Les deux pilotes de l'écurie Mercedes-AMG, championne du monde en titre, vont s'affronter dimanche soir dans le désert près de Manama, lors d'un Grand Prix de Bahreïn qui aura lieu, comme d'habitude depuis 2012, dans un contexte politique troublé, évoqué en détail jeudi par un nouveau rapport d'Amnistie Internationale.

Entre Lewis Hamilton, le champion du monde en titre, qui a gagné en Australie et en Chine, et Nico Rosberg, le vice-champion du monde, qui s'accommode de moins en moins du statut très officieux de pilote N.2, la rivalité est repartie de plus belle à Shanghai. Et même si Toto Wolff, leur directeur d'équipe, a ensuite calmé le jeu, la douce euphorie des deux titres mondiaux de 2014 est retombée.

Mercedes envisage même d'avoir recours à des consignes de course, en cours de saison, si la concurrence de Ferrari devient vraiment dangereuse et si la situation se gâte trop entre les pilotes de ses Flèches d'Argent. Car les premiers GP de la saison ont montré que Ferrari est en plein renouveau, avec une monoplace très efficace et un moteur qui a fait de gros progrès cet hiver.

Sebastian Vettel, victorieux en Malaisie, a déjà les moyens de ses nouvelles ambitions. Et Kimi Räikkönen, le jeune papa, sera content de participer à la fête, d'une manière ou d'une autre. On peut donc s'attendre à ce que l'union sacrée, autour du nouveau chef charismatique de la Scuderia, Maurizio Arrivabene, gâche quelques fins de semaine chez Mercedes-AMG.

Le quadruple champion du monde vient d'enchaîner trois podiums en trois courses et pointe à la 2e place du championnat, devant Rosberg. Il est persuadé que les progrès de son écurie vont continuer: «C'est seulement la troisième course de la saison et l'étape que nous avons franchie est assez impressionnante», disait Vettel dimanche soir à Shanghai.

Pendant les trois jours de battement entre la Chine et Bahreïn, la presse britannique s'est un peu ennuyée, alors les détracteurs d'Hamilton ont sauté sur l'occasion d'une photo de podium, sur laquelle l'Anglais aspergeait de champagne une charmante hôtesse, pour le traiter de tous les noms sur les réseaux sociaux, en lui reprochant un comportement sexiste, peu galant, entre autres vacheries.

Nouveau rapport d'Amnistie

Heureusement pour Hamilton, il y a des choses bien plus graves dans le monde, notamment dans le Golfe persique. Le GP de Bahreïn existe depuis 2004, mais il avait été annulé en 2011, au tout début de la contestation chiite contre le régime sunnite de la famille Al-Khalifa. De 2012 à 2014, la course a finalement eu lieu, servant de haut-parleur mondial aux revendications de l'opposition.

Cette édition 2015 ne va pas faire exception à la règle, d'autant que samedi dernier les autorités bahreïnies ont prolongé de 15 jours la détention d'un défenseur des droits de l'Homme, Nabil Rajab, qui est de confession chiite.

Arrêté le 2 avril pour propagation de «fausses nouvelles», selon des militants locaux, M. Rajab est accusé de «propagation de rumeurs tendancieuses» par le parquet de Manama. Il a notamment évoqué, sur Twitter, la participation de Bahreïn à la coalition arabe qui combat les rebelles chiites au Yémen.

Jeudi, un nouveau rapport d'Amnesty International a été publié sur la situation dans le Royaume, comme chaque année à la même époque.

«Les yeux du monde vont regarder Bahreïn pendant le Grand Prix, mais peu de gens vont réaliser que l'image internationale que les autorités ont essayé de projeter, celle d'un État progressiste et réformiste, défendant les Droits de l'Homme, masque une vérité bien plus sinistre», selon l'ONG.

«Quatre ans après le soulèvement (de 2011), la répression est partout et les abus des forces de sécurité continuent. Les autorités de Bahreïn doivent prouver que leurs promesses de réforme sont plus qu'une rhétorique vide», écrit Said Boumedouha, le Directeur d'Amnesty International pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.