Patiemment, on avance à pas de tortue, pare-chocs à pare-chocs. On voit enfin la source du bouchon: une forêt de cônes orange... Une vision qui déclenche normalement des sentiments nuisibles à la santé mentale de l'automobiliste normalement constitué. Mais pas en autoslalom. Car ici, la vue des cônes entraîne une invariable et enivrante poussée d'adrénaline. En sécurité, et à petit prix.

Au lieu de former une ceinture autour de zones de construction, les cônes en autoslalom sont utilisés pour tracer les lignes d'une piste de course éphémère qui peut être aménagée sur n'importe quelle surface asphaltée tels un vaste terrain de stationnement, un aéroport ou une piste de course. L'objectif est de négocier le tracé le plus rapidement possible, à tour de rôle. Chaque pilote a généralement six chances de négocier le court circuit, parcouru d'un point A à un point B en quelque 60 secondes.

Le tracé, ponctué de slaloms, de chicanes et d'épingles, est très serré. Les vitesses sont contenues, les risques d'accident sont conséquemment réduits. En fait, c'est très certainement la forme de sport automobile la plus abordable, mis à part peut-être le karting de location. Dans la grande région de Montréal, le Club automobile des Laurentides (CADL) organise des journées d'autoslalom qui coûtent moins de 100$ tous frais d'inscriptions compris - c'est moitié prix pour les filles. Et on peut y rouler sans crainte avec sa voiture de tous les jours: «En 60 secondes, il n'y a pas vraiment de risque d'endommager la mécanique, a soutenu Philippe Moussette avant de monter dans sa Subaru BRZ. J'ai accroché quelques cônes, et ça ne paraît même pas.»

Lieu d'apprentissage



L'aménagement des tracés d'autoslalom s'avère bénéfique à la conduite de tous les jours, encore davantage que les séances d'essais libres en piste (lapping), qui se déroulent sur de véritables circuits de course. «C'est beaucoup plus technique, a expliqué Karine Girard, 21 ans, une habituée de lapping qui en était à sa première expérience en autoslalom. Les virages serrés et l'évitement d'obstacles sont beaucoup plus proches des conditions que l'on retrouve sur la route dans le trafic.»

«C'est clair que ça peut minimiser les risques d'accident, a ajouté de son côté Tony Collins, un vétéran de la discipline. Dans la rue, on ne peut pas expérimenter à quel point une auto peut freiner fort. Ça aide dans les situations de stress, ça permet de comprendre le comportement du véhicule quand tu le brusques. J'ai d'ailleurs amené ma copine faire de l'autoslalom, et ça l'a rassuré dans sa conduite de tous les jours, il n'y a aucun doute.»

Et ça peut aussi agir comme catharsis chez les automobilistes pressés: «J'ai tendance à moins m'énerver sur la route, car je sais qu'il est impossible d'aller y chercher les mêmes sensations qu'en autoslalom», nous a avoué Philippe Moussette.

Une vraie compétition



On comprendra que l'autoslalom n'a rien d'une promenade du dimanche. On pousse les voitures à fond, et ça se sent encore davantage quand on prend place dans le siège du passager en compagnie d'un vétéran.

«Au départ, je ne voulais rien savoir de l'autoslalom, nous a avoué le tout nouveau président du CADL, François Leduc. Pour moi, c'était pour les gamins. Mais ma copine tenait à l'essayer. C'était lors de la journée de dérouillage, l'an dernier, et elle m'a finalement convaincu d'essayer. Dès le premier tour, j'étais accro.

«Ce qui est génial de l'autoslalom, c'est que l'on peut se comparer aux autres, ce qui est à peu près impossible en lapping, car les temps n'y sont pas chronométrés, a indiqué le jeune passionné qui a fait sept ans de lapping avant de se convertir à l'autoslalom. Évidemment, certains ne ressentent pas le besoin d'aller plus vite que les autres, mais généralement, chacun veut être le plus rapide de sa classe!»

Et comment! Quand les chronos sont arrivés, collés à la portière de la camionnette du président, je n'ai pu m'empêcher de vérifier ma propre performance... Malheureusement un peu trop rapide pour simplement dire que j'étais là pour les besoins du reportage. Assez pour me forcer à pousser la note encore un peu plus en après-midi. Mais j'ai malheureusement dû faire l'impasse sur mes deux derniers passages... À mon grand désarroi, je m'en confesse!

PHOTO SÉBASTIEN PEDRAGLIO, LA PRESSE

PHOTO SÉBASTIEN PEDRAGLIO, LA PRESSE

Des classes pour tous les goûts

N'importe quelle voiture peut rouler en autoslalom. De la sous-compacte d'entrée de gamme à la monoplace de type formule. Pour comparer tout ce beau monde, on utilise les catégories et les facteurs d'équivalence développés par le Sports Car Club of America. Le degré de modification des autos détermine leur catégorie, laquelle est ensuite divisée selon les niveaux de performance de la mécanique. 

> Street: Voitures de série, sans modifications

> Street Touring: Pièces de performance communes autorisées

> Street Prepared : Toutes modifications permises au niveau de la suspension, si elles sont installées sur les emplacements originaux

> Street Modified: Transplantation de moteur autorisée, tout comme l'ajout de turbos ou des compresseurs

> Prepared : Toutes modifications permises

> Modified: Voitures destinées à la course