La voiture, un objet artistique?

Un designer automobile vous répondra oui, sans ambages. Pierre Arpin, lui, va plus loin. Cet artiste multidisciplinaire accentue l'esthétisme d'une simple pièce comme le capot ou la portière. Pour faire vivre le métal et conserver ces pièces vouées à disparaître. À la sortie d'une galerie, vous ne regarderez peut-être plus une voiture de la même manière.

Dans un coin de l'atelier de Pierre Arpin, rue Saint-Ambroise à Montréal, des capots sont adossés les uns sur les autres. Dans l'attente d'être travaillés. Accrochées sur le mur opposé, des oeuvres. D'autres capots. Ceux de modèles Jaguar, BMW, Mini Cooper. Oui, des oeuvres d'art. En un coup de meuleuse et en une couche de peinture, ces morceaux de carrosserie sont devenus des gravures. Le travail est fastidieux - un mois par pièce -, le résultat, étonnant.

«Ces pièces de carrosserie ont un certain esthétisme, je fais ressortir la qualité du métal. Le métal, on peut le toucher et il est réfléchissant. Ce que j'ai fait permet de créer des reflets. La lumière se répartit différemment sur l'objet», indique Pierre Arpin.

Après avoir vendu ses peintures à 18 ans, touché au design, conçu des meubles, ce photographe a découvert le potentiel du métal en 2009 lors d'une séance de photos d'autos. «En photographie, les pièces m'inspiraient, mais j'ai vu que je pouvais aller plus loin.»

Rapidement, capot, portière, pare-chocs et même radiateur passent entre ses mains. «La première pièce, je l'ai complètement décapée et j'ai expérimenté dessus des techniques de gravure. La deuxième, j'ai gardé la peinture, mais je l'ai meulée. Dans un autre cas, j'ai mis deux couches de blanc, une couche de noir et ensuite j'ai meulé.»

Sans privilégier une marque automobile plus qu'une autre, Pierre Arpin utilise surtout les capots parce qu'ils offrent une plus grande surface de travail. Certains se prêtent mieux à la transformation que d'autres. Récupérées chez des carrossiers, ces pièces offrent «beaucoup de possibilités» et sont aujourd'hui regroupées au sein d'une collection dénommée «Metasteel».

Mais le clou du travail de M. Arpin se nomme Barbelés: une Audi 90 de l'année modèle 1988 entièrement meulée. La peinture a laissé place à la gravure, d'un pare-chocs à l'autre. Cette voiture finira dans un musée, souhaite l'artiste de 63 ans.

Pierre Arpin devrait exposer cette année à Montréal et exportera ses oeuvres aux États-Unis également. Déjà, la prochaine collection - Accidentés- est planifiée. «J'ai été frappé par les accidents de la route cette année au Québec. Je veux faire une expo avec des pièces de voitures accidentées. Je veux montrer l'horrible», explique-t-il.

D'une collection à l'autre, Pierre Arpin «crée des artéfacts pour les siècles à venir». Pourquoi? «D'ici 50 ans, on ne construira plus les automobiles avec du métal comme on le fait aujourd'hui.»

Photo André Pichette, La Presse

Pierre Arpin fait vivre le métal et permet la conservation de pièces d'autos. Le capot et la portière deviennent des oeuvres.