Alors qu'en Europe, un programme d'inspection est motivé le plus souvent par l'amélioration de la sécurité routière, au Québec, il serait motivé surtout par l'amélioration de la santé publique. Sur ce front-là, un tel programme est inefficace, selon ses détracteurs.

D'ailleurs, s'il n'y a pas encore consensus au Québec, on pourrait dire que c'est la même chose sur le continent. La moitié des provinces canadiennes et un peu moins de la moitié des États américains n'ont pas adopté de lois de ce type.

Les opposants à l'inspection obligatoire des véhicules disent qu'il n'y aura pas de loi à cet effet. Pourquoi, disent-ils ?

Parce qu'il y a un coût financier... et politique

C'est le caractère impopulaire d'un programme d'inspection et d'entretien : le coût, assumé par le consommateur. Dans le projet de 2011 du ministre Arcand, il était prévu que le consommateur --en l'occurrence le vendeur qui aurait dû procéder à l'inspection--débourse environ 60 $. Et qu'il assume les réparations éventuelles dictées par l'inspection. On imagine bien qu'il est délicat de s'aventurer sur un tel terrain politiquement.

Parmi les cinq provinces canadiennes qui ont un programme, le coût varie de 25 $ à 55 $ (plus taxes) pour un volet d'inspection (émissions ou sécurité).

Parce que ce n'est pas rentable

Le raisonnement financier concerne également le programme en lui-même. Selon l'Association pour la protection des automobilistes (APA), le jeu n'en vaut tout simplement pas la chandelle si l'on veut uniquement faire la chasse aux véhicules polluants. « La partie principale de la dépense d'un programme, c'est l'inspection d'autos propres, dit son président George Iny. Même à sept ou huit ans, si on regarde les statistiques du programme de l'Ontario, le taux d'échec des voitures est inférieur à 10 %.»

« Actuellement, en Ontario, quand on inspecte une auto vieille de cinq ou six ans, on dépense 3000 $ pour trouver à peu près deux voitures polluantes sur 100. Après, il faut les réparer. À peu près 40 % des véhicules ne sont pas réparés convenablement. Et c'est ça, le hic », ajoute George Iny.

Au Canada, l'Ontario est la seule province où l'inspection des émissions est obligatoire.

Parce que ce n'est pas éprouvé

Selon les défenseurs des automobilistes, il ne faut pas confondre les enjeux liés à la pollution et ceux concernant la sécurité. Et si les programmes européens sont « peut-être » efficaces en matière d'inspection mécanique, rien ne le démontrerait de ce côté-ci de l'Atlantique.

Il y a peut-être une raison à cela, comme l'a écrit le coroner Martin Sanfaçon dans son rapport d'investigation de septembre 2014 : « Les formulaires de rapport d'accident de la SAAQ demandent aux policiers de déterminer la "première" et la "deuxième" cause probable de l'accident. Peu de détails, pas de nuance ! Et c'est sur la foi de ces déclarations que la SAAQ établit ses statistiques et appuie son argumentation quant aux causes d'accident. »

Parce que ce n'est pas structuré

Si inspection mécanique il doit y avoir, que celle-ci se fasse de manière indépendante, clame l'APA. « Le secteur de la réparation qui réclame le volet inspection mécanique est motivé par des avantages. C'est que l'État exigerait des réparations. » L'organisme de défense des automobilistes préconise de séparer l'inspection, qui serait réservée à des centres agréés - comme en Europe -, de la réparation, apanage des garages.