Ou comment deux constructeurs pimentent des modèles en fin de carrière et donnent libre cours à leurs fantasmes. La comparaison ne va pas sans susciter quelques froncements de sourcils. Pourtant, dans les faits, la Ford Fiesta ST et le Nissan Juke Nismo RS se comparent parfaitement du point de vue des prix comme des prestations et de la technique. Ils expriment deux variations autour du thème de la sportive de poche. Ces deux modèles à la personnalité bien trempée attirent-ils deux publics distincts pour autant?

Infaillible recette dont l'industrie automobile connaît tous les ingrédients. Prenez un véhicule (pas forcément de première jeunesse), administrez-lui un traitement façon «m'as-tu-vu» (roues géantes, bas de caisse moulés, teintes criardes, surpiqûres rouge pomme sur les garnitures, un zeste d'Alcantara) et placez sous le capot des moteurs musclés. Agitez bien fort et, à la sortie de la chaîne de montage, apposez un label à consonance sportive. Vous obtenez un modèle hors-norme, susceptible de raviver l'intérêt pour une gamme qui sombre lentement dans l'anonymat. Ce traitement-choc donne d'amusants résultats.

Griffée du label ST, la Fiesta s'en trouve métamorphosée. Physiquement, bien sûr, avec ses excroissances de carrosserie, mais surtout mécaniquement. On note la présence d'un moteur quatre cylindres 1,6 L suralimenté (197 chevaux), mais aussi d'éléments suspenseurs spécialement étudiés - et abaissés de 15 mm - pour dynamiser la conduite de cette petite auto. La direction gagne en rapidité par rapport au modèle «standard» et offre une prise plus directe. Et, pour tirer le meilleur parti de ces transformations, la Fiesta ST est dotée d'un vecteur de couple, dispositif qui vise à réduire le sous-virage (tendance du train avant à tirer tout droit) dans les courbes négociées rapidement. De plus, le correcteur de stabilité électronique propose trois modes d'intervention allant du plus strict au plus permissif.

Le Juke Nismo RS représente pour sa part un ajout aux autres livrées sportives du Juke. L'ajout des lettres RS ne fait que jeter un peu plus d'essence dans les chambres de combustion du 1,6-litre suralimenté. Ce dernier bénéficie d'une gestion électronique plus sophistiquée et d'un système d'échappement redessiné. Ces modifications permettent d'extraire 215 chevaux de ce propulseur qui reçoit une boîte manuelle six rapports spécialement conçue pour lui. Tout comme la Fiesta ST, le Nissan reçoit une direction plus rapide et des suspensions retouchées. Un centre de gravité plus près du sol et des points d'attache renforcés, un différentiel à glissement limité complète l'offre canadienne de Nissan.

En somme, les deux constructeurs font appel sensiblement aux mêmes ingrédients pour épicer le comportement de leurs montures.

L'habit fait-il le moine?



Avec ou sans fard ou maquillage, le Juke ne passe jamais inaperçu. Qu'on aime ou non, il a le mérite de se démarquer, qualité plutôt rare de nos jours. Pour souligner son penchant sportif et éviter autant que faire se peut toute comparaison avec les Juke «normaux», l'habitacle se pare de jolies fioritures. On pense immédiatement aux minces et très enveloppants sièges Recaro à l'avant, aux surpiqûres sur des pièces de suède ou d'Alcantara (volant), au bloc d'instrumentation dans lequel les aiguilles patinent sur un fond rouge et à la console centrale habillée d'une fausse coquille en fibre de carbone. Mine de rien, ces petites touches égaient un habitacle autrement bien triste et légèrement suranné par rapport à l'audace de son profil extérieur. Outre certains plastiques bon marché, on note aussi l'absence d'une colonne de direction télescopique, l'ergonomie un peu fantaisiste de certains indicateurs et la petitesse de l'écran du système de navigation.

Plus réservée, mais guère plus jeune, la présentation de l'américaine en fait moins pour nous épater. Hormis quelques garnitures au fini lustré et quelques autres faussement sportives, rien ne démarque vraiment cette ST des Fiesta les plus sages. Ah si, les sièges. Eux aussi sont signés Recaro, à la différence qu'ils sont généreusement plus rembourrés et offrent, par conséquent, un meilleur confort sur de longs trajets. Petite douceur additionnelle: ils dissimulent des éléments chauffants. Globalement, l'ergonomie de l'américaine est supérieure à celle de la japonaise et, en dépit d'une instrumentation plutôt pauvre, l'écran de navigation est plus grand, donc plus lisible. Hélas, il est en option (800$). Le Juke l'offre de série. Cela dit, parmi les autres avantages de la Fiesta ST figurent une colonne de direction qui s'articule sur les deux axes et des rangements plus nombreux, mais pas tous très pratiques cependant.



