Cocorico! Des voitures made in France bleu-blanc-rouge rouleront à nouveau sur les routes nord-américaines dès 2013. Oh, mais attention, ce ne seront ni des Renault, ni des Peugeot ni des Citroën; ce seront des Toyota Yaris.

Toyota a annoncé que les Yaris destinées au marché nord-américain ne seront plus faites au Japon, comme c'est le cas actuellement. La production sera transférée à l'usine Toyota d'Onnaing, non loin de Valenciennes, dans le Nord de la France, tout près de la frontière belge.

C'est l'usine d'Onnaing qui assemble les Yaris européennes depuis le début des années 2000. En 2011, Toyota a investi 150 millions d'euros pour moderniser la chaîne d'assemblage et pour l'adapter à la 3e génération du modèle. Selon le site de l'usine, 2 128 000 Yaris ont été construites à Onnaing depuis janvier 2001.

Avant d'expliquer pourquoi Toyota délocalise sa production japonaise en France, prenons le temps de souligner l'ironie, pour les quelques irréductibles québécois de la voiture française, de voir Toyota réussir là où les constructeurs français ne semblent même plus essayer.

Peugeot et Citroën ont quitté l'Amérique du Nord durant les années 70. Renault a fermé son usine de Saint-Bruno en 1974.  Renault a tenu le coup un peu plus longtemps en achetant American Motors et lui faisant assembler aux États-Unis des Renault 9 (Alliance) et des Renault 11 (Encore), avant de lancer définitivement l'éponge en 1987.

En France aussi on trouve que l'initiative de Toyota fait mal paraître Renault et PSA (Peugeot et Citroën), mais pour des raisons différentes :  "C'est le monde à l'envers. Des Japonais fabriquent désormais en France des voitures qu'ils exportent vers les Etats-Unis! À une époque où nos propres constructeurs parlent d'assembler ailleurs les autos qui nous sont destinées, avouez que c'est surprenant...", écrit le blogueur Hughes Serraf.

En effet, les constructeurs français, comme tout le monde, fabriquent leurs modèles très économiques dans les pays d'Europe de l'Est et d'Afrique du Nord où ils sont le plus populaires. Et ils profitent des bas salaires de ces pays pour produire aussi des unités supplémentaires qu'ils ramènent sur le Vieux Continent et qu'ils vendent aux moins bien nantis d'Europe.

Puisqu'on parle de coûts, c'est pour cela que les Yaris d'Onnaing seront exportées ici. Toyota, comme tous les exportateurs japonais, souffre de la dévaluation du dollar américain par rapport au yen. Toyota, Honda et Nissan ne font plus d'argent en exportant leurs sous-compactes fabriquées au Japon vers le marché américains. Nissan et Honda s'installent au Mexique.

Pour Toyota, qui assemble des modèles intermédiaires dans des usines non syndiquées du Sud des États-Unis, l'usine d'Onnaing est un choix logique à cause des économies d'échelle et de la capacité de production.

Avec ses 4300 employés et sa bonne productivité, l'usine d'Onnaing filait le parfait bonheur depuis janvier 2011, mais la récession européenne a réduit de 22 % les ventes de la Yaris en Europe. Les 25 000 Yaris par année destinées à l'Amérique du Nord tombent bien, elles compenseront en partie le ralentissement des ventes en Europe et permettront de garder l'usine occupée et rentable pour le moment. Et ça ne coûtera que 8 millions d'euros à Toyota pour adapter la chaîne de montage aux spécificités nord-américaines (moteur de 1,5 litre, conçu spécifiquement pour ici, une boîte automatique et un pare-chocs arrière différent).

Rappelons que quelques jours après l'annonce des 25 000 Yaris  Toyota à Onnaing, Renault a annoncé l'élimination de 300 emplois à son usine de Flins, près de Paris. Les deux nouvelles ne sont pas liées, mais ça donne une idée du contraste.