L'air de rien, le F-150 de Ford a terminé au quatrième rang des véhicules les plus vendus au Québec l'an dernier. La camionnette américaine se trouvait alors seulement devancée par la Civic, l'Elantra et la Corolla. Cela en dit long sur le pouvoir de séduction de ce modèle dont la 13e génération apparue cette année lance une série d'avancées techniques susceptibles de déstabiliser une clientèle conservatrice. Au fait, c'est chanceux, le chiffre 13?

Le Québec adore le F-150, et le reste de l'Amérique également. Au cours des 37 dernières années, cette camionnette grand format a terminé 32 fois en tête du palmarès des ventes, toutes catégories confondues. Et plus étonnant encore, de ce nombre, la vaste majorité des F-150 qui sillonnent nos routes ne transportent ni madriers ni boîtes à outils en permanence, rapporte le constructeur à l'ovale bleu.

Le F-150 fait tourner à plein régime deux usines d'assemblage et représente, sans en douter, une formidable machine à sous pour son constructeur. Ce dernier ne cache pas qu'il compte beaucoup sur les profits qu'il génère pour mener à terme le développement de ses autres produits. D'ailleurs, selon un analyste de la firme Morgan Stanley, chaque unité du F-150 rapporte entre 8000 $ et 10 000 $ de profits. Dès lors, on comprend l'enjeu que représente la refonte de ce modèle.

Les mauvaises langues ne manqueront pas de relever que le défi n'est pas aussi grand qu'il paraît en raison de la fidélité - supérieure à 80% - des consommateurs dans ce segment. En clair, si on achète un F-150, c'est pour la vie. Enfin presque. Mais, qu'à cela ne tienne, tous les acteurs de cette catégorie doivent prendre des risques. Il n'y a aucune issue possible. Les normes imposées par les législateurs en matière de sécurité et d'environnement (obligation de réduire substantiellement la consommation de carburant) les y obligent. Et naturellement, il y a la concurrence aussi qui ne cesse de s'intensifier.

Dans ce contexte, la Ford Motor Company n'a d'autre choix que d'innover et, du même coup - et c'est là le plus difficile -, convaincre sa clientèle du bien-fondé de ses choix techniques. Comme celui d'enrober cette camionnette d'aluminium, par exemple. Une option audacieuse à plus d'un titre. Ce métal coûte plus cher que l'acier (même celui à haute densité) et son assemblage est plus complexe. Sa réparation aussi. Toutefois, sur ce plan, le constructeur se veut rassurant. Les prix des pièces de remplacement sont similaires et son réseau de distribution a été spécialement formé pour intervenir.

L'utilisation de l'aluminium comporte néanmoins plusieurs avantages. Et le plus important de tous est une réduction appréciable du poids (environ 300 kilos). Plus légère, cette camionnette peut dès lors contenir sous son capot des mécaniques plus frugales, sans compromettre sa capacité de charge, bien au contraire. En effet, selon la configuration retenue, le nouveau F-150 peut tracter davantage que son prédécesseur.

Des goûts de luxe

Cela dit, s'il y a longtemps que vous n'avez pris place dans un pick-up, vous serez agréablement surpris par la Série F, qui n'a rien de rustique. Dans sa livrée Platinum, la plus cossue et la plus chère, le F-150 a de quoi faire rougir tout le beau linge de l'industrie. Tout y est pour rendre les heures passées à bord agréables: système de divertissement sophistiqué, sellerie de cuir, sièges chauffants. Mais si cette version fait étalage de toutes les petites douceurs du F-150, il n'en demeure pas moins fort peu représentatif des habitudes d'achat des consommateurs, comme en fait foi son prix (plus de 70 000 $). De toutes les livrées offertes (et Dieu sait qu'il y en a), la Lariat semble la plus homogène de toutes.

Cela dit, la liste d'accessoires du Platinum est aussi longue que celle que l'on vous remet à l'épicerie, et il vous faudra sans doute plusieurs heures pour la passer en revue. Les portières s'ouvrent sur un environnement soigneusement confectionné. Baquets convenablement sculptés, position de conduite dominante, tableau de bord costaud, instrumentation complète et commandes bien disposées, cette camionnette nous fait découvrir, au fil des kilomètres, un habitacle à la fois moderne, convivial et confortable pour cinq personnes.

Mais l'intérêt d'une camionnette, n'est-ce pas sa benne? Celle du F-150 promet d'être plus accueillante que celles des concurrents en raison de ses parois plus hautes et aussi par son hayon suffisamment léger pour qu'il ne tombe pas sur le pare-chocs arrière comme une tonne de briques. D'ailleurs, il est possible d'ouvrir, de verrouiller et de déverrouiller le battant à distance. On peut également tout compartimenter grâce à de savantes options qui se retrouvent au catalogue.

