Le « lâcher de noms », communément appelé name-dropping, consiste à faire des allusions fréquentes à des personnes, des établissements ou encore à des marques commerciales connues dans le but d'impressionner.

Le recours à cette figure de style est une tendance à la mode en littérature moderne. Dans le secteur automobile aussi. D'ailleurs, les responsables de Kia en ont fait abondamment usage lors de la présentation de ce modèle à la presse spécialisée il y a une dizaine de jours.

Brembo, Harman/Kardon, Michelin

En plus de se bomber le torse sur la suave plastique de sa dernière recrue, il a été abondamment question de la participation de grandes marques comme Michelin et Pirelli (pneumatiques), Brembo (freinage) et Harman/Kardon (système audio) à son élaboration.

De grands noms aussi, comme celui du styliste Peter Schreyer (ex-Audi) et de l'ingénieur Albert Biermann (ex-concepteur des produits de la filiale M chez BMW).

Autant dire que cette sculpturale berline se conçoit comme une démonstration de savoir-faire, une tentative de se forger une crédibilité dans le haut de gamme et se défaire de cette image de « constructeur automobile bon marché ». Un pari déjà tenté avec les Cadenza et K9000, deux « limousines » qui, jusqu'ici, ne prétendent pas faire autre chose que de la figuration sur un marché déjà passablement encombré.

Kia Stinger 2018 - banc d'essai Éric Lefrançois 27 novembre 2017 - crédit: Kia

Fantasme d'un styliste ?

Peter Schreyer, à qui Kia doit beaucoup, rêvait depuis longtemps d'une berline comme le Stinger.

D'ailleurs, le Concept GT présenté au salon de Francfort en 2011 préfigurait sa venue. Le bureau de style a depuis retouché son dessin, mais a su préserver les suaves proportions de cette berline cinq portes qui vise rien de moins que les Audi S5 Sportback et autres BMW Série 4 Gran Coupé.

Manifestement, Kia n'a aucun complexe et va jusqu'à prétendre - avec raison - que sa proposition est non seulement financièrement plus attractive, mais aussi la plus musclée du groupe. On n'en voudra pas au constructeur sud-coréen de taire certains chiffres (rapport poids/puissance et consommation), d'esquiver les questions sur son image de marque ou encore d'élaborer sur le positionnement de Kia et plus particulièrement du Stinger dans la galaxie Hyundai (Kia en est une filiale) qui, il y a quelques mois à peine, a lancé Genesis, une filiale destinée à concurrencer le beau linge de l'industrie.

De là à prétendre que le Stinger exprime les fantasmes de son créateur, Peter Schreyer, il y a un pas que nous ne franchirons pas. D'autant plus que cette berline avance techniquement des arguments tout aussi séduisants. Sans être aussi originale que ne le prétend la direction canadienne de Kia, l'architecture de cette auto (dérivée de l'actuelle Genesis G70) a néanmoins reçu les meilleures attentions d'un certain Albert Biermann. Cet ingénieur allemand débauché il y a trois ans de la filiale M (Motorsport) de BMW a supervisé le développement de ce Stinger - et de tous les modèles hautes performances du groupe Hyundai - et naturellement de sa mise au point sur le circuit du Nürburgring, pour s'assurer que le ramage soit à la hauteur du plumage.

Le prototype originel de 2011, préfigurant l'avènement de la Stinger de production. Photo: Kia

Peter Schreyer. Photo: Hyundai

Une version moins chère l'an prochain

L'équipe de Peter Schreyer a très certainement créé l'une des automobiles les plus séduisantes du moment. Corps oblong et fuselé, capot démesurément long et galbes sensuels soulignent la puissance du Stinger.

Ce dernier amorce sa carrière canadienne ces jours-ci dans une configuration unique : V6 turbocompressé (365 ch) et rouage intégral. Une version animée d'un quatre-cylindres suralimenté (255 ch), plus accessible financièrement, se greffera au catalogue canadien le printemps prochain. Rien n'indique toutefois qu'une déclinaison hybride, voire électrique figure au programme d'enrichissement de ce modèle au cours des années futures, pas plus que l'intégration de nouvelles formes de carrosseries (cabriolet ou coupé) pour mieux quadriller le marché, comme le font avec gourmandise plusieurs de ses rivaux.

