La voiture intelligente pourrait bien devenir un nouvel outil d'espionnage si elle n'est pas suffisamment encadrée. C'est pourquoi le commissaire à la vie privée, Daniel Therrien, demande aux législateurs de prévenir plutôt que guérir.

«C'est le moment. Il faut s'assurer d'avoir le bon cadre parce qu'il y a des risques», a-t-il affirmé.

Daniel Therrien a témoigné mardi matin au comité des transports et des communications du Sénat, qui étudie l'arrivée des voitures intelligentes et des voitures autonomes.

Il a expliqué que deux innovations technologiques peuvent fournir des informations sur le conducteur et ses passagers à leur insu.

D'abord, des capteurs peuvent permettre d'extrapoler des données sur le mode de conduite automobile. Ensuite, les systèmes d'infodivertissement utilisés avec les téléphones intelligents peuvent donner accès aux appels entrants, aux messages textes, aux courriels et à la liste de contacts. Ce sont ces systèmes qui donnent de l'information sur la météo et la circulation ou qui permettent d'écouter de la musique en continu.

La géolocalisation peut également révéler les lieux fréquentés par une personne et déduire quelles sont les activités de cette personne.

«Big Brother» en voiture?

«C'est le risque ultime, reconnaît le commissaire. L'un des risques importants est que différentes parties, publiques ou privées - comme des compagnies, des ministères et des corps policiers - puissent savoir où les gens se trouvent. Il y a donc un risque, si le cadre juridique n'est pas approprié, d'avoir une surveillance exagérée.»

Le commissaire croit que la législation actuelle en matière de protection de la vie privée est un bon point de départ, quoiqu'insuffisant. Son bureau financera bientôt la rédaction d'un code de conduite pour les manufacturiers automobiles sur la protection des données.

Selon lui, les consommateurs gagneraient également à être mieux informés sur ces nouvelles technologies, certes pratiques, mais qui collectent une foule d'informations sur eux.

Ce sera d'autant plus vrai pour les voitures autonomes qui collecteront, en plus, des données financières par l'entremise des cartes de crédit utilisées par les passagers. Ces véhicules sans conducteurs peuvent circuler aux États-Unis depuis septembre et sont utilisés entre autres par l'entreprise Uber.

La question préoccupe la sénatrice Raymonde St-Germain, qui craint une mauvaise utilisation de ces données par les fabricants et les vendeurs d'automobiles.

«Il y a intérêt à accélérer les travaux parce que selon les informations que nous avons, l'industrie se prépare et va arriver rapidement, a-t-elle remarqué. Il faut s'assurer que la protection des données personnelles, la protection des utilisateurs soit vraiment intégrée dans le concept de départ pour éviter qu'on ait à faire du rattrapage après qu'il y a eu des abus et de la dénonciation.»

C'est ce que fait valoir également le commissaire à la vie privée, Daniel Therrien, qui voudrait que les fabricants automobiles songent à ces questions durant la phase de développement de ces nouvelles technologies.