L'entreprise californienne de location de véhicules entre particuliers Turo a amorcé un départ ce mois-ci au Québec, où l'on apprend à se familiariser avec cet « Airbnb de l'auto ». Récit de notre expérience.

C'est d'abord le Volkswagen Tiguan 2011 gris d'Étienne P. qui a capté notre attention. Offert en location à 50 $ par jour, le VUS semblait parfait pour notre sortie en famille de la fin de semaine.

Une demande de location a été envoyée. Étienne P., qui habite près du Stade olympique, nous a vite répondu. « Désolé, Nicolas. Je dois malheureusement l'utiliser en fds. Une autre fois j'espère ;) »

Ainsi va la vie sur Turo, le site de location de véhicules entre particuliers qui a fait son entrée sur le marché au Québec ce mois-ci.

Comme Airbnb

Si vous avez déjà utilisé Airbnb ou un autre site de location de logement, vous savez déjà comment utiliser Turo. Vous tapez le nom de la ville qui vous intéresse et ajoutez les dates auxquelles vous avez besoin d'un véhicule. Le système vous propose une série de voitures et VUS, avec le prix par jour de la location.

Une recherche récente à Montréal a produit une vingtaine de résultats, allant d'une modeste Chevrolet Aveo, offerte à 26 $ par jour, à une puissante Tesla Model S noire, que l'on peut louer pour 249 $ par jour (et dont la location est interdite aux moins de 30 ans !). Des rabais de 20 % s'appliquent lorsqu'on loue la voiture pour une semaine, et 30 % pour le mois.

Une fois la location acceptée par le propriétaire de la voiture, la remise des clés se fait généralement à son domicile. Certains propriétaires offrent aussi d'amener leur voiture chez vous, parfois gratuitement, parfois pour 20 ou 30 $.

Aussi, sachez que les prix des véhicules changent. Certains propriétaires fixent eux-mêmes leur prix, alors que d'autres permettent sa fluctuation automatique en fonction de l'offre et de la demande.

Turo signale que tout ce qu'elle fait est légal : l'entreprise dit percevoir les taxes de vente, et les propriétaires qui louent leur voiture recevront même des documents leur permettant de déclarer aux gouvernements ce revenu d'appoint. Et l'affaire serait lucrative : les Américains propriétaires de voiture présents sur Turo toucheraient en moyenne 600 $ par mois, affirme la société.

Le service Turo fonctionne un peu à la manière d'Airbnb. Photo : capture d'écran, La Presse

Seulement 2 assureurs au Québec

La question centrale est bien sûr celle des assurances : si un inconnu va conduire votre voiture, vous avez intérêt à être bien protégé. Au Québec, les gens qui souhaitent louer leur véhicule sur Turo doivent pour le moment être assurés chez Intact ou Belairdirect.

La personne qui loue le véhicule, elle, a trois options : aucune assurance, une assurance de base qui coûte 15 % du prix de la location, avec une franchise de 3000 $, ou une assurance « premium » qui coûte 40 % du prix de la location, avec une franchise de 500 $. Les assurances qui viennent avec les cartes de crédit n'assurent pas le service.

Lors de notre essai, nous avons trouvé le site web et l'application mobile iOS/Android de Turo faciles à utiliser. Il faut une carte de crédit, un permis de conduire et une photo de son visage pour s'inscrire, un processus qui ne nécessite que quelques minutes.

Trouver une voiture, toutefois, peut être plus laborieux.

Après notre tentative infructueuse de location du Tiguan d'Étienne P., nous avons jeté notre dévolu sur un Subaru XV Crosstrek 2013 à 49 $ par jour que proposait un dénommé Marc N., qui habite au centre-ville de Montréal.

Pas de chance : Marc N. a lui aussi refusé notre demande, en nous envoyant ce message : « La voiture ne sera malheureusement pas disponible ce week-end puisque nous aussi descendons dans un chalet en Estrie. La voiture devrait toutefois être très peu utilisée de mon côté cet été donc je t'invite à me recontacter. Désolé du délai de réponse, mais je me familiarise encore avec l'application. »

Les prix des véhicules disponibles sur Turo fluctuent constamment. Photo: capture d'écran, La Presse

«45 $, c'est trop peu»

C'est la troisième tentative de location qui nous a le plus éclairé. Anya B., de Rosemont, proposait sa Mazda3 2010 grise à 30 $ par jour. Anya a refusé notre approche en nous envoyant ce message énigmatique : « 45 $ pour deux jours c'est trop peu. »

Quelques minutes plus tard, elle a ajouté « Oups ! Je voulais écrire cette raison du refus de location à Turo ! J'essaie cette application pour voir si ça vaut la peine de louer ou pas ! Désolée et bonne chance. »

Bref, nous en déduisons que les propriétaires reçoivent un message les informant de la somme qu'ils vont tirer de la location, qu'ils sont libres d'accepter ou non. Il semblerait que certains ne sont pas aux anges avec les retombées potentielles d'une location pour seulement deux journées. La durée par défaut de la location inscrite dans l'application Turo est d'une semaine, ce qui laisse sous-entendre que le service vise moins le marché de l'autopartage (Communauto, Car2go) que celui de la location de voiture traditionnelle (Avis, Enterprise, etc.).

Après nos tentatives, un préposé francophone de Turo nous a joint par téléphone. Courtois, il a proposé de nous aider à trouver un véhicule. « Bien des utilisateurs ne connaissent pas bien encore l'application et n'inscrivent pas sur le site les dates où leur voiture n'est pas disponible, nous a-t-il dit. Ça crée de la confusion, mais nous avons bon espoir de voir les choses aller de mieux en mieux au fur et à mesure que les gens se familiarisent avec Turo. »

Entre-temps, nos plans de week-end sont tombés à l'eau, victimes d'un virus de l'influenza de type b. Nous avons donc refusé l'offre du préposé de Turo (ce n'était pas désagréable, pour une fois, d'être celui qui signifiait le refus).

Nous comptons bien réessayer Turo dans quelques semaines, le temps que le rodage nécessaire ait été fait.

Photo : capture d'écran, La Presse

Anya n'a pas voulu louer sa Mazda3 pour deux jours.