Dans l'univers de la course automobile, on raconte que pour y amasser une petite fortune, il faut en dépenser une grosse. Un adage que Nissan entend démentir en créant la Coupe Micra, ticket d'entrée le plus économique pour goûter aux joies du sport automobile. Dimanche dernier, elles étaient une vingtaine sur le circuit de Mont-Tremblant, pour la manche inaugurale de cette série qui s'annonce l'une des plus animées - et disputées - de l'été. Et après en avoir fait l'essai, l'envie n'en est que plus grande de s'aligner, nous aussi, au départ.

Prendre une auto sympathique et sans prétention sportive, pour en faire une voiture de course financièrement accessible représente une gageure en soi.

D'autant qu'à première vue, les modifications mécaniques paraissent plutôt bénignes. En effet, hormis quelques éléments, cette version de compétition demeure techniquement très semblable aux quelque 10 000 Micra qui circulent actuellement sur les routes canadiennes. Cela s'explique. Le désir de Nissan et du promoteur de la série consistent à créer une série monotype financièrement abordable. L'objectif est atteint.

Moyennant une somme d'un peu moins de 20 000 $, on obtient une Micra homologuée pour la course. Seulement pour la course. En aucun temps il ne sera possible de l'immatriculer en tant que «véhicule de promenade».

Avant d'entrer en piste

Cette irréversible transformation consiste d'abord à dépouiller l'habitacle. Les sièges, la banquette, les panneaux intérieurs des portières, la moquette et le ciel de toit sont évincés.

Seul le tableau de bord demeure bien en place, mais non sans se faire tatouer de nouvelles commandes comme un interrupteur d'urgence permettant à un officiel de couper l'alimentation électrique du véhicule en cas d'accident.

Un baquet de course homologué par la Fédération internationale de l'automobile (FIA) - et doté de glissières pour faciliter la recherche d'une position de conduite agréable - remplace le siège d'origine du conducteur. Ce dernier s'y trouve littéralement ligoté à l'aide d'un harnais à cinq points, lequel se trouve harnaché à une cage de sécurité, aussi réglementaire que l'extincteur boulonné au plancher dénudé. La colonne de direction inclinable en hauteur fixe à son extrémité un volant trois branches au centre duquel ne se déploie aucun coussin de sécurité gonflable. Le pédalier se double d'un nouveau revêtement course, tandis que la glace côté conducteur se masque d'un filet de sécurité.

Sous le capot doublé de loquets, rien. À part le scellé apposé sur certains organes mécaniques - indispensable pour assurer l'équité de cette série - il n'y a rien à voir si ce n'est la présence d'un filtre à air moins restrictif. Le quatre-cylindres qui anime cette Micra est identique à celui de série à la différence que les 109 chevaux qu'il développe ont une masse - une centaine de kilogrammes - moins importante à déplacer. La boîte manuelle à cinq rapports ne fait pas l'objet d'une modification. Le système de freinage adopte des plaquettes et des canalisations plus performantes à l'avant.

Les amortisseurs et les ressorts proviennent de la filiale Nismo (Nissan Motorsport), tandis que l'échappement a été modifié pour viriliser le timbre du quatre-cylindres. Les jantes de 15 po sont spécifiques à la série et celles-ci s'enveloppent de pneumatiques lisses (sec) ou rainurés (pluie) élaborés par Pirelli.

Plus physique qu'il n'y paraît

Cavalerie modeste (109 chevaux), étagement de la boîte trop long et caisse qui exécute de majestueuses révérences dans les courbes ne la font pas paraître pas aussi agressive que les bandes qui peinturlurent sa carrosserie le suggèrent. Et pourtant, au volant, on en a plein les bras et cette Micra est prête à se livrer à l'âpre réalité de la compétition. Une voiture pour tous, prête à prendre le départ sans autre forme, dans le cadre d'un défi monotype des 12 épreuves inscrites à son calendrier.

