Briggs Swift Cunningham figure en page couverture du numéro du 26 avril 1954 du magazine Time. Au bas, on lit la mention: Road Racer Briggs Cunningham: Horsepower, Endurance, Sportsmanship.

Né en 1907, Briggs Cunningham II est l'image même de l'American Sportsman, selon la revue Road&Track. Outre ses prouesses à la barre de ses voiliers de compétition (Coupe de l'America, 1958), Cunningham est le créateur de la première voiture sport entièrement américaine. Deux ans avant la mythique Corvette et 12 ans avant la redoutable Shelby Cobra.

Le richissime Américain rêve de remporter les 24 heures du Mans avec une voiture américaine pilotée par des Américains. Sa première tentative a lieu en 1950 avec deux Cadillac: un Coupé 61 de série, et l'autre, baptisée C1, habillée d'une carrosserie aux formes torturées construite par un groupe d'ingénieurs de Grumman Aircraft. Intimidante par ses formes et son gros V8 qui fait trembler l'air de la campagne mancelle, la C1 est surnommée le Monstre par les Français, peu habitués à de telles machines. Mais le même public est rapidement charmé par ces deux tonitruantes américaines qui remportent, à la surprise générale, les 10e et 11e places de la redoutable épreuve d'endurance.

Ces résultats encourageants incitent Cunningham à construire et inscrire à l'épreuve de 1951 trois voitures à châssis tubulaire: les C2-R propulsées par un V8 Chrysler Hemi de 220 chevaux. Quoique très rapides, les C2-R déçoivent, l'une se classant 18e et les deux autres étant contraintes à l'abandon. Un an plus tard, la C4-R pilotée par Briggs Cunningham et Bill Spear se classe quatrième au Mans. En 1953, c'est la victoire aux 12 heures de Sebring, en Floride, devant une belle brochette de voitures européennes. Ce succès est suivi en juin d'une très belle troisième place au Mans avec la nouvelle C5-R.

Rapides à souhait, notamment sur la longue ligne droite de Mulsanne, les lourdes Cunningham sont cependant handicapées par des freins à tambour nettement moins performants et endurants que les nouveaux freins à disque Dunlop qui équipent en exclusivité l'écurie Jaguar. Cunningham demande à Dunlop de lui livrer ses révolutionnaires freins à disque, mais Dunlop refuse... exclusivité à Jaguar.

Même s'il n'a jamais décroché l'ultime victoire aux 24 heures du Mans, Cunningham a néanmoins fait la démonstration qu'il était possible de concurrencer les Européens sur leur propre terrain. Ce palmarès est d'autant plus remarquable que Cunningham ne bénéficiait pas du soutien d'un grand constructeur comme ce fut le cas dans les années 60 avec l'imposant effort consenti par Ford pour finalement arracher la victoire à Ferrari.

Les routières Cunningham

Conçues expressément pour la course, les Cunningham de compétition habillées d'une robe blanche à rayures bleues sont accompagnées dès 1952 de deux versions routières, le cabriolet et le coupé Continental C3. Construites à l'usine Cunningham de West Palm Beach, en Floride, sur le même châssis que les voitures de course, les C3 mues par un V8 Chrysler sont ensuite expédiées chez le carrossier italien Vignale, à Turin, pour y recevoir leur carrosserie, puis renvoyées en Floride. Cette démarche coûteuse explique en partie le prix demandé: 8000$ pour le coupé, 12 000$ pour le cabriolet (prix de la Corvette en 1953: 3500$).

Au total, 20 coupés et 5 cabriolets sont produits et vendus à des clients fortunés comme Nelson Rockefeller et la famille Du Pont qui pouvaient sans doute se permettre le prix de l'exclusivité. Pas moins de 24 des 25 C3 ont survécu jusqu'à nos jours, ce qui nous a donné l'occasion de les admirer lors de la 31e édition du récent Lime Rock Historic Festival, au Connecticut.

Briggs Cunningham s'est éteint en 2003 à l'âge de 96 ans. Dix ans auparavant, il avait cédé sa magnifique collection à Miles Collier Jr., de Naples, en Floride. Elle forme aujourd'hui le noyau central de l'exceptionnelle Collier Collection.

Photo Time magazine

Briggs Swift Cunningham a fait la couverture du magazine Time