Ils lèvent les yeux au ciel, haussent les épaules et assurent qu'il n'y a «pas lieu de s'en inquiéter». Pourtant, les adversaires de Honda n'ont pas fini d'entendre parler de cette seconde mouture du Ridgeline. De sa façon d'occuper la scène sans avoir à jouer les gros bras, de ses astuces et de sa manière bien à lui de procurer du plaisir au volant, même avec une benne remplie à ras bord.

À première vue, les codes auxquels doit sacrifier la camionnette (la grosse comme la petite) n'ont guère évolué. Il lui faut appartenir à une marque dont la légitimité procède de son ancrage dans l'histoire, évoquer davantage la robustesse que la fragilité et se tenir au-dessus des modes passagères. À défaut d'avancer de telles références, impossible d'accéder au gotha de la catégorie sur lequel règne à l'heure actuelle le cartel GM, Nissan et Toyota. L'accès au monde de la camionnette est sévèrement verrouillé. Pour preuve, les ventes passées du Ridgeline ont été assez marginales, merci.

Pourtant, la direction de Honda demeure convaincue qu'une révolution, lente, mais bien réelle, est en marche. Elle est assurément très lente puisque le Ridgeline n'a séduit qu'un peu plus de 32 000 Canadiens en 10 ans. C'est peu, mais Honda prétend qu'au-delà des chiffres de vente, il y a la profitabilité. Celle-ci est apparemment assez juteuse pour permettre à Honda de poursuivre ses activités dans ce créneau et de renouveler son offre. D'ailleurs, faut-il le rappeler, le Ridgeline n'a pas besoin de faire tourner une usine à pleine vapeur pour être rentable. Son ADN technique comporte en effet plusieurs similarités avec d'autres véhicules existants (Pilot, MDX et le futur Odyssey) de la gamme, ce qui explique sa rentabilité aux yeux du constructeur et apporte un gage de fiabilité aux consommateurs.

Comme une auto

Par rapport au modèle qu'il remplace, le nouveau Ridgeline est plus long et fait table rase des originaux montants qui surélevaient autrefois sa benne au profit de longerons aux formes plus classiques. Dommage, car ces appendices apportaient une dose d'excentricité.

Pas de marchepieds gênants ou de garde au sol démesurée, on accède à la cabine du Ridgeline sans effort, comme avec une Civic. On s'étonne ensuite de la qualité des sièges avant - quoique le tissu respire mal - et du souci apporté à la fabrication. Hormis l'ergonomie décevante de l'écran tactile posé dans la partie centrale, l'absence de boutons (celui du volume de la radio, par exemple) et une décoration un peu terne, rien vraiment à reprocher. La position de conduite est agréable et la visibilité est bonne. Plus surprenant encore est l'espace offert par cette cabine qui accueille confortablement cinq personnes. Soyez prévenu, cependant : l'accès est tout de même difficile en raison de l'étroitesse des portières arrière. Pour ajouter à la modularité de l'habitacle, le Ridgeline permet d'escamoter en tout ou en partie l'assise de la banquette pour faciliter le chargement d'objets lourds ou encombrants. Il y a même suffisamment d'espace en dessous pour y glisser un sac de golf, voire une petite échelle.

Comme pour le modèle antérieur, l'originalité du Ridgeline repose sur sa polyvalence. D'abord le battant qui permet, en un tournemain, de l'ouvrir sur deux axes pour faciliter le chargement. À cela s'ajoute un coffre taillé dans le plancher de la benne où séjournent également la roue de secours et sa quincaillerie. 

La benne à proprement parler offre une surface de chargement plus longue que les modèles concurrents (en configuration standard) et a la particularité de pouvoir loger un panneau de 4 x 8 bien à plat entre les puits de roue. Une performance unique dans ce segment. 

En revanche, en raison de sa suspension arrière indépendante, le seuil demeure légèrement plus élevé que celui de ses rivaux, ce qui a pour effet de rendre le chargement plus compliqué.

