Un nouveau départ pour Lincoln. Un de plus... Régulièrement, la filiale de luxe de Ford nous annonce que l'heure du renouveau a sonné, qu'elle a enfin trouvé la bonne équation. Cette fois, c'est sur la nouvelle MKC - un utilitaire compact sur la même base technique que l'Escape - que reposent les ambitions de cette marque qui ne sait encore si elle pourra célébrer son centenaire en 2017.

Mis en demeure par Ford de cesser de perdre de l'argent, Lincoln joue une partie importante lors du lancement de chaque modèle. La MKC, pense-t-on, fera mieux et devrait permettre - enfin - à cette marque de luxe américaine de franchir le cap des 100 000 unités vendues dans son marché intérieur, ce qu'elle n'a pas fait depuis 2008. Aussi bien dire une éternité.

Le problème principal de Lincoln, ce n'est pas tant sa (trop) grande proximité technique avec les produits Ford, que son manque chronique d'identité. Qu'est-ce qu'une Lincoln aujourd'hui? Incarne-t-elle le chic ou le kitsch à l'américaine?

Encore merci Ford!



Comme ses concurrents, Lincoln sous-traite une grande partie de ses composantes techniques et mécaniques à Ford. Il serait injuste de lui en tenir rigueur, tout le monde fait de même. Enfin presque. L'art ici est de s'assurer que le consommateur associe ce qu'il voit, touche ou ressent avec un modèle populaire. Le MKC accomplit brillamment cette mission et pas seulement sur le plan du style. Dans ce domaine, cet utilitaire reprend à son compte tous les codes visuels de la marque. Et pour les intégrer tous, elle va jusqu'à raccourcir, par exemple, les piliers de son toit pour mieux faire fondre la taille de ses glaces.

Le MKC repose sans doute sur un empattement identique à celui de l'Escape, mais la Lincoln est plus imposante en longueur comme en largeur. Elle compte en effet sur des voies plus larges - gage d'une meilleure tenue de cap -, lesquelles ont entraîné une révision de la géométrie des trains roulants.

Au final, le MKC est plus massif, plus lourd et (un brin) moins logeable que son cousin de chez Ford. À l'intérieur, les assises ont été implantées plus près du plancher pour masquer voire enrayer ce déficit d'espace, mais cela ne change rien au volume du coffre. Celui-ci accuse un recul pouvant atteindre 424 L. Dans ce domaine, Lincoln n'applique en rien les principes du Bauhaus où la forme dicte la fonction.

Bois, cuir et boutons-poussoirs



De l'extérieur, le MKC est d'une élégance certaine, mais le charme perd de sa magie dès que s'ouvrent les portières. L'habitacle s'habille de placages de (vrai) bois apposés sur des surfaces dont l'apparence et le grain évoquent trop le vinyle. En revanche, la qualité de l'assemblage ne s'attire aucune critique particulière.

L'instrumentation est bien disposée, classique, élégante, mais déjà vue. Tout comme ces boutons-poussoirs - nouvelle lubie de la marque - alignés comme une parade contre le flanc de la partie centrale du tableau de bord. A priori, cette disposition permettait de ménager plus de rangements au pied de la console. Hélas, celle-ci demeure d'une facture très classique avec ses deux porte-gobelets et son réceptacle taillé sur mesure pour recevoir un cendrier... Sur le plan de l'ergonomie, on reprochera au MKC le peu de visibilité du bouton de démarrage; et d'allonger l'assise des sièges pour offrir un meilleur maintien pour les cuisses.

À la puissance turbo 



On sait déjà que le MKC promet une stabilité accrue en raison de ses voies plus larges. Bien vu. Mais il y a plus. Par rapport à l'Escape, par exemple, cette Lincoln adopte le dispositif ACC qui permet de paramétrer le dynamisme ou la souplesse du MKC en fonction des conditions d'utilisation. Trois options existent: Normal, Confort ou Sport. Autre particularité propre au MKC, la dimension des disques de frein à l'avant surpasse celle de l'Escape, mais l'étrier ne compte toujours qu'un seul piston.

Pour animer le MKC, Lincoln étrenne un tout nouveau quatre-cylindres de 2,3 L. issu de la famille Ecoboost (lire suralimenté par turbocompresseur), ce moteur se glissera notamment sous le capot de la future Mustang. Et cette dernière ne sera pas la seule à en bénéficier. Mais pour l'heure, ce 2,3 L anime seulement le plus cossu des MKC. Le modèle d'entrée de gamme, lui, mise sur un 2 L turbo de 240 chevaux.

