Un Grand Cherokee musclé et athlétique ? Il était temps que Jeep y pense. BMW, Mercedes, Porsche et Range Rover proposent depuis un bon moment déjà - et avec étonnamment de succès - des sportives qui se pilotent en altitude.

Conscient que le Grand Cherokee se trouve en fin de carrière et qu'il faut parfois user de quelques artifices pour entretenir l'intérêt du public, le Trackhawk joue la carte de la démesure plutôt que du raffinement pour se joindre à ces utilitaires spéciaux et spécieux...

Disons-le tout net, le Grand Cherokee de Jeep n'est pas tombé de la dernière pluie. La mise en service de la génération actuelle remonte à 2011 et elle peut difficilement soutenir la comparaison avec des utilitaires plus jeunes et plus modernes. Les transformations apportées au fil des ans ont été généralement d'ordre purement esthétique. Du côté mécanique, c'est le calme plat. Les moteurs, la transmission et les suspensions n'enregistrent guère d'évolutions.

Pour mieux résister à l'offensive des marques européennes, avantagées par la valeur de revente de leurs véhicules et leur prestige, les firmes généralistes, comme Jeep, contre-attaquent sur le terrain de la connectivité, de la sécurité et de la performance. Sur ce dernier point, le Trackhawk veille à en mettre plein la vue.

UNE FICELLE GROSSE COMME...

La ficelle est aussi grosse que les étriers jaunes partiellement masqués par les rayons des jantes ou les prises d'air qui mitraillent le capot. La direction de Jeep suit la vieille recette de l'industrie automobile qui consiste à prendre un véhicule qui n'est pas de première jeunesse, à lui administrer un traitement « m'as-tu vu passer » (roues de 20 po, bas de caisse moulés, décalcomanies criardes) et à placer sous le capot un moteur de 707 ch qui échouerait à un contrôle antidopage si ce test existait dans le milieu automobile. Agitez bien fort et, à la sortie de la chaîne d'assemblage, apposez le sigle évocateur « Trackhawk ». Vous obtenez alors un véhicule sport grimpé sur des échafauds. L'idée n'est pas vilaine, mais manque cruellement de raffinement dans ce cas-ci.

Comprenons-nous bien, le Trackhawk répond aux attentes. Il signe des temps d'accélération et de reprise dignes d'un dragster, mais comme pour ce type de véhicules, la magie n'opère qu'en ligne droite... Dans les courbes et sur des routes publiques où le revêtement n'est jamais aussi lisse qu'en circuit, ce Jeep devient vite lassant à conduire. Ses éléments suspenseurs, pourtant paramétrables, ne comptent aucun réglage qui les assouplisse suffisamment pour éviter qu'ils se braquent sur la moindre imperfection. La direction est superbement assistée, la boîte de vitesse fait de son mieux pour suivre le rythme. Et, en dépit d'un sous-virage gênant à vitesse élevée (une partie de cet essai a été réalisée sur un circuit), le Trackhawk enfile les virages avec assurance, pour peu - il importe encore de le rappeler - que la route soit correctement asphaltée. Sans quoi, plusieurs corrections au volant s'imposent.

À la longue, la sécheresse de la suspension, les bruits mécaniques et le sifflement du compresseur sont éprouvants.

Mais ce qui serait catalogué comme un défaut à bord d'un véhicule plus ordinaire contribue au contraire à rendre celui-ci plus attachant, du moment que l'on occupe le siège du conducteur.

C'est vrai qu'au terme d'une journée de conduite, on se sent épuisé. On ne rêve plus que de se prélasser à bord d'un utilitaire plus docile, moins contraignant et surtout moins assoiffé de pétrole. À ce chapitre, le Trackhawk est « champion » avec des moyennes dépassant allègrement les 21 L/100 km. Et merci de l'abreuver de super.

AVEC LES MOYENS DU BORD

Puisque l'univers de la voiture exige toujours plus de diversité et que la durée de vie des modèles raccourcit sans cesse, Jeep fait avec les moyens du bord. Et un petit goût de revanche face aux Mercedes, BMW et Range Rover de ce monde qui proposent toutes des modèles aussi extravertis. Juste pour le plaisir d'aller provoquer celles-ci sur leur propre terrain, telle est la raison d'être de ce Trackhawk.

Face à des concurrents qui ne cessent de grandir, l'habitacle du Trackhawk, pourtant tiré à quatre épingles, reste impersonnel et étriqué. La qualité des revêtements est agréable, mais considérant le prix d'entrée (plus de 100 000 $), on en espérait davantage. Saluons toutefois la qualité et la rapidité d'exécution du système d'infodivertissement, lequel n'a rien à envier, bien au contraire, à celles des systèmes des européennes, et l'excellent maintien des sièges avant.

Donc, oui, la ficelle est un peu grosse, mais on a moins envie d'y voir un élémentaire calcul commercial qu'un sursaut d'orgueil de la part d'une firme qui prépare activement une future génération du Grand Cherokee, laquelle reposera cette fois sur une architecture moderne (Alfa Romeo Stelvio), plus légère et plus rigide. D'ici là, le Trackhawk représente une forme de brouillon avant la remise d'une copie au propre.

PHOTO FOURNIE PAR LE CONSTRUCTEUR

Jeep Grand Cherokee Trackhawk


Fiche technique

L'essentiel 

Marque/modèle : Jeep Grand Cherokee Trackhawk

Prix de détail suggéré : à partir de 110 845 $

Frais de transport et de préparation : 1895 $

Garantie de base : 36 mois/60 000 km

Consommation réelle : 16,8 L/100 km

Chez les concessionnaires : maintenant

Concurrents : BMW X5 M, Mercedes AMG GLE 63 S

Pour en savoir plus : https://www.jeep.ca/fr/grandcherokee

Technique

Moteur essence : V8 6,2 L suralimenté

Puissance : 707 ch à 6000 tr/min

Couple : 645 lb-pi à 4800 tr/min

Poids : 2429 kg

Rapport poids/puissance 3,44 kg/ch

Mode : quatre roues motrices

Transmission de série : automatique 8 rapports

Transmission optionnelle : aucune

Diamètre de braquage : 11,6 m

Freins (av.-arr.) : disque-disque

Pneus (av.-arr.) 295/45ZR20

Capacité du réservoir : 93,1 L

Essence recommandée : super

On aime

Le coup de pied aux fesses à l'accélération

Du sport en toute saison

Une voiture sport polyvalente

On aime moins

Consommation déraisonnable

Suspension inadaptée à notre réseau routier

Modèle vieillissant

PHOTO FOURNIE PAR LE CONSTRUCTEUR

Le V8 suralimenté du Jeep Grand Cherokee Trackhawk

PHOTO FOURNIE PAR LE CONSTRUCTEUR

L'habitacle du Grand Cherokee Trackhawk