graves, 2557 blessés légers

Piétons-Montréal

15 morts, 109 blessés graves, 1121 blessés légers

Cyclistes-Ensemble du Québec

14 morts, 102 blessés graves, 1776 blessés légers

Cyclistes-Montréal

4 morts, 35 blessés graves, 682 blessés légers

Note de la rédaction : Moyenne annuelle sur 5 ans (2011-2015)