N'allez pas chercher au-delà de la frontière américaine ou en Italie. C'est du côté de Bromont que l'on trouve l'une des plus importantes collections de voitures hippomobiles au monde. Hippomobiles? Oui! Et non des moindres. De véritables Ferrari du genre remontant jusqu'au XVIIIe siècle pour certaines.

Infatigable, intarissable et insatiable. Paul Bienvenu ne s'arrête pas. De parler, d'expliquer, de montrer. Dans l'entrepôt de sa propriété des Cantons-de-l'Est, cet octogénaire arpente fièrement les allées de ce qui constitue l'une des collections de véhicules hippomobiles les plus importantes en Amérique du Nord. Tout y est: calèches, traîneaux, coupés, phaétons, landaus, carrioles et même un corbillard. «S'il n'y a pas de cheval, je ne suis pas intéressé», précise cet homme d'affaires aujourd'hui à la retraite.

Depuis qu'il monte à cheval et qu'il s'est découvert cette passion pour les «voitures» d'une autre époque, Paul Bienvenu s'est échiné à constituer pendant 50 ans une collection impressionnante d'ancêtres du cheval-vapeur, des véhicules qui ont transporté des Québécois, des Canadiens, quelques Européens et Américains, du XVIIIe siècle aux années 40.

«Lorsque j'avais 10 ans, j'avais déjà un cheval et une voiture et je me promenais avec. J'attelais, je montais. J'ai été profondément associé au cheval depuis mon enfance», raconte Paul Bienvenu. Celui-ci ne s'est jamais départi d'un attelage. Au point où à Saint-Isidore-de-La Prairie, le village de sa femme, il attelait autrefois son cheval tous les dimanches. «Évidemment, cela faisait longtemps qu'on n'attelait pas. La première maison qui me voyait passer téléphonait au voisin pour dire que je passais avec mon cheval. Tout le monde était sur la galerie à me regarder passer avec mon cheval et ma voiture.»

Nous sommes dans les années 60 et, rapidement, Paul Bienvenu se voit offrir un boghei ou une carriole. «Pour cinq piastres à l'époque. Malgré moi, je me suis ramassé avec trois ou quatre carrioles et voitures à roues.»

Coup de foudre



Mais «le coup de foudre» pour ces véhicules a lieu chez un certain Herb J. O'Connel. «Il avait la plus grande collection privée d'Amérique du Nord. La piqûre de vouloir collectionner, je l'ai eue chez lui.»

Paul Bienvenu a ainsi accumulé au fil des ans des quatre-roues et des traîneaux en tous genres. Et a fait l'acquisition de trois grandes collections privées.

Cinquante ans après ses premières balades en attelage du côté de Saint-Isidore, Paul Bienvenu a légué l'ensemble de sa collection au Musée de la civilisation à Québec. «La collection a été conçue exclusivement pour la postérité. Depuis 1962. C'est le patrimoine hippomobile du Québec. Je l'ai complétée en allant chercher ailleurs pour agrémenter la collection», justifie l'intéressé.

La moitié des quelque 200 véhicules a été restaurée, la très grande majorité authentifiée. Aujourd'hui, l'institution muséale se targue de posséder l'une des plus importantes collections du genre au monde.

«C'est certainement l'une des plus grandes collections au monde en voitures d'hiver et même en voitures hippomobiles tout court. C'est certainement dans les cinq plus grandes collections du monde. Et c'est une véritable collection nationale», confirme Michel Côté, directeur général du Musée de la civilisation à Québec.

Cette collection est également très richement documentée. Paul Bienvenu a conservé le moindre accessoire ou document iconographique qui pouvait se rapporter à chaque véhicule. «À travers cette collection, on lit l'histoire du Québec et du Canada. Ces voitures appartiennent à une histoire économique, politique et sociale. Ce qui fait que cette collection est unique, c'est la connaissance que l'on a sur chacune des voitures. On est capable d'associer la plupart des voitures à un événement, un personnage ou un fabricant», ajoute Christian Denis, conservateur du Musée de la civilisation.

Cette collection unique fera l'objet d'une exposition au Musée de la civilisation en avril prochain.

Sa collection est tellement importante quantitativement qu'il l'abrite encore chez lui dans un vaste entrepôt. «La collection reste ici le temps que notre bâtiment soit prêt. La réserve doit être agrandie», explique le directeur du musée, Michel Côté.

À 80 ans passés, le donateur, quant à lui, n'a pas l'intention de s'arrêter. «Je suis toujours collectionneur. Depuis la donation en 2011, j'ai recommencé à collectionner.»

À ce rythme, c'est un musée exclusif à cette collection qu'il faudra ouvrir.