La direction de Volkswagen a livré quelques éclaircissements jeudi sur la genèse du scandale des moteurs truqués, aussi lointaine que 2005, et s'est employée à rassurer sur l'avenir du groupe, sans dissiper toutes les zones d'ombre.

Le trucage de 11 millions de moteurs diesel au moyen d'un logiciel fraudeur ne résulte «pas d'une erreur isolée, mais d'un enchaînement d'erreurs qui n'a à aucun moment été brisé», a reconnu à Wolfsburg (nord) Hans Dieter Pötsch, président du conseil de surveillance.

Volkswagen avait convié la presse pour une séance de questions-réponses pour la première fois depuis l'éclatement de l'affaire en septembre, et s'est ensuite prêté au même jeu avec les analystes.

Sur le podium les responsables du groupe, M. Pötsch et le nouveau président du directoire Matthias Müller, ont cherché l'équilibre entre contrition et foi en l'avenir. Près de trois mois après les débuts du scandale, sur lequel beaucoup d'encre a coulé, l'atmosphère dans l'audience n'était plus à l'inquisition.

Dans le cadre de son offensive de charme, M. Müller fera aussi une apparition lors du journal télévisé de deuxième partie de soirée sur la chaîne publique ARD jeudi soir.

«Pas dramatique»

Le mastodonte automobile aux douze marques est dans une situation «pas dramatique, mais tendue», a dit à Wolfsburg M. Müller, réitérant ses promesses de faire toute la lumière sur l'affaire d'une part, et de rénover le groupe de l'autre.

«La situation a beau être sérieuse, elle ne mettra pas l'entreprise à terre», a-t-il assuré de son accent bavarois marqué.

La «date de naissance» du «dieselgate», qui a éclaté en septembre d'abord aux États-Unis, remonte à 2005, quand Volkswagen a lancé une vaste offensive dans le diesel pour le marché américain, a expliqué M. Pötsch.

C'est le premier résultat des enquêtes en cours, qui mobilisent 450 experts et dont les résultats détaillés seront livrés en avril 2016 devant les actionnaires.

Mais à l'heure actuelle, «nous n'avons aucun indice d'une implication de membres du directoire ou du conseil de surveillance» dans l'installation d'un logiciel truqueur visant à contourner les tests antipollution, a précisé M. Pötsch. «Tout s'est joué à un niveau de management intermédiaire», selon M. Müller.

Volkswagen a pour l'instant suspendu une poignée de salariés, et son patron de 2007 à 2015, Martin Winterkorn, a rendu son tablier juste après l'éclatement du scandale, tout en affirmant n'avoir rien su. «Deux chefs partis, sept ingénieurs mis à pied, et c'est tout?», s'interrogeait jeudi l'hebdomadaire Die Zeit, trouvant que le groupe s'en sortait à bon compte.

Questions sans réponses

La pression s'est en revanche inopinément relâchée pour Volkswagen sur un autre front, le groupe ayant indiqué mercredi que les soupçons de mensonges sur les émissions de CO2 de 800 000 autres voitures ne s'étaient pas vérifiés.

Beaucoup de questions restent sans réponse, par exemple la facture finale d'un gigantesque rappel, des amendes et pénalités, dont M. Müller a reconnu qu'elle n'était pas encore prévisible, pas plus du coup que ses effets sur les comptes de la société. Volkswagen, groupe aux 200 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et 600 000 salariés, a réalisé entre juillet et septembre sa première perte nette en 15 ans, conséquence directe du scandale.

Incertain aussi, l'impact du scandale sur les ventes, qui ont clairement déjà pris un coup ces derniers mois, et la capacité du groupe à refonder sa culture d'entreprise, malgré les assurances données par M. Müller jeudi. Pour commencer, Volkswagen prévoit de vendre l'avion Airbus qu'il possédait en propre, a dit le patron.

Volkswagen n'a pas encore non plus dévoilé la solution technique qui permettra de remettre aux normes les plus de 400 000 voitures concernées aux États-Unis. Le groupe attend le feu vert des autorités américaines, a précisé M. Müller.

En Europe une simple mise à jour de logiciel suffira pour certains modèles, flanquée de l'ajout d'une pièce de plastique pour d'autres. La simplicité de la manipulation a laissé sceptiques nombre d'experts.