Alors qu'approche la fin de cette année 2014 dramatique, deux pilotes de Formule 1, Jules Bianchi et Michael Schumacher, continuent la course la plus importante de leur vie: une épreuve contre la mort qu'ils veulent faire durer le plus longtemps possible.

L'un a 25 ans, il est hospitalisé à Nice, sa ville natale, et pourrait être le fils de l'autre, jeune retraité de 45 ans qui «dort» dans la propriété familiale, à Gland, sur les bords du Lac Léman. Ils sont tous les deux dans le coma, plus ou moins profond, et aucune information précise ne filtre sur leur état de santé, secret médical oblige. Seulement des messages de remerciement aux admirateurs de tous âges, dans le monde entier.

L'Allemand vivait une retraite bien remplie quand il est tombé à ski, fin décembre 2013 à Méribel, après avoir heurté une pierre dans un secteur hors-piste, sans danger apparent. Le Français roulait vite, au 43e tour du Grand Prix du Japon, le 5 octobre dernier, quand sa Marussia à moteur Ferrari est sortie de la piste sur le circuit de Suzuka, sous la pluie, à la nuit tombante.

Une même émotion

Le plus âgé, «Schumi», a été sept fois champion du monde de F1. Le plus jeune, Jules, aurait pu le devenir un jour. Ils ont tous les deux porté les couleurs de la Scuderia Ferrari, l'un comme titulaire, l'autre comme pilote d'essai et de réserve. L'un a raflé ses cinq dernières couronnes dans une monoplace rouge. L'autre rêvait encore d'en piloter une en course, un jour, dans le paddock de Suzuka.

En dehors de leurs accidents bien différents, les points communs sont nombreux entre Schumacher et Bianchi. Il y a la famille Todt car le père, Jean, président de la Fédération internationale de l'automobile (FIA), dirigeait la Scuderia quand «Schumi» dominait la F1, de 2000 à 2004. Et le fils, Nicolas Todt, était l'agent de Jules quand le destin du pilote niçois a basculé.

Autre point commun, l'émotion suscitée par leurs accidents, dus tous les deux à un concours inédit de circonstances, un cocktail effrayant de petits et gros détails, comme la caméra sur le casque de Schumi et le typhon dans les parages du circuit de Suzuka. Qu'on appelle ça de la malchance ou la fatalité, le résultat est le même: accident, choc, traumatisme, lésion, coma.

Depuis, il y a eu un rapport de 396 pages, demandé par la FIA, dans lequel dix experts de la F1, triés sur le volet, ont estimé que la Marussia de Jules Bianchi allait trop vite, à l'entrée du virage 7, et surtout que son freinage électronique était «incompatible» avec le système de sécurité prévu par la FIA en cas de brutale perte de contrôle d'une F1 par son pilote.

L'espoir d'un miracle

L'essentiel est ailleurs. Il est dans l'espoir des deux familles que se produise un jour un miracle médical. Dans un délai que plusieurs médecins sérieux fixent, avec toutes les précautions d'usage, entre six mois et trois ans.

«Un pronostic est envisageable à compter de six mois après l'accident», selon le Pr Denis Safran, chef du service d'anesthésie et réanimation de l'Hôpital Georges-Pompidou, à Paris. «Mais bien évidemment des améliorations sont possibles après ce délai», ajoute-t-il.

«Après la période aiguë, la route peut être très longue. On a vu des patients s'améliorer entre un an et trois ans après l'accident», selon le Dr Bernard Vigué, réanimateur à l'Hôpital du Kremlin-Bicêtre, près de Paris. Même délai raisonnable, «un à trois ans», selon le Pr Jean-François Payen qui a soigné Schumacher pendant cinq mois au CHU de Grenoble.

En attendant, des milliers de «Keep on fighting Michael» et autres «Forza Jules» vont continuer à être collés sur des voitures de course, sur des casques de pilotes, et postés par milliers aux quatre coins de la planète, sur les réseaux sociaux. Par des amis et des admirateurs anonymes qui n'oublieront jamais Schumi et Jules. Parce que l'espoir fait vivre, surtout à Noël.