L'industrie automobile est une jungle où règne une concurrence fauve. Les constructeurs doivent donc rivaliser de ruse afin d'empêcher les regards indiscrets de détecter les nouveaux éléments enchâssés dans leurs créations.

Par conséquent, il n'est, pour ainsi dire, pas surprenant de voir les prototypes qui parcourent les rues limitrophes aux centres de mise au point affublés de survêtements aux teintes et textures étranges.

 

Pratique pas vraiment récente, ce défigurement intentionnel a été mis à l'avant-plan avec l'avènement des blogues et de l'information quasi instantanée. C'est l'art de tromper l'oeil pour berner les paparazzis de l'automobile.

 

D'une grande complexité

 

Le camouflage d'un véhicule qui est au stade de prototype ou même en pré-production est loin d'être une tâche simple. Malgré le bâchage apparent qui semble prédominer autour de la disposition de ces mascarades, chaque élément a sa raison d'être.

 

L'expert mandaté est souvent chargé de dissimuler toute composante de design pouvant trahir la marque et le modèle du véhicule. Pour ce faire, il emploie une série de bâches faites de polyester (matériau léger qui «respire» et ayant une forte résistance à la cassure) disposées sur l'ensemble de la carrosserie. On glisse, sous ces pièces de tissu, différents matériaux pour créer des textures discordantes faussant la perception, matériaux qui créent des angles et des formes qui sont en réalité inexistants.

 

En plus d'offrir une couverture qui manipule la réalité, cette «armure» ne doit pas trop entrer en conflit avec le système de refroidissement et de l'aérodynamisme de l'auto, ce qui fausserait les données recueillies par les ingénieurs au cours des périodes d'essai. La robe est également contrainte à tenir le coup lorsque la bagnole file à des vitesses élevées (les voitures sont fréquemment poussées à leurs limites sur des circuits ouverts au public, comme le tracé allemand Nürburgring). Pour finir, elle est conçue pour être posée et retirée le plus rapidement possible (les constructeurs exigent que la période d'installation ne dépasse pas les 45 minutes, selon un article de Car and Driver).

 

Pousser l'illusion

 

Vous l'avez sûrement deviné, il n'y a pas qu'une seule manière de concevoir ces accoutrements inesthétiques.

 

Certaines firmes utilisent la manière forte, décrite plus tôt, tandis que d'autres mettent l'accent sur l'illusion d'optique. Ces déformations visuelles sont issues de films adhésifs apposés sur les panneaux de carrosserie. Ces pièces adhésives peuvent simuler l'épiderme d'un animal (motifs zébrés) ou exposer des formes géométriques qui font paraître un élément en réalité convexe comme étant concave. Ces collants sont souvent appliqués sur les piliers qui soutiennent le toit - communément appelés piliers A, B et C - dans le but de créer une ambiguïté en ce qui concerne l'architecture de l'auto (un coupé à hayon peut devenir, en un tournemain, un coupé des plus conventionnels lorsque le pilier C est remaquillé).

 

Ces films adhésifs ont aussi la caractéristique de facilement imiter un ombrage au moyen d'un agencement de dégradés. En outre, certains constructeurs vont jusqu'à mettre un badge d'un rival sur leurs prototypes pour appuyer la supercherie.

 

Vraiment pour cacher?

 

La raison première du camouflage est certes de dissimuler des engins d'essai sous un couvercle, mais il y a parallèlement une motivation d'ordre publicitaire.

 

Les photos de ces voitures qui s'échangent sur l'internet créent un engouement et sont quelques fois le fruit de l'appel téléphonique d'un obscur personnage...