En revanche, il y a à redire aux marchepieds qui se trouvent de chaque côté de la benne. Non seulement ceux-ci se rétractent difficilement sous la paroi du camion (le froid qui sévissait durant notre essai?), mais ils avaient aussi la fâcheuse tendance à s'éjecter de leur réceptacle. De sorte qu'à certains moments, l'une de ces «marches» prenait l'air à notre insu et risquait de se faire endommager dans les passages étroits.

Des tonnes de configurations

L'horreur ou la beauté, c'est selon, du merveilleux monde de la camionnette, c'est la possibilité de s'en faire construire une presque sur mesure. À moins de chercher de quoi occuper vos soirées estivales ou de savoir exactement ce que vous voulez, il y a de fortes chances que vous acquériez celle qui se trouve sur le terrain du concessionnaire de votre choix.

Pour être franc, il est impossible de passer en revue toutes les combinaisons proposées par la Série F, et encore moins de porter un jugement définitif sur chacune d'entre elles compte tenu des multiples options offertes. Cette mise en garde étant faite, concentrons-nous sur la version Platinum essayée, laquelle étrenne un moteur V6 suralimenté de 3,5 litres qui n'éprouve aucun problème à mouvoir cette camionnette, même lorsque chargée à bloc. La présence de cette mécanique entraîne un débours supplémentaire (900 $), mais vaut mieux que le V85 litres offert de série, ne serait-ce qu'en raison de sa consommation de carburant légèrement inférieure. Il s'agit du meilleur choix si la capacité de remorquage figure au sommet de vos critères d'achat.

Dans le cas contraire, les performances du 2,7 litres Ecoboost suffisent largement pour transporter tout le matériel que vous avez l'habitude d'acheter la fin de semaine dans les quincailleries de grande surface. Et vous économiserez doublement avec le 2,7 litres qui se retrouve sous le capot des versions financièrement plus accessibles (de série sur le Lariat) puisqu'il consomme moins grâce notamment à un dispositif de coupure automatique à l'arrêt.

Plus massif que son prédécesseur, le F-150 offre une position dominante sur tout ce qui l'entoure et se déplace avec autant de discrétion qu'une bonne berline de luxe. Outre le silence de roulement, on retient également la présence d'une direction à pignon et crémaillère précise qui lit avec une acuité certaine les ondulations de la route. La rigidité de son châssis ne fait aucun doute, pas plus que le manque de souplesse de ses éléments suspenseurs (le véhicule d'essai était équipé du groupe FX4). Dans ce domaine, le Ram et dans une moindre mesure le duo Silverado/Sierra de GM lissent mieux les irrégularités de la chaussée.

Diamètre de braquage

La présence d'une caméra périphérique rassure certes, tout comme la légèreté de la direction, mais cela ne fait pas du F-150 un modèle d'agilité pour autant. Le diamètre de braquage est immense, et garer cette camionnette en milieu urbain représente toujours un défi, voire un casse-tête. Toutefois, dès que l'horizon se dégage, le F-150 se fait apprécier pour sa stabilité. Agréable en utilisation quotidienne, le F-150 affiche un comportement tout à fait civilisé. Enfin, côté freinage, le F-150 s'immobilise sur une distance raisonnable et résiste plutôt bien à l'échauffement.

Si la version Platinum met des paillettes dans les yeux, les autres déclinaisons financièrement plus accessibles représentent sans l'ombre d'un doute celles avec lesquelles il faut prendre rendez-vous. Ces dernières ne croulent pas sous les accessoires et tirent un bien meilleur parti du défi technique (choix de l'aluminium et mécanique suralimentée d'une cylindrée réduite) relevé - avec succès - par cette 13e génération.

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L'essentiel

> Marque/Modèle : Ford F-150

> Fourchette de prix : 24 899 $ à 62 499 $

> Frais de transport et de préparation : 1700 $

> Version essayée : Platinum

> Garantie de base : 3 ans/60 000 km

> Consommation réelle : 12,6 L/100 km

> Visible dans les concessions : Maintenant

> Pour en savoir plus : www.ford.ca

Technique

> Moteur : V6 DACT 3,5 litres turbocompressé

> Puissance : 365 ch à 5000 tr/min

> Couple : 420 lb-pi à 2500 tr/min

> Rapport poids-puissance : 5,83 kg/ch

> Poids : 2130 kg (SuperCrew 4x4)

> Mode : 4x4

> Transmission de série : Automatique à 6 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage : Crémaillère/15,5 m (SuperCrew)

> Freins av.-arr. : Disque/Disque

> Pneus av.-arr. : 275/55R20

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 136 litres/Ordinaire

> Capacité de remorquage maximale : 3447 kg (3,5 litres EcoBoost)

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On aime

> Conception avant-gardiste

> V63,5 litres Ecoboost impressionnant 

> Position dominante sur la route

On aime moins

> Coût des versions Lariat et King Ranch

> Poids moins réduit que prévu

> Diamètre de braquage surréaliste