Terrain de jeu



Pour que le ramage soit à la hauteur du plumage, Ford et Nissan ont ajouté autant de chevaux sous le capot qu'ils le souhaitaient. Au crédit de ces deux constructeurs, il faut en effet relever le vaste effort consenti sur les motorisations. Aux amateurs peu fortunés, voilà deux propositions assez musclées. Mais une sportive ne doit pas être seulement jugée sur sa puissance. Le comportement routier se doit d'être à la hauteur. Dans ce domaine précis, la Fiesta ST avance des arguments plutôt convaincants grâce à son dispositif de vecteur de couple et à la possibilité de paramétrer son correcteur de stabilité électronique. Ces deux éléments, à eux seuls, permettent de tirer un meilleur profit des qualités dynamiques du châssis, même sur une surface mouillée.

La direction du Juke Nismo RS, un brin plus lente, mais d'une précision sensiblement équivalente à celle de la Fiesta ST, peine à gommer parfois les remontées de couple dans le volant. Celles-ci ne se manifestent hélas pas que sur une chaussée à faible coefficient d'adhérence. La japonaise exige une plus grande finesse de pilotage pour en tirer toute la quintessence. Elle est plus rapide, freine plus efficacement encore que la Ford. Mais cette dernière est globalement plus efficace et sans doute moins exigeante et plus souple à piloter (à ne pas confondre avec conduire) que la Nissan. Celle-ci, dans le cadre d'une utilisation sportive, requiert plus d'effort - la boîte de vitesse représente en soi un défi -, mais procure sans doute pour cette raison plus de satisfaction à celui ou celle qui se trouve au volant. Voilà bien la preuve que nos protagonistes attirent des publics distincts.

Catégories distinctes?



Ne vous laissez pas tromper par la physionomie singulière du Juke. Ce modèle reprend l'architecture d'une sous-compacte, comme en fait foi ce tableau comparatif.

Sportives! Et fonctionnelles aussi?



Nos deux bombinettes peuvent accueillir quatre personnes à leur bord. On se sentira un peu mieux dans le Nissan, en dépit d'une garde au toit plus juste à l'arrière. En revanche, l'accès et la sortie de ces deux véhicules s'annoncent problématiques en raison de l'étroitesse des portières antérieures.

20 secondes



Sur papier, le 1,6-litre de la Fiesta ST développe 197 chevaux. Cependant, cette cavalerie ne se manifeste que sur un court laps de temps. En effet, la gestion électronique du moteur autorise une pression de suralimentation supplémentaire (maximum 21 psi) durant 20 secondes. Voilà qui est largement suffisant pour réaliser une manoeuvre de dépassement éclair. Ce rupteur vise à préserver la durabilité à long terme du moteur.

Nismo tout court



Au Canada, Nissan commercialise une seule version du Juke Nismo RS, contre deux aux États-Unis. En effet, les consommateurs américains peuvent opter pour une version dotée d'une boîte semi-automatique à variation continue (CVT) et d'un rouage à quatre roues motrices (prise temporaire). Cette dernière compte en plus sur un dispositif de vecteur de couple similaire à celui qui équipe la Fiesta ST. Ce modèle entraîne une dépense additionnelle de 2000$ US. À noter qu'il existe - même au Canada - un dérivé Nismo moins exubérant du Juke (197 chevaux). Il offre le choix du nombre de roues motrices (deux ou quatre) et de pédales (deux ou trois).

Fiche technique - Ford Fiesta ST

> Prix : 26 664$

> Frais de transport et de préparation: 1665$

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation réelle : 8,4 L/100 km

> Pour en savoir plus : www.ford.ca

> Moteur (essence) : L4 DACT 1,6 litre - Turbo

> Puissance : 197 ch à 6000 tr/min

> Couple : 202 lb-pi à 4200 tr/min

> Poids : 1234 kg

> Rapport poids-puissance : 6,26 kg/ch

> Mode: Traction

> Transmission de série : Manuelle 6 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/10,8

> Freins av-arr : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 205/40R17

> Capacité du réservoir : 47 litres

> Essence recommandée: Super

Fiche technique - Nissan Juke Nismo RS

> Prix : 28 298$

> Frais de transport et de préparation: 1 695$

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation réelle : 9,3 L/100 km 

> Pour en savoir plus : www.nissan.ca

> Moteur : L4 DACT 1,6 litre - Turbo

> Puissance : 215 ch à 6000 tr/min

> Couple : 210 lb-pi entre 3600 et 4800 tr/min

> Poids : 1308 kg

> Rapport poids-puissance : 6,08 kg/ch

> Mode: Traction

> Transmission de série : Manuelle 6 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/11,1

> Freins av-arr : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 225/45R18

> Capacité du réservoir : 50 litres

> Essence recommandée: Super