Le Grand Prix de Valcourt est bon an, mal an le théâtre d'une histoire abracadabrante dont la vedette est Jacques Villeneuve. Cette année n'a pas fait exception, à la différence que le séjour du pilote ne s'est pas terminé sur un lit d'hôpital, mais plutôt chez lui, pendant que ses compétiteurs roulaient encore sur l'anneau glacé du circuit Yvon-Duhamel. Avec, en prime, l'annonce qu'il prendra enfin sa retraite au terme de la saison. «Ça me surprendrait vraiment beaucoup que je change d'idée, nous a dit Villeneuve. À force de pousser Dame Chance, elle va bien finir par dire que ça suffit.»

Jacques Villeneuve est parti en coup de vent dimanche matin à la suite d'une altercation avec les dirigeants de la série Pro Tour, qui venaient de lui servir un avertissement en raison d'un accrochage avec un pilote ontarien lors de la séance d'essais matinale. Villeneuve n'aurait pas vu le drapeau à damier indiquant la fin de la séance et a embouti Cole McMichael, qui avait ralenti l'allure dans le premier virage, comme tous les autres pilotes.

«Si je suis une guenille pour vous autres, eh bien, passez-vous de moi! a lancé le pilote de 60 ans lorsque joint chez lui en après-midi. Ça fait 40 ans que je fais ça et ces gens-là ne m'écoutent pas, alors tant pis.» Selon la direction de la course, Jacques Villeneuve a réclamé que l'on déploie également un drapeau rouge dans le premier virage pour annoncer la fin d'une séance, mais on a fait fi de son commentaire, si bien que le coloré pilote a choisi de claquer la porte.

Cet incident ne serait toutefois que la dernière goutte d'un vase déjà bien plein. «Y a quelque chose qui ne va pas avec Jacques cette année, a dit George Samson, propriétaire de la série Pro Tour. Ce n'est plus le même Jacques que celui que je connais depuis 1995. À Saint-Évariste et Boonville [ses deux premières courses de la saison NDLR], il avait peur et s'était plaint des conditions, ce qui n'est pas son habitude.»

Un commentaire qui prend tout son sens à la lumière des déclarations que nous avait faites la veille Céline Vadnais, la femme de Jacques: «Je pense qu'il est plus prudent, a dit celle qui partage la vie du pilote depuis près de 45 ans. Lors de journées nuageuses ou quand il neige, autrefois il allait en piste peu importe les conditions, mais plus maintenant. Tu vois qu'il est beaucoup plus conscient des risques d'accident.»

Ainsi, Villeneuve a choisi de ne pas aller à la course d'Eganville ce week-end, jugeant la piste trop dangereuse. Il terminera donc sa carrière avec les épreuves de Roberval et Trois-Rivières, en mars.

«Je vieillis. J'ai l'adresse d'un gars de 60 ans, a admis Villeneuve quand on l'a rencontré avant la course de samedi - il a terminé au sixième rang. Et tout le monde autour de moi me demande d'arrêter pour ne pas que je me blesse. Mais c'est simple, j'aime ça, faire ça...»

Mais le temps semble finalement avoir fait son oeuvre sur le plus résilient des pilotes québécois de l'histoire. «Le dernier accident qu'il a subi ici à Valcourt l'an dernier l'a beaucoup fait souffrir, a soutenu Céline Vadnais. Il ne le dira pas, car c'est un homme et il est très orgueilleux, mais j'étais à son chevet pendant un mois et j'ai vu par où il est passé; je sais qu'il ne voudrait plus passer par là. Et moi non plus.»

Céline, votre souhait devrait enfin être exaucé.