General Motors a dévoilé lundi un régime d'indemnisation prévoyant 1 million de dollars au moins pour chaque décès causé par un défaut technique de millions de voitures tardivement rappelées, avec l'espoir de tourner une page peu glorieuse de son histoire.

Le numéro un américain de l'automobile est accusé d'avoir commercialisé des voitures où le commutateur d'allumage était si sensible que le moindre cahot pouvait provoquer l'arrêt du moteur d'une voiture lancée à pleine vitesse, bloquant la direction assistée et empêchant le déploiement des airbags.

Cette malfaçon connue depuis 2005 par GM aurait provoqué 54 accidents, entraînant la mort d'au moins 13 personnes, selon un décompte du constructeur, qui a finalement décidé en février de rappeler 2,6 millions de véhicules en Amérique du Nord (États-Unis, Canada et Mexique).

Mais selon un examen des statistiques fédérales sur les accidents de la route réalisé par la presse américaine, ce sont 309 conducteurs et passagers qui auraient été tués dans des accidents impliquant un véhicule de GM rappelé et où l'airbag ne s'est pas déployé. Quelque 228 autres personnes auraient été blessées, selon ce décompte.

Le groupe automobile va offrir au minimum un million de dollars pour chaque mort, selon le régime d'indemnisation dévoilé par l'avocat de renom Kenneth Feinberg, recruté en avril par GM.

Ce plan prévoit aussi d'indemniser les personnes ayant subi un préjudice corporel. Le montant varie de 20 000 dollars (pour des blessés légers ayant passé une nuit à l'hôpital) à 500 000 dollars (pour ceux qui ont été hospitalisés au moins 32 nuits).

Nombre important de demandes

M. Feinberg, connu pour avoir notamment administré les indemnisations de BP lors de la marée noire dans le golfe du Mexique, indique aussi qu'il n'y aura pas de «plafond» au montant des dédommagements pour certaines catégories de victimes.

GM ne tiendra pas non plus compte des éventuelles responsabilités individuelles des conducteurs (excès de vitesse, taux d'alcoolémie...).

Les plaignants doivent prouver que la défaillance du commutateur d'allumage a été la «cause immédiate du décès ou du préjudice corporel causé par l'accident».

Les personnes indemnisées renonceront à leur droit d'intenter une action en justice contre GM, selon ce plan.

Les victimes et familles de victimes qui avaient déjà trouvé un accord avec GM sans être au courant que le véhicule était équipé d'une pièce défectueuse «pourront percevoir des dédommagements supplémentaires».

M. Feinberg dit s'attendre à «un nombre important de demandes».

Les demandes d'indemnisations seront examinées à compter du 1er août et le groupe se donnera 90 à 180 jours pour verser les sommes aux plaignants.

«Nous prenons nos responsabilités pour traiter les victimes et leurs familles avec compassion, décence et justice», a réagi lundi, par courriel, la directrice générale Mary Barra, dont la gestion de cette affaire est saluée par les marchés et les analystes.

Tourner la page?

GM espère ainsi tourner cette triste page de son histoire, qui a révélé des lourdeurs administratives, des dysfonctionnements et un manque de communication entre ingénieurs et direction.

Mary Barra a vertement critiqué cette culture interne depuis son arrivée à la tête du groupe en janvier, et promis un nouveau GM plus focalisé sur la sécurité.

Si elle a écorné son image, cette crise n'a pas touché les ventes, remontées en mai à leur plus haut avant la crise financière.

Mais le coût financier s'annonce exorbitant. GM a déjà provisionné 2 milliards de dollars pour les rappels, ce qui a englouti ses bénéfices au premier trimestre.

Le groupe automobile reste sous le coup d'enquêtes du département de la Justice, du gendarme des marchés financiers, la SEC, et du Congrès.

L'affaire pourrait aussi se déplacer devant des tribunaux où des douzaines de plaintes ont déjà été déposées contre le groupe automobile.

Une rencontre est prévue le 11 août entre les avocats des parties et un juge de Manhattan, Jesse Furman, qui avait supervisé la faillite du groupe automobile en juin 2009.