Pour marquer avec faste le 50e anniversaire de sa 911, Porsche présente la cinquième mouture de la GT3 qui, ô sacrilège, abandonne la boîte manuelle au profit d'un modèle à double embrayage PDK et compte en prime quatre roues directrices. Doit-on arrêter le progrès?

Avant de répondre à la question posée en préambule, un retour sur la lignée GT3 s'impose. Héritière des légendaires Carrera 2.7 RS et 3.0 RS, la GT3 est apparue pour la première fois en 1999. Depuis cette date, un peu plus de 14 000 unités de ce modèle ont vu le jour. Selon Porsche, 80% des acheteurs de GT3 l'utilisent à la fois sur le circuit et sur la route.

En fait, toutes versions confondues, cette GT3 représente la plus radicale et la plus sportive des 911. Ses concepteurs vont même jusqu'à avancer qu'il s'agit là d'une révolution et non d'une évolution de ce modèle qui reprend, il va sans dire, la plate-forme de la dernière 911 (type 991). Mais les similitudes s'arrêtent là. L'architecture caractéristique à moteur arrière est conservée, mais tout le reste - ou presque - est transformé, soit par la nature des matériaux utilisés, soit par le montage d'organes spécifiques. Ainsi, la GT3 repose sur des suspensions fortement révisées. À ces multiples perfectionnements s'ajoute le renforcement de nombreux éléments pour tenir compte des sollicitations beaucoup plus élevées qu'ils devront supporter sur un circuit. Hélas, impossible de mesurer les performances de la GT3 en pareilles circonstances, Porsche ayant - curieusement - préféré nous faire conduire sa dernière-née sur les routes publiques...

La grande révolution touche bien évidemment l'absence de boîte manuelle au profit de la seule PDK (double embrayage) de Porsche. Pourquoi s'en offusquer? La PDK est autrement plus rapide et comporte une gestion plus sportive encore lui permettant de passer chacun de ses rapports en 100 millisecondes sans que les mains quittent le volant. Il suffit d'actionner à la volée les palettes au volant et le tour est joué. Pour ajouter à sa rapidité et à son efficacité, la boîte PDK est ici doublée d'un mode appelé «Neutralisation aux palettes», lequel consiste à interrompre la puissance entre le moteur et la transmission. Cette fonction présente deux avantages. Le premier est de neutraliser le sous-virage qui se manifeste en courbe sur une chaussée détrempée. Le second, d'influer sur le comportement dynamique en permettant de déstabiliser volontairement l'arrière de l'auto durant l'inscription en virage. Le conducteur peut aussi utiliser ce système pour les accélérations départ arrêté. Cela dit, cette boîte ne comporte pas que des avantages. Elle alourdit la GT3 d'une vingtaine de kilos. Pour annihiler ce gain de poids, les ingénieurs n'ont pu faire autrement que d'augmenter le nombre de pièces en aluminium. Ainsi, le toit, les ailes, le capot et les portes sont désormais réalisés dans cet alliage.

Hormis la présence d'une transmission "à deux pédales», la GT3 pousse le bouchon encore plus loin sur le plan de l'efficacité en adoptant un train arrière à roues directrices. Alors que l'angle de braquage ne peut pas dépasser 1,5 degré, à moins de 50 km/h, les roues braquent dans le sens opposé des roues avant pour améliorer l'agilité. Au-dessus de 80 km/h, elles s'orientent dans le même sens que les roues avant pour accentuer la stabilité. Une solution technique appelée à se généraliser sur plusieurs modèles au cours des mois et des années à venir.

Visuellement, l'énorme aileron ajustable de la GT3 est réalisé en fibre de verre et en fibre de carbone. À cela, il convient d'ajouter la présence de carénages avant et arrière intégrant des entrées d'air béantes pour oxygéner les composants mécaniques. Les ailes arrière ont été élargies de 44 mm par rapport à une Carrera S.

Comme le laisse deviner l'estampille apposée sur les montants latéraux de son aileron, la GT3 reprend à son compte le bloc 3,8 litres issu de la 911 Carrera S. Il n'y a pour ainsi dire que la cylindrée qui soit identique puisque cette motorisation a été entièrement réinterprétée. Sa technologie fait appel à la course avec des pistons (aluminium) et des bielles (titane) forgés et dispose - usage sur un circuit oblige - d'un carter sec.

Sur papier, ce moteur délivre 475 chevaux à 8250 tours/minute, soit une hausse de 40 chevaux par rapport à la GT3 de génération précédente. La GT3 donne au conducteur la possibilité d'augmenter le couple sur la plage de régime intermédiaire par simple pression sur une touche. Une fois cette option activée, la contre-pression des gaz d'échappement est réduite et le couple moteur grimpe sensiblement entre 3000 et 4000 tours/minute.

Par chance, on peut l'utiliser sur un circuit

On s'en doutait déjà, les performances de la GT3 sont exceptionnelles. Sa vitesse est limitée à 315 km/h pour préserver ses pneumatiques (des Michelin Pilot Sport Cup 2) à pleine charge; et elle accélère de 0 à 100 km/h en seulement 3,5 secondes, soit quatre dixièmes de moins que le chrono réalisé au volant de l'Audi RS7 essayée la semaine dernière.

Rouler en GT3, c'est entrer dans un autre monde. Son potentiel en matière de performances, de tenue de route et de freinage est tel que l'on se retrouve sans forcer en complet décalage avec les autres usagers de la route même en Allemagne. Alors, imaginez un peu ce qu'il en sera au Québec. Les montées en régime de la GT3 sont à la fois plus toniques et plus linéaires que celles de la Carrera S. On accroche souvent le limiteur réglé à 9000 tours/minute... Quel son, quelle sensation. Et les décélérations sont plus violentes encore, pour peu que l'on ait pris soin de cocher l'option des freins en céramique (nous recommandons).

La direction permet de ciseler les virages avec une étonnante précision et le niveau d'adhérence est tel qu'il est impossible de déceler, sur des routes publiques, le moment où les pneumatiques auront envie de sauter hors de leurs jantes. Et, plus surprenant, le confort des suspensions qui, tout en étant fermes, sont parfaitement adaptées à un usage routier, qualité souvent rarissime sur une voiture d'abord et avant tout taillée pour les circuits. Alors, on arrête le progrès? S'il vous plaît, non!

L'essentiel

> Prix : 148 800 $

> Garantie de base : 4 ans/80 000 km

> Consommation obtenue lors de l'essai : 13,8 L/100 km

> Pour en savoir plus : www.porsche.ca

> Principales concurrentes : Aucune

Technique

> Moteur : H6 DACT 3,8 litres

> Puissance (moteur essence) : 475 ch à 8250 tr/min

> Couple (moteur essence) : 324 lb-pi à 6250 tr/min

> Poids : 1430 kg

> Rapport poids-puissance : 3,01 kg/ch

> Mode : Propulsion

> Transmission (série) : Semi-automatique PDK 7 rapports

> Transmission (optionnelle) : Aucune

> Direction/braquage : Crémaillère/nd

> Freins (av-arr) : Disque/disque

> Pneus : 245/35ZR20 - 305/30ZR20

> Capacité/type de carburant : 64 litres/Super

On aime

> Précision de conduite

> Freinage infatigable

> Agilité étonnante

On aime moins

> Sièges européens non homologués en Amérique

> Couple très haut perché

> Visibilité vers l'arrière