Les « aides à la conduite » visent à optimiser le comportement du véhicule et à suppléer, dans une certaine mesure, à l'inexpérience, à la maladresse ou au manque d'attention des automobilistes. Mais ils n'abolissent pas les lois de la physique.

Petite leçon de physique

Le danger est que bon nombre d'automobilistes comptent à ce point sur les nouvelles technologies qu'ils en oublient les lois de la physique. Pourtant, les experts de la conduite vous diront que les aides à la conduite ne justifient en aucun cas un relâchement de la vigilance au volant. Le mode d'entraînement ou la quantité d'aides à la conduite ne feront au mieux qu'élargir votre « filet de sécurité ».

À tort, bon nombre d'automobilistes estiment qu'avec une transmission intégrale, il est possible de négocier une courbe enneigée plus rapidement qu'au volant d'une traction (roues avant motrices) ou d'une propulsion (roues arrière motrices). C'est ici que s'installe une dangereuse illusion, celle d'un sentiment d'invulnérabilité qui cause inévitablement des accidents. Il est généralement admis qu'à vitesse équivalente, un véhicule à rouage intégral procure une marge de sécurité de plus ou moins 20 % supérieure à celle d'un modèle à deux roues motrices. Si vous conduisez 20 % plus vite, les bénéfices s'annulent.

En outre, et on ne le répétera jamais assez, tous ces dispositifs, aussi perfectionnés soient-ils, ne sont pleinement exploités que sur les véhicules équipés de pneus d'hiver efficaces et performants. L'arsenal publicitaire déployé par les constructeurs, conjugué aux perceptions erronées de certains automobilistes, a souvent pour effet « d'enneiger » ce fait essentiel.

Cela dit, le comportement d'un véhicule - et, par conséquent, la technique de conduite - diffère de celui d'un autre en fonction de l'emplacement des roues motrices, de l'empattement, de la répartition des masses et du centre de gravité. Or, ces facteurs sont souvent négligés.

Le rouage intégral peut induire un faux sentiment de sécurité.

Le centre de gravité longitudinal (lié à l'accélération et au freinage) et latéral (lié à la direction) d'un véhicule dépend en grande partie de l'emplacement du moteur et de la boîte de vitesses, ces deux composants étant les plus lourds. Il peut se trouver un peu plus à l'avant sur certains véhicules, et un peu plus à l'arrière sur d'autres.

Le cercle (voir illustration) illustre la magnitude et la direction des forces qui agissent sur les roues. Son périmètre correspond à la force maximale pouvant être transmise au sol par une roue. L'intérieur de ce cercle représente la zone de sécurité, celle où vous demeurez en maîtrise du véhicule. En dehors de cette zone, c'est foutu, et vous voilà sans doute dans le décor... Lorsque les roues se voient imprimer une force à la fois longitudinale et latérale, leur effet s'additionne, et le cumul de deux forces s'exprime par la résultante. Il s'ensuit que plus la force longitudinale est faible, plus la capacité de transmettre une force latérale augmente.

Naturellement, les aides à la conduite permettent d'atténuer certains comportements. Mais pas tous. Par conséquent, plutôt que de dépoussiérer vos notes de physique, retenez bien ceci : ne faites qu'une manoeuvre à la fois et de la manière la plus coulée possible pour ne pas perdre inutilement l'adhérence dont vous avez tant besoin durant l'hiver.

Ce graphique, en clair, veut dire que si vous allez trop vite, vous allez prendre le clos. Infographie: La Presse

Toutes les neiges ne sont pas égales

Le dictionnaire inuit ne définit pas seulement le mot « neige » comme de l'eau congelée qui tombe en flocons blancs et légers. Dans cette langue, chaque type de neige - il y en a une vingtaine - porte un nom qui lui est propre. À défaut de nous lancer dans une étude exhaustive des types de neige, rappelons que granuleuse, compactée ou glacée, elle peut rapidement transformer la chaussée en véritable patinoire. Devant cette mosaïque de surfaces, l'évaluation des conditions routières n'est donc pas une sinécure, d'autant moins qu'elles fluctuent au fil des kilomètres.

