Outre le recul du dollar canadien ainsi que la hausse du prix du baril de pétrole, l'augmentation des taxes sur le carburant au Québec explique en grande partie pourquoi il y a fort à parier que le répit à la pompe ne sera pas de sitôt pour les automobilistes.

Dans la foulée de la récente hausse du prix du litre d'essence, qui a dépassé 1,50 $, une étude du Mouvement Desjardins s'est penchée sur le phénomène, puisque le prix du baril de pétrole demeure inférieur au sommet de 145 $ atteint à l'été 2008.

Ainsi, d'après le document rédigé par l'économiste principal Mathieu D'Anjou et rendu public mercredi, un litre d'essence à 1,45 $ à Montréal représente actuellement 51 cents de taxe, par rapport à 43 cents en 2008.

Cet écart s'explique entre autres par les quatre hausses consécutives d'un cent décrétées sur la taxe d'accise provinciale depuis 2008-2009 ainsi que par la taxe pour financer le transport en commun dans la région métropolitaine, qui a été augmentée de 1,50 cent le litre.

M. D'Anjou souligne que les prix à la pompe au Québec ont également été influencés par la hausse de deux points de pourcentage de la taxe de vente du Québec (TVQ). Il serait surpris de voir Québec faire marche arrière sur ce point.

«Nous n'avons aucune indication à ce sujet (...), a-t-il expliqué. Le défi des finances publiques demeure aigu au Québec et le mieux que les automobilistes peuvent espérer (...) est une stabilité des taxes.»

En tenant également compte du dollar canadien, dont la valeur s'établit à quelque 90 cents US, ainsi que de certaines variations saisonnières, l'économiste du Mouvement Desjardins ne voit pas le litre d'essence descendre «bien en dessous» de 1,35 $.

Même s'ils sont souvent les premiers blâmés lorsque le prix à la pompe bondit, M. D'Anjou ne croit pas que les détaillants soient les principaux responsables de l'augmentation continue des prix du carburant.

«Quand le prix a atteint 1,53 $ le litre (...), il est vrai que certains détaillants avaient fait bondir leur marge par rapport au prix plancher à plus de 10 cents le litre, mais de telles exagérations du côté des marges ne durent cependant jamais très longtemps», écrit-il.

Pour espérer voir les prix de l'essence revenir aux niveaux d'il y a une décennie, il faudra un «véritable effondrement» des cours pétroliers, croit M. D'Anjou.

«Avec des prévisions raisonnables (...) on pense qu'on risque de retourner aux alentours des 1,35 $ le litre, précise l'économiste. À moyen terme, on risque plus de se promener entre 1,30 et 1,50 $ (le litre) au cours des prochaines années.»

Il rappelle que le facteur déterminant du prix à la pompe demeure - sans surprise - le coût du pétrole brut, qui, en raison de l'incertitude à certains endroits dans le monde, a tendance à demeurer élevé.

«Les troubles dans plusieurs pays du Moyen-Orient ont limité la progression de l'offre mondiale, écrit M. D'Anjou. Si l'on ajoute (...) les tensions importantes avec l'Iran et la Russie, il n'est pas surprenant de voir que les prix internationaux demeurent élevés.»

L'étude rappelle que le prix de l'essence au Québec est influencé par le prix du pétrole Brent, qui vaut près de 110 $ US le baril, ce qui est un prix élevé d'après M. D'Anjou, mais loin du sommet de plus de 145 $ US atteint au cours de l'été 2008.

Quant à un retour du litre d'essence à 1,35 $, l'économiste du Mouvement Desjardins l'attribue à des effets saisonniers aux États-Unis entre les mois de février et mai qui profitent aux raffineurs.

«Beaucoup de raffineries sont en arrêt (au cours de cette période) pour des raisons de maintenance et le passage à la production d'essence d'été tend année après année à faire bondir les marges des raffineurs», souligne M. D'Anjou.

Il prévient toutefois que cette tendance devrait bientôt se renverser, ce qui pourrait enlever «quelques cents» au prix du litre d'essence.