Une auto capable de passer de 0 à 100 km/h en trois petites secondes et pouvant atteindre une vitesse de pointe de 315 km/h n'a rien de raisonnable. Elle exige surtout un sens aigu de l'autodiscipline, car une pression un peu trop forte sur l'accélérateur et les gyrophares s'allument et vos points d'inaptitude se multiplient. Sauf si vous avez le privilège de la conduire sur une autobahn ou un circuit fermé.

Il y a tout lieu de se demander si l'on peut encore trouver plaisir à piloter un modèle aussi performant qu'une Porsche 911 Turbo sans mettre en jeu définitivement son permis de conduire. Autant l'avouer, la première envie que l'on éprouve à son volant est d'écraser la pédale d'accélérateur lorsque l'horizon se libère. Et que dire de la fonction électronique «launch control» qui permet de réaliser des départs à faire rougir un dragster, voire un avion de chasse? Grisant.

Après le passage du septième rapport, léger stress: l'indicateur de vitesse affiche une valeur proprement ahurissante alors que l'aiguille du compte-tours ne se trouve pas dans la zone rouge. Silencieuse et exempte de vibrations, cette 911 se conduit avec une étonnante facilité. Voilà sans doute le commentaire qui agace le plus le vrai amateur de cette Porsche qui n'aime guère admettre que le premier conducteur venu pourrait maîtriser sans peine une telle montagne de puissance. En fait, il y a longtemps que cette Porsche ne punit ou ne ridiculise plus les mains inexpérimentées qui se prétendaient capables de la pousser à sa limite. Toutes les 911 - les GT et Turbo surtout - avaient l'habitude de faire transpirer quiconque se trouvait à leurs commandes. La brutalité de ses réactions, les coups de butoir de sa mécanique suralimentée et son volant qui pendule dans les virages ont aujourd'hui totalement disparu. La 911 Turbo, au contraire, s'inscrit aisément dans les courbes, s'en extrait puissamment et met rapidement le conducteur en confiance.

Moins caractérielle sans doute, cette nouvelle mouture de la 911 Turbo peut encore faire très peur (et très mal) à quiconque prétend que sa conduite ne requiert aucune compétence particulière tant elle donne l'impression d'être posée sur des rails. Faux. Pour peu que l'on ait accès à un circuit, la présente génération exige un sens réel du pilotage si l'on souhaite exploiter pour de bon ses légendaires qualités dynamiques. Heureusement, elle préserve le plaisir de conduire des conducteurs moyens à l'intérieur des limites imposées sur nos routes. Ceux-ci n'ont pas besoin de la pousser dans ses derniers retranchements pour éprouver la souplesse et le couple de son moteur suralimenté de 560 chevaux (version S); ou la rapidité et la précision d'exécution de sa boîte spet rapports à double embrayage, la seule offerte. Pour ajouter à sa sécurité, à sa polyvalence et à sa facilité d'usage, la 911 Turbo dispose de quatre roues motrices et directrices et d'appendices aérodynamiques mobiles.

Détaillons le tout dans l'ordre. Le rouage à quatre roues motrices d'abord. Celui-ci comporte dorénavant un embrayage multidisque électro-hydraulique refroidi par eau pour éviter les surchauffes. En conditions normales, la 911 Turbo réagit comme une propulsion (roues arrière motrices), mais dès que l'arrière perd de la motricité, une partie du couple (jusqu'à 60%) est redirigé vers le train avant. Le dispositif à quatre roues directrices autorise essentiellement aux roues arrière de braquer dans le sens opposé des roues avant si la vitesse est inférieure à 50 km/h. À plus de 80 km/h, elles tournent dans le même sens que les roues avant. L'objectif consiste à faciliter le braquage, l'agilité et la stabilité du véhicule. Et ça marche plutôt bien, merci. Enfin, les dispositifs aérodynamiques mobiles permettent de modifier certaines caractéristiques pour mieux coller l'auto au sol. De plus, la 911 Turbo est dotée d'un déflecteur avant rétractable qui améliore la tenue de cap à haute vitesse ou le passage des dos d'âne.

La polyvalence est sans doute la qualité la plus étonnante de cette 911 Turbo. Celle-ci ne s'impatiente jamais dans un bouchon de circulation, se gare aisément et se révèle aussi à l'aise sur une route sinueuse que sur un circuit. Aucune autre sportive comparable sur le marché n'est aussi homogène et facile à vivre au quotidien. Et, qui plus est, elle ne craint ni la neige ni le froid. Son plus grand défaut, elle doit se ravitailler souvent. La capacité de son réservoir mériterait d'être révisée à la hausse.

L'arrière

Plusieurs détails permettent de distinguer la Turbo des autres 911. Mais le plus visible est la largeur accrue de sa partie arrière, dont les puits de roue dissimulent des jantes de 20 po à simple écrou.

À l'intérieur, rien de vraiment neuf. La Turbo reprend intégralement l'aménagement des 911 «ordinaires». Malgré le prix qu'elle commande, la Turbo propose un rayon complet d'accessoires où le superflu côtoie l'indispensable. À ce sujet, les sièges Sport Plus valent le coût pour s'assurer une position de conduite parfaite (38 réglages offerts). Et le superfétatoire, maintenant: les freins en céramique, à moins d'utiliser le véhicule régulièrement sur un circuit.

En mesure d'atteindre une vitesse de pointe trois fois plus élevée que celle autorisée sur nos autoroutes, la 911 Turbo n'a rien de raisonnable, mais il existe une demande. D'ailleurs, jamais l'on n'a vu autant de constructeurs produire en (petite) série autant de bêtes de course. Ces dernières s'adressent à des connaisseurs, capables de considérer séparément l'objet et ses performances, d'apprécier la sonorité du moteur et la précision du train avant sans conduire debout sur l'accélérateur.

Les frais d'hébergement liés à ce reportage ont été payés par Porsche AG.

L'essentiel

> Marque/Modèle : Porsche/911 Turbo

> Fourchette de prix : 169 200 $ à 221 200 $

> Garantie de base : 4 ans/80 000 km

> Consommation réelle : 12,3 L/100 km

> Visible dans les concessions : Le mois prochain

> À considérer : Audi R8, Mercedes SLS AMG, Nissan GTR

> Pour en savoir plus : www.porsche.ca

Technique

> Moteur (essence) : H6 DACT 3,8 litres turbo

> Puissance : 520 ch entre 6000 et 6500 tr/min

> Couple : 487 lb-pi entre 1950 et 5000 tr/min

> Poids : 1595 kg

> Rapport poids-puissance : 3,06 kg/ch

> Mode : Intégral

> Transmission de série : Semi-automatique 7 rapports

> Transmission optionnelle : Aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : Crémaillère/nd

> Freins av-arr : Disque/Disque

> Pneus (av-arr) : 245/35R20 - 305/30R20

> Capacité du réservoir/Essence recommandée : 68/Super

Nous aimons

> Sportive 4 saisons

> Comportement très sûr

> Facile à prendre en main

Nous aimons moins

> Trop civilisée

> Inexploitable sur nos routes

> Autonomie réduite