Le groupe automobile japonais Mitsubishi Motors a réussi à se relever d'un vaste scandale dans les années 2000. Survivra-t-il à un deuxième ?

Faisons le point sur l'affaire de trucage de données. Et sur l'avenir du constructeur.

La firme aux trois losanges a avoué la semaine dernière avoir manipulé des données pour embellir les performances énergétiques de quatre modèles de mini-voitures, tous vendus au Japon.

Une tricherie qui dure depuis 25 ans

Pour l'heure, 625 000 voitures fabriquées depuis 2013 sont concernées, dont 468 000 produites pour Nissan.

Une nouvelle révélation est tombée mardi : le groupe a admis avoir utilisé une méthode de tests non conforme à la législation japonaise depuis 1991. Plusieurs dizaines de modèles seraient en cause, estime la presse, ce que le groupe dit ne pas pouvoir encore confirmer.

Depuis qu'a éclaté le scandale, l'action Mitsubishi Motors a perdu la moitié de sa valeur, et la capitalisation boursière du groupe a fondu de 4,3 milliards de dollars canadiens.

Une autre fraude pour "verdir" des voitures

Mitsubishi Motors aurait agi de la sorte pour classer ses véhicules dans la catégorie des voitures «vertes», qui permet aux acheteurs de bénéficier d'une réduction de taxes. Cela lui aurait permis de doper ses ventes face à ses rivaux japonais Honda, Daihatsu et Suzuki.

Mitsubishi est en effet à la peine depuis un précédent scandale qui a fortement écorné son image dans l'archipel, où il ne vend plus que 100 000 voitures par an, sur un total d'un million dans le monde.

Quel impact sur les ventes ?

Mitsubishi Motors propose d'un côté les automobiles de petit gabarit (moteurs de moins de 660 cc), de l'autre les 4x4.

Sa gamme est limitée, alors «le succès ou l'échec d'un de ces deux types de véhicules a un impact significatif sur les résultats», soulignait récemment l'agence de notation financière Standard & Poor's.

La production et la vente des quatre premiers mis en cause (des mini-véhicules) ont d'ores et déjà été suspendues. Les ventes des autres voitures risquent de souffrir de cette série de révélations.

Mitsubishi Motors, qui fournit de nombreux véhicules à d'autres constructeurs parmi lesquels Nissan, s'expose aussi à des sanctions de leur part.

n'est pas certain que Mitsubishi Motors se relèvera cette fois. Photo: AP

La facture sera salée

Mitsubishi Motors dispose actuellement de liquidités d'environ 400 milliards de yens (4,6 milliards de dollars CAN), ce qui devrait a priori lui permettre, selon Standard &Poor's, d'«absorber l'impact financier de l'incident si la fraude n'affecte que les mini-voitures au Japon».

Mais si elle devait s'étendre, la donne se compliquerait pour Mitsubishi Motors.

Il devra verser des compensations financières à Nissan et aux nombreux particuliers floués, qui ont consommé plus de carburant qu'escompté.

Il lui faudra aussi peut-être rembourser les ristournes fiscales, sans compte d'éventuelles amendes.

Enfin il affronte d'importants risques juridiques, avec des plaintes susceptibles de pleuvoir, en particulier si l'affaire devait gagner les Etats-Unis.

Peut-il se redresser ?

Son horizon paraît bien sombre: Mitsubishi Motors n'a pas la force de frappe d'un Volkswagen.

Le géant allemand, qui avait reconnu en septembre avoir équipé le moteur d'environ 11 millions de véhicules diesel d'un logiciel truqueur pour les faire passer, au moment des tests de contrôle, pour moins polluants qu'ils ne sont, a certes enregistré en 2015 sa première perte annuelle depuis plus de 20 ans - mais sa survie n'est pas en jeu.

Un historique de dissimulation

Avant le scandale actuel, Mitsubishi --un nain losrsque comparé au colosse Volkswagen-- avait déjà été fragilisé par un scandale de camouflage de défauts dans les années 2000, dont il avait réussi à se relever grâce à l'intervention des autres entreprises du Groupe Mitsubishi (un holding industriel très diversifié). Mitsubishi Motors avait confessé à l'été 2000 avoir reçu à partir de 1977 des milliers de plaintes pour des problèmes divers, réparés en cachette.

Avant cela, en 2004, il avait été éclaboussé par une affaire de dissimulation de défauts sur des camions de sa filiale Mitsubishi Fuso, responsables de deux accidents mortels. Il avait alors été lâché par son grand partenaire germano-américain DaimlerChrysler.

Mitsubishi Motors avait à l'époque promis de «changer la culture d'entreprise et d'améliorer la transparence».