La marque a connu l'échec, mais contre toute attente, l'étiquette, elle, a survécu. Désormais, et au même titre que sa filiale AMG, la signature Maybach (prononcez Mï Bak) costumera - autant que faire se peut - certaines créations de Mercedes-Benz. Financièrement, l'idée se défend, mais le constructeur allemand pèche-t-il par orgueil?

Consciente que son étoile n'aveugle pas autant que le B ailé de Bentley ou la Spirit of Ectasy de Rolls-Royce, deux marques aujourd'hui propriétés respectivement du groupe Volkswagen et de BMW, la direction de Mercedes relance - à la surprise générale - la Maybach.

Pour mémoire, rappelons qu'il y a trois ans, le groupe Daimler a glissé sous la porte la clé de cette firme qui était censée incarner la richesse et l'opulence. En 10 ans de production, Maybach a construit quelque 3200 de ses carrosses. À titre de comparaison, cela équivaut sensiblement à la quantité de Rolls-Royce vendues l'année dernière...

Soucieux d'être le maître incontesté du haut de gamme - voilà pour le péché d'orgueil, car Mercedes a vendu au cours de la dernière année plus de 100 000 Classe S, soit plus que l'addition des ventes de ses concurrentes directes, l'Audi A8 et la Série 7 de BMW -, le groupe Daimler ranime donc Maybach. Une appellation dont personne - en dehors sans doute des historiens de l'automobile et de quelques têtes grises en Allemagne - n'a jamais entendu parler.

Rappelons que Karl Wilhelm Maybach (1846-1929) a construit en 1901 la première Mercedes, à la demande de Gottlieb Daimler. Avec son fils Karl, il a fabriqué ensuite des moteurs de zeppelins puis, sous la marque Maybach, de 1919 à 1941, environ 1800 véhicules de grand luxe, dont la plupart se sont retrouvés aux mains des empereurs, des rois et des acteurs. Bref, rien pour écrire un bouquin.

200 millimètres

L'aventure Maybach a laissé un goût amer et la direction de Daimler a trouvé une façon habile de la réhabiliter, sans se lancer dans de folles dépenses. À l'image de la filiale DS de Citroën, la marque à l'étoile entend apposer la signature Maybach à certaines de ses réalisations et non plus créer des modèles uniques. Pour l'heure, seule la «majestueuse» Classe S y a présentement droit, mais il n'est pas interdit de penser que cette filiation prestigieuse cascadera sur d'autres produits de la gamme à plus ou moins long terme. L'idée a du bon et permettra à la clientèle la plus aisée de la marque de sortir de l'ordinaire.

Avec la Mercedes-Maybach S600, cela s'annonce plus compliqué. La clientèle risque de voir en elle une Mercedes endimanchée, sans plus. Et elle n'aura pas tort de penser ainsi. Cette «Maybach» est en fait une Mercedes S600 allongée de 200 millimètres et décorée comme un palace.

Longue comme un paquebot, la Mercedes-Maybach compte à son bord quatre fauteuils de première classe. À l'arrière, le dégagement est aussi impressionnant que la possibilité d'incliner le dossier façon classe «affaires» des grandes compagnies aériennes.

On y ajoutera un système audio d'une qualité irréprochable (que dites-vous de 24 haut-parleurs et de 1540 watts?), une insonorisation digne d'un studio d'enregistrement. Et contre toute attente, la qualité des matériaux a encore progressé avec notamment un fini matelassé du plus bel effet pour le tableau de bord et sur les panneaux intérieurs des portières.

Mais au-delà de ces garnitures en trompe-l'oeil, difficile d'oublier que l'on se trouve à bord d'une Classe S, une auto dont la prise en mains n'est pas des plus simples. Bien entendu, son propriétaire (ou son chauffeur, c'est selon) finira - avec l'aide précieuse d'un conseiller des ventes et du manuel de l'utilisateur informatisé - par assimiler l'intégralité des fonctions de sa voiture. Comme ce petit flacon posté dans le coffre à gants, qui embaume l'habitacle de sa subtile et exclusive fragrance appelée Agarwood. Et que dire de ces 14 coussins d'air logés dans les sièges pour vous prodiguer le meilleur des massages, ou de ces accoudoirs chauffants?