Dans un cas, comme dans l'autre, une boîte semi-automatique à six rapports relaie la puissance aux (quatre) roues motrices. En effet, contrairement au marché américain, les Canadiens n'auront accès qu'aux MKC dotés d'un rouage intégral.

La question à 10 000$



À ce stade-ci, la question se pose: quel moteur choisir? La tentation est grande d'opter pour le 2,3 L en raison de sa puissance et de son couple plus élevé, mais à la réflexion ce choix paraît discutable et voici pourquoi. D'abord, même si le 2,3 L dérive d'une mécanique existante, sa fiabilité n'a pas encore été totalement éprouvée. Ensuite, il commande une ribambelle d'accessoires pour un supplément d'une prime de quelque 10 000$. Enfin et contre toute attente, le 2,3 L possède une capacité de remorquage inférieure au 2 L.

Il faut toutefois résister à l'idée de faire de la consommation de carburant un facteur de différenciation. Faute d'avoir été en mesure d'établir une comparaison directe entre ces deux moteurs, prêtons foi aux chiffres publiés par le constructeur. Ce dernier fait état d'un écart de moins de 1 L/100 km entre ces deux mécaniques qui, rappelons-le, préfèrent de l'essence Super.

Le seul réel avantage du 2,3 L se mesure chronomètre en main. Est-ce bien justifié de dépenser 10 000$ pour mettre une seconde et quelques dixièmes de plus pour atteindre 100 km/h?

Valeur ajoutée?



Puisque Lincoln n'est pas la première ni la dernière marque à débarquer dans ce segment, on serait porté à l'excuser de ne pas en faire assez. Cependant, face à l'urgence de redresser ses ventes, cette filiale de Ford manque ici une occasion favorable de frapper de plein fouet la concurrence, de marquer les esprits.

Force est de reconnaître que Lincoln a consenti un bel effort. Mais il n'est pas interdit de chicaner sur l'évanescence de sa direction à assistance électrique; les étourderies de sa boîte ou son excès de poids qui altère son agilité. Voilà ce que l'on ressent en mode Confort. En optant pour le mode Sport, le MKC se crispe, pompe ses muscles. La direction apparaît alors plus directe, sa transmission plus réactive, mais le sentiment est que tout cela apparaît bien artificiel par rapport aux ténors de la catégorie.

Le 2,3 L a suffisamment de souffle pour entraîner le MKC sans effort, mais il manque de souplesse à bas régime et d'une voix plus mélodieuse. La consommation relevée apparaît toutefois importante et la faible contenance de son réservoir de carburant pénalise son autonomie.

En paramétrant sa suspension correctement, le MKC brille. Moins tape-cul que bon nombre de ses concurrents, il assure un confort de tout premier ordre. De fait, le MKC efface sans peine les irrégularités de la chaussée rencontrée par ses immenses roues de 19 po.

Le dernier mot



Le MKC représente assurément une meilleure valeur qu'un Ford Escape Titanium ou que tous les autres utilitaires suréquipés de sa taille. Sa garantie généreuse, son réseau de concessionnaires motivé et la richesse de sa présentation en font un achat à considérer. Une condition cependant: il faut limiter son choix au modèle de base équipé du moteur 2 L.

L'essentiel

> Fourchette de prix : 39 940 $ à 49 050 $

> Frais de transport et préparation : 1750$

> Garantie de base : 4 ans / 80 000 km

> Consommation obtenue lors de l'essai : 12,6 L / 100 km

> Pour en savoir plus : www.lincolncanada.com

> Principales concurrentes : Acura RDX, Audi Q5, Lexus NX

Fiche technique

> Moteur : L4 DACT 2,3 litres suralimenté

> Puissance: 285 ch à 5500 tr/min

> Couple: 305 lb-pi à 2750 tr/min

> Poids : 1 809 kg

> Rapport poids-puissance 6,34 kg/ch

> Mode : Intégral

> Transmission (série) : Semi-automatique 6 rapports

> Transmission (optionnelle) : Aucune

> Direction / braquage : Crémaillère / 11,5 mètres

> Freins (av-arr) : Disque / disque

> Pneus : 245/45R19

> Capacité: 59 litres

> Type de carburant : Super

On aime

> Confort et silence de roulement 

> Garantie généreuse

> Rapport prix / accessoires compétitifs

On aime moins

> Consommation élevée et autonomie limitée

> Assise des sièges trop courtes

> Poids élevé