Mais toutes ces astuces ont un prix. Par rapport à la concurrence, le Ridgeline coûte cher. Il est juste de dire que cette camionnette comporte une longue liste de caractéristiques de série, mais encore. La plus accessible financièrement des déclinaisons (LX) limite l'acheteur à deux options de teintes extérieures et exige un déboursé additionnel pour obtenir des capteurs de stationnement. Même si elle n'est guère plus colorée, la version Sport apparaît comme l'occasion à saisir parmi toutes les livrées offertes en tenant compte d'un rapport prix/accessoires et de la valeur résiduelle estimée dans quatre ans.

Pas de casse-tête

Contrairement à ses concurrents, le Ridgeline ne représente pas un casse-tête d'achat pour l'acheteur. Uniquement offerte en version Cabine multiplace grimpée sur un rouage à quatre roues motrices, cette Honda s'anime d'un V6 de 3,5 L auquel s'arrime une boîte de vitesses automatique à six rapports. Les performances de ce groupe motopropulseur sont honorables. Hélas, il faut pratiquement se trouver debout sur la pédale d'accélérateur pour en tirer toute la quintessence et réveiller la transmission qui suçote tranquillement ses vitesses.

Comme dans le modèle antérieur, la benne du Ridgeline forme un tout avec la cabine. Le principal avantage de cette conception - que l'on ne retrouve actuellement nulle part ailleurs - est d'offrir un ensemble particulièrement rigide. Cela se traduit par un comportement routier plus équilibré, plus sûr et surtout plus confortable.

Doté d'un rouage intégral électronique, le Ridgeline permet de verrouiller le différentiel arrière, mais n'offre pas une sélection de rapports courts pour la piste, la neige et la boue. Toutefois, sa garde au sol est suffisamment élevée pour que l'on ne craigne pas d'emprunter chemins et sentiers peu accidentés. Sur ce type de terrain, la concurrence fait mieux. Tout comme en matière de capacité de remorquage qui, chez le Ridgeline, est immuable.

Sur une route asphaltée, le Ridgeline n'a pas les manières souvent un peu rustres des autres camionnettes. La caisse prend une pincée de roulis, mais la direction s'avère précise et correctement assistée et nous fait totalement oublier que l'on se trouve aux commandes d'un véhicule pesant deux tonnes. On regrettera cependant que le rayon de braquage soit aussi grand et qu'il pénalise l'automobiliste quand vient le moment de garer et que le freinage manque d'endurance.

Polyvalent et astucieux, le Ridgeline aura sans doute encore du mal à convaincre les amateurs purs et durs de camionnettes. Il pourrait toutefois très bien asseoir à ses commandes des clients qui n'auraient jamais cru un jour apprécier les vertus d'un tel véhicule.

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Fiche technique

L'ESSENTIEL

Marque/Modèle: Honda Ridgeline 2017

Fourchette de prix: 36 590 $ à 48 590 $

Frais de transport, de préparation et du concessionnaire: 1851 $

Garantie de base: 3 ans/60 000 km

Consommation réelle: 11,4 L/100 km

Pour en savoir plus: www.honda.ca

Concurrentes à surveiller: Chevrolet Colorado, Nissan Frontier, Toyota Tacoma

TECHNIQUE

Moteur: V6 DACT 3,5 L

Puissance: 280 ch à 6000 tr/min

Couple: 262 lb-pi à 4700 tr/min

Poids: 2015 kg

Rapport poids/puissance: 7,19 kg/ch

Mode: Intégral

Transmission de série: Automatique à six rapports

Transmission optionnelle: Aucune

Direction/Diamètre de braquage: Crémaillère/12,4 m

Freins av.-arr.: Disque/Disque

Pneus av.-arr.: 245/60R18

Capacité du réservoir/Essence recommandée: 73,8 L/Ordinaire

Capacité de remorquage maximale: 2268 kg

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On aime

Conception originale et décalée

Confort de roulement

Agrément de conduite

On aime moins

Configuration unique

Freinage moyen

Prix