L'équipement de la Maybach donne le vertige car rien ne lui a été refusé. En fait, à la réflexion, il n'y a que le champagne que cette Maybach semble incapable de servir. Faux. Les flûtes en argent, dessinées par Robbe&Berking, se trouvent sous l'accoudoir et le petit réfrigérateur logé derrière conserve le précieux liquide bien au frais. Sachez cependant que sa présence ampute sévèrement le volume du coffre.

Elle roule? Non, elle vole!

Connue sous le nom de code W222, cette architecture impressionne aussi par son confort de roulement exceptionnel. Sans lisser pour autant toutes les - toujours trop nombreuses - imperfections de la chaussée québécoise, cette opulente berline semble glisser sur un coussin d'air. Rien ne la perturbe. Enfin presque. Grâce à une caméra placée derrière le pare-brise, la voiture numérise notamment le profil de la chaussée afin d'adapter en un battement de cils les éléments suspenseurs. Selon l'analyse des microprocesseurs, le combiné ressort/amortisseur s'assouplit ou se raffermit. Magique!

Au fil des kilomètres, on se surprend à penser que rien ne pourrait nous arriver à son bord, tant son châssis est robuste et sa tenue de cap, imperturbable. Voilà sans doute les deux plus grandes qualités de cette routière qui avale l'asphalte avec gourmandise. Par rapport à une Rolls-Royce Ghost, l'une de ses rivales, la conduite de la Maybach s'avère plus dynamique, sa direction, plus précise et son train avant, plus directeur.

Dans sa version la plus exclusive, la Maybach cache sous son capot un moteur V12 de 6 litres. Suralimentée par deux turbocompresseurs, cette mécanique surprend par sa souplesse, sa discrétion et ses relances extrêmement musclées. Une boîte automatique l'accompagne et celle-ci égrène ses sept rapports comme un chapelet. Considérant le poids de ce véhicule (estimé à 2 tonnes et demie), on s'étonne toujours qu'il faille 5 petites secondes pour atteindre la vitesse limite permise sur nos voies rapides.

Une version S500 équipée du V8 biturbo à injection directe essence de 4,6 litres sera également proposée. Ce modèle pourra recevoir un rouage d'entraînement à quatre roues motrices (4Matic). La S600, elle, n'est entraînée que par ses roues arrière, ce qui risque de limiter sa diffusion chez nous.

Mercedes souhaite bien évidemment que la signature Maybach soit reconnue comme l'égale des autres marques de prestige, dont la notoriété est pour le moment plus élevée. Mais l'inscription Maybach va-t-elle réellement inciter l'acheteur à signer un chèque représentant au minimum deux fois le montant d'une déjà excellente Mercedes S550 allongée? Toute la question est là. La réponse vous appartient.

Les frais de transport et d'hébergement liés à ce reportage ont été payés par Mercedes-Benz Canada.

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On aime

> La force de couple

> Les places arrière spacieuses

> Le condensé de technologies

On aime moins

> Déguisement peu convaincant

> Coffre peu profond (avec réfrigérateur)

> Exclusive, vraiment?

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Ce qu'il faut retenir

> Marque/Modèle: Mercedes-Maybach S600

> Version à l'essai: S600

> Fourchette de prix: 250 000 $ (estimation)

> Visible dans les concessions: Avril

> Garantie de base: 4 ans/80 000 km

> Consommation réelle: 15,3 L/100 km (estimation)

> Pour en savoir plus: www.mercedes-benz.ca

> Moteur : V12 DACT 6 litres bi-turbo

> Puissance : 523 ch à 4900 tr/min

> Couple : 612 lb-pi entre 1900 et 4000 tr/min

> Rapport poids-puissance : 4,58 kg/ch (estimation)

> Poids : 2400 kg (estimation)

> Mode : Propulsion

> Transmission de série : Automatique 7 rapports (S600)

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/12,3

> Freins (av-arr) : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 245/40R20 - 275/35R20

> Capacité du réservoir/ Essence recommandée : 80 litres/Super