Le pouvoir de séduction du Stinger s'arrête une fois les portières ouvertes. 

L'arc prononcé du pavillon dynamise la ligne au détriment des passagers arrière qui devront composer avec un accès difficile et une garde au toit limité. Fonctionnel, le hayon s'ouvre sur une aire de chargement large, mais peu profonde. Sa faible hauteur limite son volume à 406 L contre 563 L pour la Volkswagen CC. La banquette rabattable procure suffisamment de confort et de dégagement - à l'exception de la tête - pour deux adultes normalement constitués. À l'avant, les sièges procurent plus de confort que de maintien. Un peu plus de support aurait été apprécié. Le tableau de bord, d'une facture tristement classique et peu inspirée, réunit l'essentiel, sans plus. En outre, la qualité de certains revêtements laisse à désirer par rapport aux cibles avouées de ce modèle.

C'est le lot des coupés. Les bagages sont plus faciles à caser dans le coffre que les passagers arrière dans leur siège. Photo: Kia

Comportement bluffant

Joli à regarder, le Stinger se comporte plutôt bien en mouvement. Son moteur 3,3 L suralimenté affiche une belle rondeur et un rendement sans histoire. L'accélération et les reprises sont solides, mais sont hélas ralenties par un moteur frileux à grimper dans les tours et une boîte de vitesse lente et peu réactive.

Le Stinger pourrait faire mieux encore s'il n'avait pas à déplacer une masse aussi lourde. La puissance de son V6 ne vise apparemment qu'à masquer son embonpoint face à des rivales moins puissantes certes, mais autrement plus légères et surtout, plus économes à la pompe. À ce chapitre, le Stinger n'impressionne guère, pas plus que la petitesse de son réservoir de carburant qui limite son autonomie.

Par chance, le poids ne se ressent guère au volant. L'assistance de la direction est bien dosée et permet d'inscrire l'auto avec autorité dans les virages. La répartition du poids presque parfaite entre les trains roulants ajoute à l'agilité du Stinger sur une route sinueuse. Les suspensions, quoique légèrement trépidantes (les réglages choisis ont peu d'incidence), sur une chaussée en mauvais état, contrôlent admirablement bien les mouvements de caisse et contribuent à la tenue de cap du véhicule au comportement volontairement survireur en dépit du rouage intégral.

Tout compte fait, le Stinger ne représentera pas une réelle menace pour Audi, BMW ou Mercedes, mais un sérieux avertissement tout de même.

Les frais de déplacement liés à ce reportage ont été payés par Kia Motors.

Le Stinger GT est lourd. Ça parait à la pompe, mais pas derrière le volant. Photo: Kia

Trois fleurs, trois tomates

On aime



Comportement solide

Rapport prix/valeur

Habitacle fonctionnel

On aime moins



Suspensions trépidentes

Poids et consommation élevés

Faible réactivité de la boîte

La facture

Fourchette de prix ($) : 44 195 $ à 49 995 $

Transport et de préparation : 1675 $

Garantie de base (mois/km) : 60 / 100 000

Consommation réelle (L/100 km) : 11,6

Visible dans les concessions : maintenant

Concurrentes à surveiller : Audi S5 Sportback, BMW 4 Gran Coupe

Pour en savoir plus : www.kia.ca

Fiche technique

Moteur : V6 DACT 3,3 litres suralimenté

Puissance : 365 ch. à 6000 tr/min

Couple : 376 lb-pi entre 1300 et 4500 tr/min

Poids : 1825 kg

Rapport poids/puissance : 5

Mode : intégral

Transmission de série : automatique 8 rapports

Transmission optionnelle : aucune

Diamètre de braquage : nd

Freins : à disque au quatre roues

Pneus : 225/40R19 en avant, 255/35R19 derrière

Capacité du réservoir : 60 litres

Essence recommandée : super