Le scandale Volkswagen n'est pas près de s'éteindre aux États-Unis: le groupe allemand va devoir lutter pour conserver ses parts de marché dans le pays tout en étant sous la menace d'actions judiciaires en cascade des autorités et de plaignants.

Le ministère de la Justice américain a ouvert une enquête pénale contre le constructeur allemand, qui a admis avoir équipé certaines de ses voitures de logiciels truqueurs permettant de fausser des tests antipollution, a indiqué à l'AFP mardi une source proche du dossier.

«Il est encore trop tôt pour spéculer sur l'issue de cette investigation», explique à l'AFP l'ancien procureur fédéral Jacob Frenkel, pour qui le ministère américain va particulièrement examiner la gestion du scandale par VW.

Quelle sera la réponse de Volkswagen à cette affaire? Va-t-il y avoir des sanctions contre les individus directement responsables? La faute incombera-t-elle totalement à des cadres vivant et travaillant hors des États-Unis?

Grosse amende

Il est fort probable que les deux parties parviennent à un accord à l'amiable, assurent l'ex-procureur reconverti en avocat et des analystes.

L'amende devrait toutefois être supérieure, avancent-ils, aux 1,2 milliard de dollars versés en 2014 par le japonais Toyota pour des problèmes d'accélération inopinée ou aux 900 millions de dollars de pénalité infligés à General Motors pour un défaut du commutateur d'allumage lié à 124 morts.

Le cas de Volkswagen est singulier, explique Jacob Frenkel: à l'inverse de Toyota et de GM à qui le ministère de la Justice reprochait principalement d'avoir traîné des pieds pour agir, Volkswagen a déjà admis avoir «totalement merdé», fait-il remarquer.

Le constructeur, qui est aussi sous le coup d'une enquête de l'Agence fédérale de l'environnement (EPA), a mis de côté mardi 6,5 milliards d'euros.

Il doit également composer avec les élus américains, qui ont déjà annoncé des auditions au Congrès, qui sont souvent le théâtre d'humiliations publiques de dirigeants d'entreprises.

Volkswagen va aussi devoir faire face à la colère de particuliers qui ont acheté ses voitures, persuadés que leur véhicule émettait 10 à 40 fois moins de CO2 comme vanté par les publicités du constructeur allemand.

Publicité mensongère

Le cabinet d'avocats Hagens Berman, basé à Seattle, a déjà annoncé avoir déposé une plainte en nom collectif dans plus d'une vingtaine d'États, accusant Volkswagen de fraude et de publicité mensongère.

«J'ai acheté une Golf TDI premium parce qu'on m'avait promis qu'elle était "diesel propre". On m'avait dit que les émissions étaient meilleures que dans une automobile standard (...) J'ai le sentiment d'avoir été escroqué», s'insurge par exemple un des clients du cabinet d'avocat.

«Il y a une violation élémentaire de la confiance des clients de Volkswagen qui lui ont toujours été très fidèles aux États-Unis», estime Jack Nerad, analyste au cabinet Kelley Blue Book, spécialisé dans l'automobile.

«C'est dans l'intérêt de Volkswagen de détailler publiquement et aussi vite que possible comment il va s'y prendre pour réparer les dégâts afin de ne pas perdre ses clients pour de bon», renchérit Jessica Caldwell, chez Edmunds.com.

D'après l'agence de notation Fitch, ces actions judiciaires potentielles pourraient se traduire par une facture salée dans les deux prochaines années.

Avec ce scandale, Volkswagen, qui souffre déjà aux États-Unis d'une réputation de constructeur de voitures onéreuses, voit par ailleurs s'effondrer ses efforts de ressusciter le gazole dans le pays.

Pour imposer ses berlines Passat TDI et Jetta, ses compactes Golf TDI et Golf VI dans un marché dans un marché peu réceptif, le groupe allemand vantait la sobriété du moteur diesel qui permettait d'atteindre à temps les objectifs draconiens d'émissions de CO2 fixés par le gouvernement américain.

La consommation moyenne d'essence devrait être de 6,7 litres pour 100 kilomètres à l'horizon 2016 et de 4,3 litres d'ici 2025.

«Le diesel va rester un marché de niche», estime ainsi M. Nerad.

Actuellement près de 50 modèles diesel proposés par Volkswagen, GM, Fiat Chrysler, Mercedes-Benz, BMW, Land Rover et Mazda sont disponibles sur le marché américain, selon l'association Diesel Technology Forum (DTF), lobbying du gazole.

Mais le diesel ne représente que 3% des ventes automobiles aux États-Unis, selon le cabinet d'études J.D. Power.