La facilité d'accéder ou de s'extraire de cette Nissan dépend de votre gabarit. Plus celui-ci est important, plus difficile il sera de vous frayer un passage au travers des tubes qui forment la cage de sécurité. Le baquet est étroit tandis les «oeillères» que dessine le dossier en son sommet et le filet de sécurité qui se dresse de votre côté gauche vous donneront l'impression de vous trouver piégé. On ajuste la position de conduite autant que se peut - le dossier ne se règle pas - avant de se faire épingler à son siège comme un lépidoptérophile fixe ses papillons dans une boîte de collection.

On se fige un peu au début, mais face à cette «mise en scène» (ou en boîte, c'est selon) très course pour aussitôt éclater de rire en réalisant que pour démarrer la «bête», il faut tourner une clé, comme s'il s'agissait d'une voiture de tourisme. Contact.

Malgré la sonorité plus grave de l'échappement qui vous met dans l'ambiance, le moteur ne paraît pas plus plein et la montée en régime n'a rien pour vous clouer à votre siège. Normal, vous l'êtes déjà. Pas la peine de pousser la mécanique dans ses derniers retranchements, celle-ci vous donne tout avant même d'atteindre la zone rouge du compte-tours. Pas la peine d'insister.

Sur un circuit, cette Micra se pilote sans difficulté apparente. À quelques détails près, elle se comporte comme la Micra «de rue». Si tel est votre sensation, c'est que vous ne la pilotez pas, vous la conduisez. Ne soyez pas si timide! En dépit des transformations somme toute assez modestes apportées à son châssis, la Micra se révèle une amusante voiture de course. L'accélération n'a rien de foudroyant, mais la puissance du freinage et l'adhérence des pneumatiques constituent les deux points majeurs de sa métamorphose. La vitesse de passage est autrement plus élevée et la vigueur des freins est rassurante. À noter que le dispositif antiblocage demeure actif, mais que le correcteur de stabilité, lui, est désactivé et c'est très bien ainsi.

Raffermie, la suspension autorise un meilleur contact des pneumatiques à la piste, même s'il arrive fréquemment que certains de ses virages se négocient sur un pneu et demi (voir photo). La caisse penche, le comportement de l'auto alterne entre sous-virage et survirage, mais le plaisir que l'on éprouve à décoder son mode d'emploi n'en est alors que plus grand. Généreuse, la Micra se laisse guider indépendamment qu'elle se trouve aux mains d'un pilote aguerri ou d'un néophyte.

La direction est douce, mais la motricité imparfaite tout comme le guidage (et l'étagement) des rapports de boîte. Et après? Au pilote de s'adapter et trouver le mode d'emploi pour aller plus vite. Malgré ses performances limitées, la beauté de cette Micra est qu'elle ne donne pas de talents et son pilotage - pour une recrue à tout le moins - exige un savant mélange de douceur et d'agressivité. Un équilibre difficile à atteindre, surtout lorsque 24 autres Micra identiques à la vôtre cherchent à vous ravir votre place.

Ceux qui aiment tâter du circuit le week-end trouveront dans cette sous-compacte l'esprit et les sensations d'une voiture de course. Le curseur a été délibérément réglé sur l'efficacité, pour le plus grand plaisir des amateurs.

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Ce qu'il faut retenir

> Marque/Modèle : Nissan Micra Cup

> Version d'origine : S

> Prix : 19 995 $

> Frais d'inscription aux épreuves : 8300 $

> Usage : Circuit seulement

> Moteur : L4 DACT 1,6 litre

> Puissance : 109 ch à 6000 tr/min

> Couple : 107 lb-pi à 4400 tr/min

> Rapport poids-puissance : 9,81 kg/ch

> Poids : 1061,4 kg (poids minimum inscrit au réglement)

> Mode : Traction

> Transmission de série : Manuelle 5 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/nd

> Freins av-arr : Disque/Tambour

> Pneus (av-arr) : 190-580 x 15

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 41 litres/Super

> Pour en savoir plus : www.nissan.ca/micracup/fr/