Le baril de pétrole à moins de 50$ et la baisse du prix de l'essence nuiront aux ventes de voitures électriques et hybrides en 2015, prévient le constructeur allemand BMW, qui vient d'investir des centaines de millions d'euros dans ses modèles i3 et i8.

C'est le patron mondial des ventes et du marketing de BMW qui a résumé l'évidence lors d'une allocution devant 1000 invités à la Conférence DLD-15 (Digital-Life-Design), à Munich - une espèce de croisement entre Davos, le Consumer Electronics Show de Las Vegas et les conférences TED. «Des changements à court terme se produiront dans certains pays, a dit Ian Robertson, cité par les agences de presse. Il y aurait un certain mouvement vers les véhicules à gros moteurs.»

C'est tout un euphémisme. Ce mouvement semble avoir commencé en parallèle du développement des autos électriques.

Robertson a fait ces remarques le dimanche 18 janvier, peut-être encore sous le choc de ce qu'il avait vu au salon de l'auto de Detroit, quelques jours auparavant: les exposants du principal salon de l'automobile des Amériques y ont surtout rivalisé de puissance et de grosseur. Même General Motors, qui a présenté la nouvelle hybride Volt 2016 et le prototype tout électrique Bolt, a aussi exposé bien des camionnettes et de gros VUS.

En réalité, la baisse du prix du pétrole l'an dernier a déjà eu un impact négatif sur les ventes d'autos électriques. Aux États-Unis, marché-phare de l'électrification automobile en raison des nouvelles normes de consommation, les ventes d'hybrides et de tout-électriques ont fléchi en 2014 à 570 465 unités, 3,7% de moins (presque 22 000 autos) qu'en 2013. Et ce, durant une année où les ventes totales ont grimpé à 16,5 millions de véhicules (900 000 de plus qu'en 2013). La part de marché des véhicules partiellement ou totalement électriques est ainsi passée de 3,8% à moins de 3,5%, selon les chiffres compilés par l'Electric Drive Transportation Association. Le prix de l'essence aux États-Unis est retombé sous la barre des 2$ le gallon, un seuil psychologique semblable à 1$ le litre ici.

La tournure des événements est embêtante pour BMW, Cadillac, Tesla, Smart, Kia, Chevrolet et Porsche, qui viennent de lancer ou s'apprêtent à lancer d'ici peu des véhicules électriques ou hybrides mis au point pour se conformer aux futures normes américaines sur la consommation moyenne des véhicules.

Avec l'essence au même prix qu'en 2004, les consommateurs sont encore moins disposés à payer plus cher pour une voiture qui consomme moins (ou pas du tout) d'essence. Les gros véhicules mus par de gros moteurs à combustion interne redeviennent tentants. Ce qui veut dire que la pollution, l'émission de gaz à effet de serre et la fonte de la banquise polaire risquent de s'accélérer. Ce n'est pas de bon augure, et pas seulement pour les ours polaires.

BMW, qui a vendu 16 000 i3 et 1740 i8 en 2014, espérait faire beaucoup mieux cette année avec la distribution mondiale de ces deux voitures et le lancement d'une version hybride du VUS X5.

Pour l'instant, BMW garde le cap, indépendamment des fluctuations du prix de l'essence: «Le cadre réglementaire aux États-Unis, en Europe, en Chine et au Japon est clair, et ça, ça ne changera pas, a dit Ian Roberston à la Conférence DLD-15. On assiste à l'avènement de l'auto zéro-émission, et notre stratégie reste pointée dans cette direction.»

Les analystes s'attendent à ce que le prix du pétrole remonte, mais on ne sait pas quand ni à quel point.