Quel intérêt y a-t-il à se procurer une Cayman GT4 de Porsche? Aucun, à moins bien sûr d'être un initié. Pour ce dernier, qui déprime à la vue de ces autos aujourd'hui copiées à la douzaine et servies sur des architectures communes, la GT4 représente un cadeau du ciel. Cette Porsche ne s'adresse pas à tout le monde - loin de là -, mais préserve - pour combien de temps? - la part de magie que l'automobile comporte encore.

On ne manque pas d'idées chez Porsche, qui, pour reprendre une expression populaire, excelle dans «l'art de couper les cheveux en quatre». Pas une année ne passe sans qu'une nouvelle déclinaison de la Cayman apparaisse. La dernière sur la liste, la GT4, vient aujourd'hui coiffer une gamme composée déjà de trois variantes (Cayman, Cayman S, Cayman GTS). Et Porsche n'entend pas s'arrêter là. Il y a fort à parier qu'une fois la mise au point du moteur quatre cylindres qu'elle destine à ce coupé réalisée, la firme allemande servira de prétexte à la naissance de nouvelles versions.

Pour justifier sa présence au catalogue et le prix qu'elle demande, la GT4 plante dans son dos une mécanique 3,8 L issue de la 911 Carrera S. La transplantation en apparence bénigne ne s'est pas faite sans douleur et a entraîné la perte de 15 chevaux. En effet, pour insérer cette mécanique, les ingénieurs ont dû revoir son implantation, mais aussi redessiner les collecteurs (admission et échappement) en plus de concevoir un volant-moteur plus léger. Finalement, l'important à retenir: la GT4 délivre 45 chevaux de plus que la GTS, ce qui en soit justifie déjà pleinement les 10 700 $ d'écart entre les deux modèles. Mais il y a plus à cette bonne affaire. La GT4 reprend à son compte plusieurs éléments du châssis de la 911 GT3, dont la suspension avant, la direction et les freins. Pour exploiter au mieux ces composantes, la structure a été à la fois rigidifiée et allégée.

Exhibitionniste

Sur le plan visuel, la Cayman GT4 klaxonne assez fort ses différences. D'abord, il y l'énorme aileron, impossible de le manquer celui-là, cimenté au hayon par des supports d'aluminium en treillis. Réalisé en plastique léger, mais renforcé de fibre de carbone, cet appendice brise l'harmonie des lignes, mais contribue efficacement à la déportance aérodynamique du train arrière. Pour clouer l'avant au sol maintenant, Porsche fait dans le plus discret et taille une prise d'air additionnelle dans le bouclier qui, lui aussi, est spécifiquement conçu pour ce modèle.

Outre l'aérodynamique soignée - dont les bénéfices ne se mesurent pas sur les voies publiques -, Porsche a également optimisé le système de refroidissement des freins et du moteur. Dans ce dernier cas, un oeil avisé aura tôt fait de remarquer la présence de petites écopes derrière les portes pour rafraîchir aux mieux les organes mécaniques.

À l'intérieur, on se retrouve en territoire connu. Peu de gens sans doute constateront que le diamètre du volant a été réduit. En revanche, la présence de sangles et non de poignées de porte sautera aux yeux. À quoi bon? Pour l'atmosphère? Et que dire de cette option qui permet de retrancher la radio, le système de navigation voire même le climatiseur dans le but de réduire le poids du véhicule? D'accord, on est puriste ou on ne l'est pas, mais on s'étonne tout de même que Porsche ne consente absolument aucun crédit si ces accessoires ne montent pas à bord. Chiche.

