La proposition de Québec solidaire de bannir progressivement les véhicules à moteur exclusivement thermique à partir de 2030 a beaucoup fait réagir. Personne n'est contre la vertu, mais la mesure, proposée aussi ailleurs dans le monde, ne fait pas l'unanimité, notamment parce que les moteurs thermiques continuent d'évoluer et qu'il existe aussi d'autres moyens de réduire la pollution.

Québec solidaire s'inspire de la France et du Royaume-Uni et propose d'exiger que les véhicules neufs vendus dans la province soient exclusivement hybrides ou électriques à partir de 2030, puis électriques seulement à partir de 2040, en vue de débarrasser les routes de la province de moteurs thermiques en 2050.

Neuf pays, la plupart en Europe, mais aussi la Chine et, en plus, quelques États américains, ont formulé une volonté similaire ces derniers mois.

Bannir les véhicules à essence soulève quelques questions : est-ce que ça provoquera des pertes d'emplois importantes ? Comment réagir à la chute de leur valeur de revente ? Que faire de ces véhicules une fois en fin de vie ?

Photo Paul Chiasson, La Presse canadienne

Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire, veut une loi exigeant que les véhicules neufs vendus au Québec à partir de 2030 soient exclusivement hybrides ou électriques.

Léguer aux suivants

Par ailleurs, comme l'a constaté le Conseil international du transport propre (ICCT) plus tôt ce mois-ci, aucun gouvernement dans le monde n'a encore vraiment voté de loi prohibant concrètement le moteur thermique. Les législateurs réalisent que ces mesures n'entreraient en vigueur qu'après leur départ du pouvoir, et que leurs successeurs auraient libre jeu de les défaire, un peu comme l'Ontario et les États-Unis l'ont fait ces dernières semaines pour des programmes contraignants similaires.

L'industrie automobile rechigne chaque fois qu'il est question d'améliorer l'efficacité énergétique de ses produits, et pourtant, elle finit généralement par s'y conformer. Il n'y a rien comme menacer le modèle d'affaires d'une multinationale pour la pousser à innover, semble-t-il. Le resserrement de la norme américaine CAFE sur la consommation moyenne du parc automobile, ces dernières années, semble confirmer cette prémisse : il a fait reculer d'un peu plus de 20 % la consommation moyenne en six ans (2012 à 2018).

Réduire le NOà 10 % de la limite actuelle

Plus tôt cet été, l'équipementier allemand Bosch a renforcé cette impression en dévoilant une « percée majeure » qui réduirait les émissions polluantes des moteurs diesels bien en deçà de la norme la plus sévère en vigueur. En contrôlant mieux la température des gaz d'échappement sans recourir à de nouveaux composants coûteux, Bosch réduirait à un dixième de la limite légale les émissions d'oxyde d'azote (NOx) du diesel. 

« Avec cette technologie, l'interdiction du diesel dans les grands centres urbains ne sera plus nécessaire, puisque nous avons enfin la solution au problème de la pollution urbaine. »

- Volkmar Denner, PDG de Bosch, lors d'une conférence de presse

Pour réduire la pollution automobile, l'ICCT recommande de brandir la carotte, plutôt que le bâton, et de promouvoir de meilleures pratiques et technologies.

L'air de Pékin s'améliore

L'organisme américain cite en exemple les premiers « super-quartiers » que Barcelone est en train de mettre en place et qui visent à réduire de 60 % la circulation dans certaines rues. L'objectif : à terme, effacer 20 % de la pollution automobile sur son territoire.

Plafonner le nombre d'immatriculations, aider les entreprises à électrifier leur parc automobile et offrir davantage de solutions de transport multimodal (autos et vélos en libre-service, etc.) sont d'autres méthodes suggérées.

Pékin, qui a adopté ces pratiques ces dernières années, en tire déjà des bénéfices. L'air n'y a pas été aussi propre en 10 ans, selon les données gouvernementales officielles. « L'industrie automobile a toujours craint les politiques dépareillées ciblant sa technologie. Ça devrait inciter les États et les villes à opter pour des politiques plus progressistes, axées sur la qualité de l'air », conclut Nic Lutsey, directeur de l'ICCT.