Les moteurs à injection directe ne sont pas parfaits. On a déjà fait état dans ces pages qu'ils produisent davantage de particules polluantes que les traditionnels moteurs à injection multipoints, émissions qui participent notamment à la formation du smog et à certaines maladies pulmonaires. On sait maintenant que certains de ces polluants contribuent aussi au réchauffement planétaire.

Or l'injection directe est en voie de devenir la référence technologique dans l'industrie automobile. D'ici à 2020, plus de la moitié des véhicules fera appel à ce type de mécanique. Pour le meilleur, mais aussi pour le pire. Survol des côtés sombres d'une mécanique loin d'être parfaite.

LE COUPABLE

Certes, les moteurs à injection directe sont plus efficaces que leurs vis-à-vis à injection multipoints, du fait que leurs injecteurs pulvérisent un très faible volume d'essence directement dans le piston, à très haute pression. Par contre, la combustion n'est pas toujours parfaite, c'est ainsi qu'il se crée des dépôts de carbone noir, une composante de la suie qui est le deuxième contributeur au réchauffement planétaire, derrière le gaz carbonique - il absorbe la chaleur du soleil et réduit l'effet albédo de la neige et de la glace.

Le moteur à injection directe de la Hyundai Genesis Coupe 2013. Photo: Hyundai

AVANTAGES ANÉANTIS

Une équipe de chercheurs de l'Université de Toronto a récemment mis à l'essai une Ford Focus 2013, déterminant qu'elle produisait davantage de carbone noir que près des trois quarts du parc automobile torontois. Ainsi, pour annuler ces émissions de carbone contribuant au réchauffement planétaire, on estime qu'une voiture à moteur à injection directe devrait afficher une consommation jusqu'à 26 % moindre que celle faisant appel à la technologie de l'injection multipoints.

Des chercheurs de l'Université de Toronto ont mis à jour les fortes émissions de carbone noir de l'injection directe. Photo: Archives La Presse

LA PUISSANCE AVANT TOUT

Les constructeurs ont généralement utilisé l'injection directe pour gaver leurs moteurs en puissance. Résultat, en 2015, le parc de voitures à moteur à injection multipoints consommait en moyenne 10 % moins d'essence que l'ensemble des véhicules faisant appel à l'injection directe. Et c'est évidemment sans compter les émissions de particules fines et de carbone noir. « Si j'achetais une voiture neuve, j'opterais pour une voiture à injection traditionnelle, a suggéré la chercheuse Naomi Zimmerman, qui a dirigé l'étude. Elles sont peut-être moins puissantes, mais elles sont beaucoup moins polluantes. »

Un V8 BMW à injection directe. Photo: BMW

PIRE AU CANADA

Les problèmes liés aux moteurs à injection directe sont encore plus notables au Canada. D'abord parce que les essences vendues au pays contiennent davantage de composés aromatiques - jusqu'à 43 %, comparativement à la limite de 25 % en vigueur en Californie - , ce qui augmente considérablement les émissions de particules fines. Ensuite parce que ces émissions sont plus élevées par temps froid. Des chercheurs d'Environnement Canada ont déjà analysé les impacts météorologiques sur les émissions polluantes des moteurs à injection directe. Heureusement, car les autorités canadiennes ne pourront pas se contenter de calquer les normes américaines.

Les émissions sont plus élevées par temps froid. Photo: Armand Trottier, Archives La Presse.

PIRE QUE LE DIESEL

Les moteurs à essence ne sont actuellement pas soumis à des limites d'émissions de suie et de particules fines, contrairement aux moteurs diesels. À partir de l'an prochain, tous les types de moteurs seront toutefois soumis en Amérique du Nord à des limites de 1,875 mg/km, mais l'application sera mise en place graduellement jusqu'en 2022. Avec l'introduction de filtres à particules sur les mécaniques diesels, jumelée à la popularité croissante des moteurs à injection directe, ces derniers sont en voie de devenir les principaux émetteurs de carbone noir et de particules fines.

Les moteurs à essence à injection directe sont en voie de devenir la principale source de carbone noir et de particules fines. Photo: AFP

SOLUTIONS

L'utilisation de filtres à particules est sans doute la meilleure solution, même si elle peut entraîner une certaine augmentation de la consommation d'essence. Volkswagen a d'ailleurs annoncé le mois dernier qu'elle allait graduellement installer des filtres pouvant réduire 90 % des émissions de suie et de particules sur ses moteurs à injection directe. Mais on peut aussi agir sur l'alimentation d'essence : des injecteurs installés au-dessus du piston permettent un mélange plus homogène que les injecteurs latéraux utilisés jusqu'à maintenant dans la plupart des moteurs à injection directe.

Un moteur Ford EcoBoost à injection directe. Photo: Ford