Récemment magnifiée du titre de «voiture canadienne de l'année 2015», la Subaru Legacy aurait-elle désormais tous les éléments requis pour sortir de l'anonymat? Sans diminuer d'aucune façon la valeur du titre qu'elle a remporté, la Legacy est-elle pour autant la meilleure de sa catégorie considérant que les principaux ténors, dont la Honda Accord, étaient absents de cette compétition?

La Legacy de Subaru défie l'Accord de Honda depuis 15 ans maintenant, sans jamais parvenir à la terrasser. Trop marginale, trop chère, trop petite, trop moche et quoi encore, avez-vous dit pour justifier votre préférence pour l'Accord à l'offre de Subaru. Les multiples révisions dont a fait l'objet la Legacy depuis ses débuts - en 1999 - n'ont apparemment jamais suffi à l'élever au rang des berlines intermédiaires les plus prisées de la catégorie. En gros, pour chaque Legacy vendue au Canada, Honda fait immatriculer cinq Accord.

On peut naturellement se demander ce que la Legacy a maintenant tant à offrir pour réduire cet écart appréciable avec l'intermédiaire japonaise la plus vendue au Canada. Cette sixième génération qui embrasse une nouvelle signature esthétique paraît plus imposante qu'elle ne l'est réellement. Dans les faits, ses dimensions extérieures sont demeurées sensiblement les mêmes que celles du modèle qu'elle remplace. Cela ne l'empêche pas d'offrir plus de volume intérieur grâce à d'ingénieux remaniements.

Tour du propriétaire

Dans une catégorie de moins en moins visible (elles se ressemblent presque toutes, vous ne trouvez pas?), l'Accord se fond dans le paysage, avec une assurance paisible, un refus de la frime étonnant. Ni effacée ni banale. L'Accord est juste discrète. La critique s'en formalise encore et s'étonne à juste titre de ne plus ressentir le même bonheur qu'autrefois. L'Accord s'est rangée sur le plan du style et de l'agrément.

La Legacy n'est guère plus extravertie. Dommage que les formes de la Legacy Concept, qui devaient préfigurer, pensions-nous, le modèle de série, aient été complètement diluées. Son physique est aussi banal - on en oublierait facilement où on l'a garée. Tout comme l'Accord, la Legacy est adaptée à la route du XXIe siècle. C'est une voiture pour carburant cher, vitesse limitée et circulation standardisée. On dirait qu'elle assure tellement qu'elle permet de penser à autre chose.

À l'oeil, nos duellistes occupent sensiblement le même espace sur la chaussée. L'Accord est pourtant plus longue, plus large et plus légère que sa rivale d'un jour. Elle est cependant à peine plus courte. Plus enveloppée, la Honda repose sur un empattement plus long et elle affiche globalement des cotes d'habitabilité supérieures. Mais les chiffres ne disent pas toujours tout. Pour preuve, au jeu des comparaisons, la Legacy révèle un meilleur dégagement pour les épaules et les hanches à l'arrière. C'est sans doute vrai, mais, à l'usage, on retient plutôt que l'assise de la banquette de la Subaru est positionnée plus bas et que l'espace alloué au centre est fort inconfortable pour prétendre qu'on a affaire ici à une véritable cinq-places. Ce dernier commentaire s'applique également à la Honda à la différence que celle-ci a l'avantage d'offrir à l'arrière un plancher plat.

En revanche, au chapitre du volume utilitaire, les chiffres donnent l'impression de faire foi de tout: 447 L pour la Honda, 425 L pour la Subaru. Attention. Celui de la Subaru offre sensiblement moins d'espace, mais attache le couvercle de son coffre à des amortisseurs, moins encombrants que les manchons utilisés par Honda. Qui plus est, une fois les dossiers de la banquette repliés, le «tunnel» menant à l'habitacle est plus large, donc plus pratique chez Subaru que chez Honda.

Malgré des efforts méritoires ces dernières années, les stylistes de l'Accord ne sont pas près de remporter un prix d'ergonomie. Confortablement assis, vous conclurez sans doute comme nous que la partie centrale est encore inutilement compliquée avec ses boutons et sa grosse molette dont on ne sait jamais trop bien si elle augmente le volume de la radio ou la soufflerie de la climatisation. Mais force est de reconnaître que c'est beaucoup mieux qu'autrefois. Si la présentation n'est ni très gaie ni très inspirée, reste que la qualité de l'assemblage ne prête flanc à aucune critique et les espaces de rangement ne manquent pas.

La Legacy décore son habitacle avec une belle simplicité et s'inscrit, elle aussi, dans un registre des plus traditionnels. Cela ne l'empêche pas d'offrir des matériaux de meilleure qualité, doux au toucher et agréables à l'oeil. Mais là encore, l'ambiance n'est pas à la fête, malgré de louables efforts dans le choix des coloris (et des matières), même si cela touche principalement les versions haut de gamme. Par rapport à la Honda, la disposition des commandes a le mérite ici d'être claire, à l'exception de cet amoncellement de boutons placé à gauche du volant. Ceux-ci sont difficilement identifiables sans devoir quitter la route des yeux. Autre source potentielle de distraction, le système audio/navigation. Celui-ci fait peau neuve et intègre une surface tactile de 6,2 po. Sa dimension est plutôt modeste par rapport à celle proposée à bord de l'Accord (8 po).

