Le grand argentier de la Formule 1, Bernie Ecclestone, est jugé pour corruption à partir de jeudi par un tribunal à Munich (sud), un procès qui pourrait faire vaciller le roi du sport automobile depuis 40 ans.

Le milliardaire britannique de 83 ans, qui a déjà annoncé qu'il plaiderait non coupable, est accusé d'avoir versé 44 millions de dollars de pots-de-vin, en 2006 et 2007, au banquier allemand Gerhard Gribkowsky, qui travaillait pour la banque publique bavaroise Bayern LB, en vue de conclure la vente des droits de la F1 au fonds d'investissement CVC Capital Partners.

CVC avait à l'époque racheté pour 839 millions de dollars les droits de la F1 détenus jusque-là par Bayern LB.

M. Gribkowsky, alors directeur des risques de l'établissement financier allemand, a été condamné en juin 2012 à huit ans et demi de prison pour corruption et fraude fiscale, pour n'avoir pas déclaré ces 44 millions de dollars.

Lors du procès, il avait affirmé que cette somme était un pot-de-vin. Le richissime patron de la F1, convoqué à l'audience en qualité de témoin, avait alors reconnu ce versement, mais l'avait présenté comme une forme de «prix du silence» pour que M. Gribkowsky ne fasse pas de révélations gênantes sur son patrimoine au fisc britannique.

26 journées d'audience 

Au total, 26 journées d'audience sont pour l'instant prévues, au moins jusqu'au 16 septembre.

«Je vais aller à ce procès pour prouver mon innocence», a clamé récemment encore M. Ecclestone dans un entretien au journal britannique The Telegraph, rejetant les rumeurs selon lesquelles il pourrait tenter d'obtenir une transaction à l'amiable en plaidant coupable.

Malgré les audiences auxquelles il devra se rendre deux fois par semaine, il compte bien continuer à aller aux différents Grands Prix de Formule 1 de la saison 2014 à travers le monde.

«En ce moment, c'est moi le perdant, car les gens médisent sur moi, sans vraiment comprendre de quoi il s'agit», a-t-il déclaré à la télévision allemande ARD, il y a quelques jours.

Reconnaissant que la préparation du procès occupait actuellement «énormément son temps», il a cependant renoncé à assister au Grand Prix de Chine, le dimanche de Pâques, sur le circuit de Shanghaï.

En raison de cette procédure judiciaire, le conseil d'administration de Delta Topco -la holding de la F1, basée à Jersey et dont CVC Partners est l'actionnaire principal- avait décidé à la mi-janvier de retirer à M. Ecclestone certaines responsabilités au sein du groupe qui gère la plus prestigieuse des compétitions automobiles.

Ecclestone: Hitler «efficace»

S'il ne peut désormais plus signer les contrats avec les écuries, les promoteurs, les propriétaires de circuits et les parraineurs de la F1, il peut potentiellement continuer à les négocier, comme il le fait dans la plus grande discrétion, depuis les années 1980.

Ancien pilote automobile, Ecclestone avait racheté en 1971 l'écurie Brabham, fondée par Sir Jack, qui a ensuite conquis deux titres mondiaux avec le brésilien Nelson Piquet (1981, 1983). Les dernières estimations de sa fortune personnelle tournent autour de quatre milliards d'euros.

Roi de la F1, il est également une figure controversée. En 2005, il avait dû s'excuser après des remarques sexistes sur les femmes pilotes de Formule 1 et en 2009, il avait qualifié Adolf Hitler d'«efficace».

À Munich, Ecclestone va comparaître devant le juge qui a condamné Gerhard Gribkowsky, Peter Noll. Le magistrat l'avait déjà entendu comme témoin pendant deux jours fin 2011, lors du procès du banquier allemand.

À l'annonce du verdict concernant Gribkowsky, M. Noll avait déclaré que Ecclestone avait «conduit au crime» le banquier.