Bien des modèles diesel du Groupe Volkswagen incriminés dans le scandale que l'on sait possèdent un système d'injection d'urée, permettant de diminuer les émissions d'oxyde d'azote et donc de respecter les normes environnementales. Ce système n'a pas suffi. Du moins, apparemment. Car, dans les faits, on peut programmer les émissions polluantes. De quoi douter des autres constructeurs?

Ce à quoi sert un système d'urée...

Rappelons que les émissions polluantes des moteurs diesels, particulièrement l'oxyde d'azote, peuvent être neutralisées par un système d'injection d'urée. Une fois l'hydrocarbone et le dioxyde de carbone retirés partiellement par un premier catalyseur, les gaz d'échappement passent dans un filtre puis sont injectés d'un liquide composé d'urée. L'oxyde d'azote est alors réduit et converti en azote, en dioxyde de carbone et en vapeur d'eau, dans un second catalyseur. C'est ce qui sort du pot d'échappement.

...qui ne garantit rien...

Nombreux sont les propriétaires de Volkswagen à s'interroger sur l'utilité et l'efficacité de ce système d'injection d'urée depuis les révélations faites sur les manipulations de Volkswagen. Leur Passat 2012 ou 2014, leur Jetta ou leur Golf 2015 ont beau être dotées de ce système d'urée, ces modèles ont été pris en défaut. Comme les Jetta et les Golf d'avant 2014 qui ne possèdent pas un tel système. Comment est-ce possible ? « Peut-être que le temps ou le dosage de l'injection de l'urée n'est pas adéquat ou insuffisant », suppose Paul Baribeau, professeur en mécanique auto à L'École de l'automobile et ancien maître technicien chez Ford.

Le système d'urée à lui seulne garantit pas que les quantités d'émissions respecteront systématiquement les normes permises. « On est à l'ère de l'électronique, tout est contrôlable. C'est une question de programmation », dit M. Baribeau.

...masi qui fonctionne

Ces systèmes d'injection d'urée ont prouvé leur utilité jusqu'ici, comme en témoigne John German, codirecteur de l'International Council on Clean Transportation, l'organisme indépendant qui a mis au jour les manipulations de Volkswagen.

« Le troisième véhicule que nous avons testé aux États-Unis était un BMW X5 doté d'un système d'injection d'urée. Le véhicule était propre dans la plupart des conditions d'utilisation, ce qui démontre que les constructeurs peuvent concevoir des voitures diesels qui sont propres dans la réalité », souligne John German.

Cette constatation est partagée par Paul Baribeau : « Les camions lourds et mi-lourds américains et européens qui ont un système d'urée trouvent le moyen de respecter les normes. Tout le monde est apte à le faire. Pourquoi Volkswagen ne le peut pas ? Ce n'est pas qu'il ne le peut pas, c'est qu'il ne le veut pas. »

Il reste à savoir pourquoi Volkswagen ne l'a pas voulu. Il faut sans doute chercher du côté des performances du moteur qu'a souhaité vanter le constructeur pour sa mise en marché.

Peut-ont douter des autres constructeurs?

Dans ce contexte, la question est inévitable. Si Volkswagen est parvenu à déjouer les contrôles antipollution, qui plus est sur des véhicules équipés d'un système d'injection d'urée capable de diminuer les émissions d'oxyde d'azote, un autre constructeur peut-il faire la même chose ? « Avec les programmations, les constructeurs peuvent déjouer toutes les normes antipollution », répond Paul Baribeau.

« Nous n'avons pas d'informations ou de données suggérant qu'un autre constructeur utilise lui aussi un dispositif de falsification. Mais c'est une bonne question à poser. Les autorités gouvernementales dans le monde devraient enquêter pour voir si d'autres constructeurs utilisent un dispositif de falsification », estime John German.

La revue New Scientist a tout récemment souligné qu'il existait mille et une façons, autres que celle de Volks, de réduire artificiellement les émissions lors d'un test hors route. « La clé est d'accélérer aussi doucement et délicatement que possible afin de solliciter au minimum le moteur », y explique Alastair Lewis, professeur de chimie de l'Université de York.

Le scandale Volkswagen aura confirmé ce que certains soupçonnaient. « Il y avait des rumeurs voulant que des véhicules savaient, si l'on peut dire, qu'ils étaient testés. Mais là, c'est la première fois que c'est confirmé », constate dans le New Scientist Martin Adams, directeur du groupe Pollution de l'air à l'Agence européenne de l'environnement.

Véhicules concernés dans le monde

• Volkswagen: 5 millions

• Audi: 2,1 millions

• Volks véhicules commerciaux: 1,8 million

• Skoda: 1,2 million

• Seat: 700 000