Mais la neige n'est pas la seule responsable de la faible adhérence au sol. La température y est aussi pour quelque chose. À preuve, la neige devient moins glissante lorsque le mercure plonge sous le point de congélation. En outre, plus le taux d'humidité est élevé, plus la friction se trouve réduite, ce qui diminue d'autant la capacité du véhicule à s'arrêter ou à négocier un virage.

L'art de dépasser sans se la casser

Nous avons tous été témoins d'une manoeuvre de dépassement hasardeuse ayant provoqué la perte de maîtrise d'un véhicule. Plusieurs spécialistes de la conduite hivernale considèrent, à juste titre, le dépassement comme l'une des manoeuvres les plus dangereuses.

Non seulement faut-il évaluer les conditions du terrain, mais aussi attendre l'endroit et le moment propices pour passer à l'action. Cela exige énormément de concentration, de doigté, d'anticipation et, surtout, de patience. Impulsifs, prière de vous abstenir !

Le facteur le plus important à considérer avant d'effectuer un dépassement consiste à s'assurer qu'on dispose d'une marge de manoeuvre suffisante pour le faire. En effet, bon nombre d'automobilistes sous-estiment la distance nécessaire pour réaliser cette épreuve d'adresse en toute sécurité.

Considérons, par exemple, un parcours de 10 km sur une route où la vitesse permise est de 90 km/h. Le véhicule qui vous précède roule à 80 km/h. Combien de temps gagnerez-vous en le doublant ? Sur une distance de 10 km, une augmentation de 10 km/h permet, théoriquement, de creuser un écart de 50 secondes. Mais ce calcul ne tient pas compte des autres facteurs en cause, comme la circulation, la visibilité et les conditions routières, qui peuvent facilement réduire votre gain. On peut donc se demander avec raison si, dans certaines situations, cette pointe de vitesse vaut vraiment le risque encouru.

Bon, tout est en place, et le moment est venu de doubler. Signalez avant tout votre intention, puis freinez légèrement et rétrogradez d'un rapport (dans le cas d'une transmission manuelle). Stabilisez ensuite votre vitesse de croisière avant de vous engager dans la voie de dépassement, et accélérez pro-gres-si-ve-ment. Sinon, gare au dérapage ! Une fois à bonne distance (lorsque vous voyez le véhicule entièrement dans votre rétroviseur), de grâce, indiquez-lui votre intention de réintégrer votre voie de départ, ce que vous ferez, une fois de plus, en souplesse. Les manoeuvres brutales sont à proscrire en tout temps.

Il va sans dire que l'automobiliste qui se fait doubler a également sa part de responsabilité, puisqu'il doit en théorie contribuer à rendre la manoeuvre aussi sûre que possible. Pour ce faire, il doit, lorsque la situation s'y prête, faciliter le dépassement en réduisant quelque peu sa vitesse de croisière. Mais dans la pratique, ce n'est malheureusement pas toujours le cas. Certains automobilistes cachent en effet sous leur tuque un orgueil démesuré et ne se laissent pas facilement doubler. Méfiance !

Quelle que soit l'attitude de l'automobiliste qui vous précède, vous risquez à l'occasion de porter un jugement erroné sur vos propres capacités. Ainsi, il se peut qu'au beau milieu de la manoeuvre, vous vous rendiez à l'évidence qu'il vaut mieux réintégrer le rang. Si vous êtes sur le point d'échouer un dépassement sur une surface glissante, ne vous affolez surtout pas. Retirez votre pied de l'accélérateur et freinez avec beaucoup de précautions. Lorsque votre véhicule aura suffisamment ralenti, signalez votre intention - avec le clignotant - et réintégrez en douceur votre voie de départ.

C'est tellement facile, l'hiver, de sous-estimer la distance nécessaire pour doubler en sécurité. Infographie: La Presse.