Après des années de purgatoire, la monoplace nord-américaine semble enfin voir la lumière au bout du tunnel. Résultat de la lutte fratricide qui a vu la série CART se diviser en deux entités ennemies en 1996, les années qui ont suivi ont semblé un interminable calvaire, malgré la réunification sous l'appellation IndyCar il y a déjà sept ans. Mais la saison 2014 pourrait bien être celle de la rédemption.

D'abord parce que les dirigeants de la série ont enfin réussi à attirer un commanditaire titre digne de ce nom. Le géant des télécommunications Verizon a signé une entente de plusieurs années avec l'Indycar, augmentant du coup la crédibilité de la série. Ça semble aussi donner raison aux quelques pilotes de renom qui sont revenus vers l'IndyCar, nommément Juan Pablo Montoya, embauché par Penske, et Jacques Villeneuve, qui pilotera pour Schmidt Peterson Motorsports aux 500 Milles d'Indianapolis. De bonnes nouvelles qui devraient aussi faire l'affaire du réseau de télé ABC, traditionnel télédiffuseur des 500 Milles d'Indianapolis, qui cette année diffuse au total six courses sur son antenne principale, en plus des qualifications de l'Indy 500. Les 13 autres courses au calendrier sont retransmises aux États-Unis par NBCSN. Au Canada, TVA Sports, CITY et Sportsnet se chargent de la diffusion, quelques fois en différé.

Changements

Le principal changement cette année est l'ajout d'une deuxième course à Indianapolis, celle-là disputée sur circuit routier. Le Grand Prix d'Indianapolis, disputé le samedi 10 mai, se veut en fait le coup d'envoi des activités menant à la 98e présentation de l'Indy 500, le 25 mai. Le circuit de 3,917 km est semblable à celui utilisé par les Formule 1 de 2000 à 2007, mais on lui a amputé quelques virages lents, si bien qu'il y a dorénavant deux bonnes lignes droites de respectivement 763 et 874 m, ce qui devrait se traduire par d'excellentes zones de dépassement. Comme les F1 du temps, les bolides s'élanceront en départ arrêté, dans le sens des aiguilles d'une montre, à l'inverse de la course sur ovale. À ce sujet, les activités sur l'anneau de vitesse débuteront dès le lendemain, avec les premiers essais en vue de la course de 500 milles.

Par ailleurs, l'Indianapolis 500 sera la première des trois courses IndyCar disputées sur superovale, les autres étant Pocono en juillet et Fontana en clôture de saison, à la fin août. Nouveauté cette année, on a décidé de verser un bonus de 1 million au pilote qui réussirait à remporter les trois courses de la « Triple Couronne ». En prix de consolation, on promet 250 000 $ à celui qui gagnerait deux des trois courses. Aussi, les trois épreuves, toutes disputées sur 500 milles, vaudront le double de points au classement.

Côté technique, les motoristes Honda et Chevrolet sont dorénavant obligés d'équiper leur V6 de 2,2 L d'un double turbo. Chevrolet y avait déjà recours alors que Honda n'en utilisait qu'un seul, mais le constructeur japonais ne se disait pas inquiet outre mesure avant le début de la saison. Fait à noter, l'écurie Chip Ganassi, fidèle à Honda depuis 2006, a décidé de faire le saut chez Chevrolet, qui équipe aussi ses bolides en série NASCAR. Conséquemment, Andretti Autosport s'est tourné vers Honda pour ne pas être relégué au rôle de troisième violon chez Chevrolet - Penske est l'autre écurie de pointe dont les monoplaces sont propulsées par le constructeur américain.

Enfin, une série de modifications ont été apportées au châssis Dallara DW12 dans le but d'améliorer la sécurité des pilotes, notamment avec l'ajout de panneaux en fibre de carbone et de pièces en mousse plastique à l'extérieur et à l'intérieur du cockpit.