Des contradictions tout de même

Singulière, la Cayman GT4 recèle de contradictions. Son constructeur la décrit comme une «radicale» destinée à faire étalage de ses prouesses sur un circuit. Or, malgré ses performances d'exception (0-100 en 4,4 secondes et vitesse de pointe de l'ordre de 293 km/h), la GT4 se garde une petite gêne en ne révélant pas son plein potentiel. En effet, elle a beau se bomber les ailes de survoler le Nürburgring, circuit allemand considéré comme LA référence de l'industrie automobile, en 7 minutes et 40 secondes, la GT4 pourrait faire mieux encore si elle retenait les services de la boîte à double embrayage (chez Porsche on dit PDK) en lieu et place d'une boîte manuelle à six rapports. Au fait, pourquoi six et non sept, comme celle qui originalement se trouve accolée à ce 3,8 L? Pour ne pas faire trop d'ombre à la 911?

Les concepteurs de la GT4 justifient la décision de n'offrir qu'une transmission manuelle de la manière suivante: «cette voiture s'adresse à des puristes». Très bien, mais n'a-t-elle pas pour destination les circuits, comme le rapporte le communiqué de presse de la marque? Dans quel cas, n'auriez-vous pas envie d'étalonner la version la plus rapide? Alors, elle est où est cette boîte à double embrayage? Après tout, n'était-ce pas l'argument servi il y a deux ans par Porsche pour légitimer l'absence de trois pédales à bord de la redoutable 911 GT3?

Plaisir des sens

Parce qu'elle est agile, légère et que sa direction est formidablement communicative, la GT4 donne envie de s'appliquer dans sa conduite, de se dépasser surtout. Attention à ne pas se laisser griser par l'euphorie: il faut rester modeste. Ne jamais oublier que cette Cayman est courte, dotée de peu d'inertie. Et il faut alors redouter - si toutes les aides à la conduite sont débranchées - de la voir partir en toupie (et vous avec) sans trop prévenir, comme en a fait l'expérience l'un des journalistes présents au lancement international de ce modèle. La GT4 est sûre, mais réclame tout de même de l'attention et de bonnes mains. Mais le plaisir qu'elle procure est à la mesure de la concentration qu'elle exige.

Étonnamment, son moteur n'apparaît pas comme le point fort de ce modèle. Il ne manque certes pas de tonus, mais le châssis est si équilibré qu'une vingtaine voire une trentaine de chevaux supplémentaires auraient été les bienvenus. Un étagement plus serré de la boîte aussi et, pourquoi pas, un réservoir d'essence à plus forte contenance pour améliorer l'autonomie.

Alors, à moins d'être un puriste, un vrai, la plus redoutable des Cayman représente plus un objet de frustration que de délectation sur les routes publiques. Son amortissement incroyablement ferme la rend inconfortable et ses qualités dynamiques, si exacerbées sur un circuit, s'évaporent totalement dans les bouchons de circulation.

Les frais liés à ce reportage ont été payés par Porsche Canada.

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On aime

> Direction sensible et précise

> Biplace plus pratique qu'il n'y paraît 

> Côté rebelle

On aime moins

> Faible autonomie

> Trop m'as-tu-vu

> Boîte manuelle seulement

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L'essentiel

> Marque/Modèle : Porsche Cayman

> Version à l'essai : GT4

> Fourchette de prix : 96 000 $

> Garantie de base : 4 ans/80 000 km

> Consommation réelle 11,3 L/100 km (estimation)

> Visible dans les concessions : à la fin de l'été

> Pour en savoir plus : www.porsche.ca

Technique

> Moteur : H6 DACT 3,8 litres atmosphérique

> Puissance : 385 ch à 7400 tr/min

> Couple : 309 lb-pi à 4750 tr/min

> Rapport poids-puissance : 3,48 kg/ch

> Poids : 1340 kg

> Mode : propulsion

> Transmission de série : manuelle 6 rapports

> Transmission optionnelle : aucune

> Direction/Diamètre de braquage (m) : crémaillère/11,8

> Freins av-arr : disque/disque

> Pneus (av-arr) : 245/35ZR20 - 295/30ZR20

> Capacité du réservoir/essence recommandée : 54 litres/super