En utilisant dans les rues de Munich un camion de logistique 100% électrique du constructeur néerlandais Terberg, BMW pourrait lancer une tendance susceptible de gruger une mini-part de marché aux camions lourds diesels utilisés en ville. Et surtout, BMW montre que le camion électrique lourd, même à ses balbutiements, a déjà des capacités considérables en milieu urbain.

Le camion électrique - BMW n'identifie pas le modèle mais c'est un tracteur de triage Terberg YT-220-EV fabriqué aux Pays-Bas - est utilisé depuis le 7 juillet dans un rôle de transport très spécifique et très limité: il fait huit livraisons par jour entre un entrepôt du logisticien Scherm et l'usine géante de BMW à Munich. C'est 4 km aller-retour chaque fois, donc 32 km par jour.

Il s'agit donc de distances courtes, dans un contexte de livraison en juste-à-temps à l'usine. Le YT-220-EV a une autonomie d'une centaine de kilomètres, ce qui est peu, mais ce qui suffit amplement à l'itinéraire prévu de 32 km, avec une marge généreuse si les livraisons devaient être plus fréquentes à l'avenir. Si l'autonomie est limitée, la puissance, elle, est au rendez-vous et le YT-220-EV peut supporter une charge verticale de 36 tonnes sur la sellette (la «5e roue», comme on dit dans le jargon) et haler une charge de 40 tonnes.

Hormis son moteur électrique de 138 kW (185 chevaux), le Terberg YT-220-EV ressemble en tous points aux tracteurs de triage diesel qu'on voit halant des conteneurs sur les quais et aux alentours du port de Montréal, de même que près des zones de transbordement multimodal du Canadien National.

Pour Terberg, c'est une vitrine exceptionnelle pour son premier tracteur électrique. Le YT-202-EV ressemble beaucoup à un YT-182, un des modèles diesel de tracteur de triage offerts par Terberg.

Il permet notamment à Terberg de se différencier de son grand rival finlando-suédois Kalmar, très bien implanté en Amérique du Nord et particulièrement au Canada (son modèle vedette s'appelle le Kalmar Ottawa et BMW, justement, en possède une flotte considérable à son centre de logistique de Wackersdorf, en Bavière).

«Nous avons livré le premier YT-202-EV en 2014, après trois ans de recherche et développement, a indiqué à La Presse Maarten van Brink, responsable des ventes chez Terberg. Nous en avons vendu 13 au total, à des opérateurs portuaires et à des compagnies de logistique. Jusqu'à présent, nos clients sont en Allemagne, en Suisse, au Danemark et aux Pays-Bas.»

Au Port de Montréal, la porte-parole Sophie Roux a indiqué qu'aucun des exploitants logistiques du port n'a encore de tracteur électrique, mais que «le Port de Montréal est en mode d'exploration à ce sujet».

Le YT-202-EV est un produit créneau dont le potentiel va s'accroître au fur et à mesure que les normes de pollution vont s'étendre à l'empreinte totale de CO2 des entreprises manufacturières et de transport. M. Van Brink n'a pas voulu dire si le YT-202-EV est subventionné (comme les sont les voitures électriques et hybrides un peu partout dans le monde) sur ses marchés actuels.

Plus cher à l'achat, usage moins dispendieux

M. Van Brink, de Terberg, n'a pas voulu dire, non plus, le prix d'un YT-202-EV, mais il est certain que c'est plus cher qu'un modèle diésel équivalent. Par contre, la documentation promotionnelle du YT-202-EV souligne que les frais d'entretien sont presque nuls et que l'électricité est beaucoup moins dispendieuse que le diésel. M. Van Brinck n'a pas voulu dire combien d'années (ou de kilomètres) d'usage sont nécessaire, au prix actuel du diésel, pour que l'achat d'un tracteur électrique devienne rentable.

À noter que BMW, contrairement à d'autres constructeurs automobiles, ne produit pas de camions, et n'a aucun désavantage à mettre en valeur la technologie électrique d'un fabricant spécialisé dans un domaine très pointu comme Terberg.

« Avec ce camion électrique, nous envoyons un signal fort pour la mobilité urbaine durable. Nous réduisons les émissions polluantes à Munich et nous sommes le premier constructeur automobile à utiliser un si gros camion électrique pour transporter des pièces sur les routes du domaine public », a dit Hermann Bohrer, le directeur de l'usine BMW de Munich.

Le responsable de toute la logistique chez BMW, Jürgen Maidl, a souligné le potentiel du camion électrique : « Avec ce projet, nous allons obtenir beaucoup d'information utile sur les capacités des transports électriques, en logistique urbaine. »

Les batteries de 914 volts au lithium de phosphate de fer du YT-202-EV se rechargent en 3 à 4 heures, selon que la batterie a une capacité de 112 kWh (de base) or 169 kWh (en option). Elles durent le plus longtemps si on recharge avant que la charge baisse en deça de 50 %. Avec son itinéraire quotidien de 32 km, l'YT-202-EV de BMW est utilisé dans une situation optimale.