Découvrez les principaux acteurs de la saison 2014

Juan Pablo Montoya

C'est le grand retour en monoplace américaine pour celui dont la carrière a pris son essor chez nous, justement, avec son titre de champion de la série CART en 1999 et sa victoire aux 500 Milles d'Indianapolis l'année suivante. Après un hiatus de 13 ans qui lui a permis d'ajouter à son palmarès unique des victoires en F1, en Coupe Sprint et aux 24 Heures de Daytona, le Colombien prend très au sérieux son passage chez Penske. L'ancien protégé de Chip Ganassi a perdu plusieurs kilos et semble en grande forme. Il va se battre aux avant-postes.

«C'était bizarre au départ de remonter dans une monoplace. Le défi sera surtout de m'acclimater à la voiture et à l'équipe; la vitesse est là, mais ce sont les petits détails qui m'inquiètent davantage.»

Scott Dixon

À la mi-saison l'an dernier, le Néo-Zélandais pointait seulement au 7e rang du classement. Mais des victoires consécutives à Pocono et à Toronto (un doublé) l'ont replacé au plus fort de la lutte, en route vers son troisième titre en carrière en IndyCar. Il sera encore l'homme à battre.

«Passer à un moteur Chevrolet est une grosse affaire, bien sûr. On est confiants, mais pas suffisants, et on va aller se battre du mieux que l'on peut pour défendre notre titre, en espérant pouvoir conserver le momentum affiché à la fin de la dernière saison.»

Helio Castroneves

Animateur indéfectible de la série IndyCar depuis près de 15 ans, Helio Castroneves n'a pourtant jamais remporté le titre. L'an dernier, il a mené le championnat pendant presque toute la saison avant de se faire doubler par Scott Dixon à la toute fin. À 38 ans, il a soif de vengeance et son objectif est clair, net et précis.

«Si je suis affamé? Non, je crie famine! J'ai été à la fois si loin et si près du titre, mais c'est aussi ce qui me donne une raison de revenir encore plus fort. Pour moi, en 2014, c'est tout ou rien. Peu importe ce que ça prend, je vais m'organiser pour arriver à mes fins.»

Simon Pagenaud

Étonnant troisième au classement l'an dernier, le Français a réussi à se glisser entre les grosses gommes de chez Ganassi, Penske et Andretti, en affichant une régularité sans faille, avec 13 tops 10 dont deux victoires à Detroit et Baltimore. Rien n'a changé pour lui cette année chez Schmidt, mis à part son nouveau coéquipier russe Mikhail Aleshin, ça s'annonce donc plutôt bien.

«Notre équipe est modeste, ce n'est pas une grosse corporation, la communication se fait donc particulièrement bien, et c'est certainement une de nos forces. Pour ma part, je suis en pleine forme, je veux être en mesure de pouvoir gagner toutes les semaines, en particulier sur les ovales. Ce sera difficile, mais on veut batailler pour le championnat.»

James Hinchcliffe

L'affable Canadien a connu une saison en dents de scie en 2013. C'était tout ou rien, en fait. Il a remporté trois courses, soit une seule de moins que le champion Scott Dixon, le meneur à ce chapitre. Pour le reste, ç'a été une suite de malchances et de déconvenues. Le mot clé cette année est régularité.

«Malgré tous les changements, je me sens à la maison. Évidemment qu'il y aura plusieurs choses à assimiler, en commençant par notre nouveau moteur Honda. Mais je sais que je peux gagner et je sais ce que je dois améliorer, ce qui sont de bonnes nouvelles en soi.»

Tony Kanaan

Quatre abandons au cours des sept dernières courses ont sabordé la saison 2013 de Tony Kanaan, qui affichait pourtant une belle cinquième place au classement à Toronto en juillet. Le Brésilien avait même trouvé le moyen de remporter les 500 Milles d'Indianapolis au volant de sa modeste monoplace KV Racing. Il pourra davantage se faire justice au sein de la machine Ganassi, en digne remplaçant du jeune retraité Dario Franchitti.

«Je suis au sein d'une équipe qui a tout raflé, et ma voiture numéro 10 a un long historique avec des gars comme Dan [Wheldon, le regretté] et Dario. Je suis anxieux de pouvoir poursuivre la tradition, et je vais travailler fort pour y arriver.»