Le projet de loi 48, qui prévoit l'instauration l'an prochain d'une inspection des émissions polluantes des vieux véhicules, met en exergue des divergences chez les représentants des consommateurs et montre que la réflexion sur le sujet est à poursuivre.

L'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) s'est insurgée jeudi contre les propos tenus par le président de l'Association pour la protection des automobilistes (APA), Georges Iny. «Dans son éditorial du magazine Protégez-vous, M. Iny a poursuivi sa campagne de désinformation au sujet du projet de loi 48, en utilisant une fois de plus des chiffres erronés et en faisant valoir une position qui ne représente pas celle de l'ensemble des automobilistes du Québec», a estimé André Bélisle, président de l'AQLPA, accusant son homologue de «faire preuve de malhonnêteté intellectuelle» et de militer contre ce projet de loi.

Le projet de loi 48 prévoit l'inspection environnementale obligatoire à la revente de tout véhicule âgé de huit ans et plus. L'inspection coûtera vraisemblablement de 60$ à 100$ aux consommateurs. Sans un avis de conformité, l'immatriculation ne sera pas possible. À plus long terme, cette inspection sera imposée à un plus grand nombre de véhicules. Près de 40 pays dans le monde se sont dotés d'une telle législation, de même que l'Ontario et la Colombie Britannique au Canada.

L'AQLPA et l'APA ne font pas la même lecture des chiffres du programme ontarien. Entre 1999 et ce mois de mars, environ 11% de tous les véhicules légers inspectés dans cette province ont été recalés au test. La première année du programme, cette proportion était de 16,4%. Elle n'a fait que baisser depuis. En 2008, elle a été de 6,4%. L'AQLPA reproche au président de l'APA de ne pas souligner les meilleurs chiffres.

«Dans les premières années du programme ontarien, les automobiles étaient à carburateur, elles n'avaient pas la technologie d'aujourd'hui. La comparaison est ridicule», répond George Iny.

Les émissions polluantes réduites de 35% en Ontario

L'AQLPA rappelle que le programme ontarien a permis de réduire de 35% les émissions polluantes des véhicules légers entre 1999 et 2008. «La cause n'est pas seulement le programme d'inspection, les voitures neuves sont beaucoup moins polluantes», insiste M. Iny, qui ajoute que l'on ne pourrait obtenir un tel taux aujourd'hui en raison des progrès technologiques.

Les deux organismes sont d'avis que le smog est un réel problème. Mais pour l'APA, «c'est un phénomène local, voire régional, où les alertes ne sont pas seulement liées à l'automobile». «M. Iny devrait savoir que les alertes au smog se sont étendues depuis longtemps à l'Outaouais, à Québec et même jusqu'au Saguenay-Lac-Saint-Jean», rétorque l'AQLPA.

«On est en faveur d'un programme d'inspection ayant un bon rapport coûts-bénéfices, moins gaspilleur. (...) Quand une auto ne passe pas un test, c'est parfois un moteur qui est fini ou des pièces chères à remplacer», dit M. Iny. Un argument socio-économique qui est avancé par Roger Lafrance, coordonnateur de l'Association coopérative d'économie familiale Montérégie-Est.

«Pour nous qui intervenons chaque jour auprès de consommateurs vivant des difficultés budgétaires, l'impact financier d'un tel programme n'est pas négligeable, écrit-il dans une lettre ouverte. Dans certaines provinces qui ont adopté ce type de programme, on fixe un montant maximal pour les réparations au véhicule. Nous sommes d'avis que c'est surtout la classe moyenne et à faible revenu qui sera affectée par cette mesure. (...) Elle touchera aussi les résidants des régions pour qui l'utilisation d'une auto n'est pas un choix.»

L'APA estime qu'il «faut trouver une solution qui épargne les voitures conformes. Le législateur doit repérer les voitures les plus à risque. Ou peut-être doit-on appliquer à une région plus qu'à une autre un tel programme?»

L'AQLPA rappelle que «le Québec est la dernière juridiction d'importance en Amérique du Nord à ne pas avoir réglementé les émissions polluantes des véhicules légers».