Sur la route

Comme par le passé, deux motorisations s'offrent d'animer ces deux intermédiaires. Chez Subaru, les modèles 2.5i adoptent un quatre-cylindres à plat de 2,5 L, tandis que les 3,6 retiennent les services d'un six-cylindres à cylindres horizontaux. Des deux, le 2,5 est celui qui fait l'objet de raffinements. Son poids a été revu à la baisse, un nombre de chevaux à la hausse et les motoristes promettent une courbe de puissance plus linéaire encore. Mais point d'injection directe. La boîte à variation continue (CVT) fait l'objet, elle aussi, de certaines améliorations dans le but de réduire la friction entre ses composantes et du coup améliorer la consommation.

Au terme d'une longue période de stagnation, Honda révise ses motorisations. Ses quatre cylindres surtout. Le moteur de série de l'Accord demeure un 2,4 L, mais celui-ci obtient la «sacro-sainte» injection directe, ingrédient aujourd'hui jugé indispensable pour abaisser la consommation et les émissions. En outre, pour la première fois de son histoire, l'Accord adopte, elle aussi, une boîte CVT. Au catalogue, on retrouve également un V6 3,5 L de 278 chevaux.

Les présentations maintenant faites, sur la route, cela ressemble à quoi? L'Accord démontre dès les premiers tours de roue sa supériorité sur la Legacy. Son moteur fait preuve de plus de tonus et sa boîte CVT offre un rendement quasi irréprochable. Les accélérations sont franches; les reprises, solides. Plus lourde il est vrai, la Legacy se trouve à la peine. Son moteur transmet sans doute moins de vibrations et tourne sans histoire, mais la courroie de la boîte CVT semble l'étrangler.

Sur la route, l'Accord offre une expérience de conduite plus attrayante, plus souple. D'abord, les changements de trajectoire sont non seulement plus précis, mais aussi plus rapides. Les mouvements de caisse sont mieux contrôlés et le freinage est plus endurant que celui de sa rivale, et également plus facile à doser. En revanche, conduite avec plus d'enthousiasme, la Honda se révèle moins neutre que sa rivale et affiche une plus grande propension au sous-virage.

L'Accord procure un confort de roulement supérieur sur une chaussée en bon état grâce à un combiné ressort-amortisseur plutôt souple en détente. En revanche, la Legacy offre un court rayon de braquage, de sorte que les manoeuvres sont plus faciles qu'avec la Honda.

L'arme secrète de la Legacy demeure ici son rouage intégral. Celui-ci offre non seulement une sécurité accrue sur une chaussée à faible coefficient d'adhérence, mais aussi une motricité digne d'une chenillette lorsque vient le moment de sortir d'un banc de neige. C'est ici que la Legacy brouille les pistes: voiture d'apparence banale; éloignée du folklore archétypal de la berline intermédiaire, mais remarquablement alerte dans des conditions de circulation extrêmes; pourvue d'une mécanique pas vraiment à la pointe de la technologie, mais originale et efficace. C'est ce cocktail à contre-courant de la trop stricte rationalité standardisée des modèles de grande diffusion qui fait le charme paradoxal de cette marginale qui ignore l'esbroufe et cache son jeu. Seul ennui: l'hiver ne dure pas toujours et l'homogénéité supérieure de l'Accord lui assure la victoire de ce duel.

Fiche technique - Subaru Legacy (2e)

> Marque/Modèle : Subaru Legacy

> Fourchette de prix ; 23 495$ à 34 195$

> Coût de transport et préparation : 1595$

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation réelle : 10,2 L/100 km *

> Pour en savoir plus : www.subaru.ca

* conditions hivernales

> Moteur : H4 DACT 2,5 litres

> Puissance : 175 ch à 5800 tr/min

> Couple : 174 lb-pi à 4000 tr/min

> Rapport poids-puissance : 8,81 kg/ch

> Poids : 1543 kg

> Mode : Intégral

> Transmission de série :Manuelle 6 rapports

> Transmission optionnelle : Automatique CVT

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/11,2

> Freins (av-arr) : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 225/55R17

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 70 litres/Ordinaire

Fiche technique - Honda Accord (1re)

> Marque/Modèle : Honda Accord

> Fourchette de prix : 24 050$ à 34 130$

> Coût de transport et préparation : 1828$

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation réelle : 9,7 L/100 km *

> Pour en savoir plus: www.honda.ca

* Conditions hivernales

> Moteur : L4 DACT 2,4 litres

> Puissance : 185 ch à 6400 tr/min

> Couple : 181 lb-pi à 3900 tr/min

> Rapport poids-puissance : 7,92 kg/ch

> Poids : 1466 kg

> Mode : Traction

> Transmission de série: Manuelle 6 rapports

> Transmission optionnelle : Automatique CVT

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/11,6

> Freins av-arr: Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 215/55R17

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 65 litres/Ordinaire