La marque smart abandonne le moteur à essence en Amérique du Nord. Et mise sur sa nouvelle version tout électrique pour subsister dans un marché où les microvoitures n'ont vraiment pas la cote. Un geste fort dans l'industrie automobile qui n'est pas si surprenant que ça.

AVEU D'ÉCHEC ?

Le courrier envoyé par Dietmar Exler à ses concessionnaires ressemble au premier abord à un aveu d'échec. « Les développements au sein de la catégorie des microvoitures présentent des défis pour l'actuelle gamme de smart. Se concentrer uniquement sur la motorisation électrique aux États-Unis et au Canada est une étape logique pour appuyer un futur durable », a récemment écrit le chef de Mercedes-Benz USA. Pour notre chroniqueur et essayeur Éric LeFrançois, notre conclusion est un raccourci un peu trop facile : « Ce n'est pas un aveu d'échec, c'est qu'ils n'ont pas réussi à faire grandir la marque. [...] La smart à essence est une voiture citadine qui n'a pas trouvé son marché en Amérique du Nord. »

LA VERSION ÉLECTRIQUE PLUS JUSTIFIÉE

Dès le mois de septembre, la maison mère Daimler AG coupera les vivres aux seuls concessionnaires nord-américains. L'année-modèle 2017 sera la dernière livrée à essence qu'ils recevront. On gage que les dernières ventes de cette version auront lieu jusqu'en 2018. C'est avec la nouvelle version électrique des smart et smart décapotable que composeront les vendeurs. Son prix est encore inconnu, son autonomie sera d'environ 160 km, et son arrivée est programmée pour juillet au Canada.

RAPPORT QUALITÉ-PRIX PLUS ATTRAYANT

L'un des plus gros défauts de la smart a toujours été son prix, qui se chiffre actuellement à 17 300 $. À ce prix-là, on peut même acheter une voiture compacte.

En privilégiant la version électrique améliorée, Daimler pourrait conférer à sa smart un rapport qualité-prix un peu plus attrayant.

Si la dernière version électrique en date se vend à partir de 26 990 $, la nouvelle version à venir pourrait être à environ 25 000 $. Somme dont il faudra soustraire, après taxes, le rabais à l'achat de 8000 $ accordé au Québec pour un modèle électrique. Avec une batterie de 17,6 kWh, la nouvelle smart y aura droit.

CONTEXTE DÉFAVORABLE

Créée en 1994 et lancée quatre ans plus tard en Europe, cette petite voiture à deux places ne peut dès le départ qu'occuper un marché de niche. Elle n'en sortira jamais. La microvoiture, ça ne marche pas, surtout en Amérique du Nord. Et elle n'est pas la seule à ne pas séduire. La tendance du marché est au « toujours plus gros et toujours plus grand ». Et pas uniquement en Amérique du Nord. L'Europe se laisse de plus en plus séduire par les VUS, par exemple, qu'ils soient sous-compacts ou compacts.

L'abandon de la version à essence de la smart est d'autant plus compréhensible dans ce contexte.

LA STRATÉGIE DU GROUPE A CHANGÉ

La décision de supprimer du marché nord-américain cette version à essence est, semble-t-il, « très récente ». Mais elle n'est pas illogique et surprenante au vu de la stratégie du groupe Daimler dévoilée au dernier salon de Paris, en octobre. « Notre nouvelle voie, c'est l'électrification », rappelle JoAnne Caza. Et la smart électrique existe depuis 2009, mine de rien. Enfin, la décision est d'autant plus facile à prendre que seulement 6211 smart ont été vendues aux États-Unis en 2016, et 1875 au Canada, où sa part de marché, malgré une bonne année, a été infinitésimale : 0,1 %.

RÉPONDRE AUX BESOINS DU LIBRE-SERVICE

C'est en filigrane un autre argument en faveur de ce changement. Que l'on dément à demi-mot chez Daimler. Pionnière dans le libre-service, sa filiale car2go risque d'avoir de plus en plus recours à la version électrique de la smart, à la demande des villes qui veulent favoriser le transport vert. Montréal, par exemple, y tient mordicus. Mais dans la métropole québécoise comme ailleurs, les parcs de car2go vont conserver le modèle à essence pour encore « un bout de temps ». Vont-elles devoir cependant s'orienter vers le modèle électrique à plus ou moins long terme ? « Éventuellement, oui, parce qu'il n'y aura plus de modèles à essence », répond JoAnne Caza. Mais pour car2go, il est impératif qu'entre-temps, les villes se soient équipées de bornes de recharge en nombre suffisant.