L'un des exercices les plus risqués pour un constructeur consiste à lancer un tout nouveau type de véhicule, ce qui décrit exactement l'aventure dans laquelle s'est lancé BRP en 2008 avec son concept Spyder de «moto à trois roues». Afin de réduire les risques où c'était possible de le faire, la mécanique choisie à l'époque pour animer la création québécoise était un V-Twin déjà existant provenant du catalogue du motoriste Rotax, l'une des filiales de BRP.

Mais l'âge de cette mécanique de 1 litre conçue à l'origine pour Aprilia - et qui a très bien servi BRP en propulsant tous les Spyder jusqu'en 2013 - était déjà avancé en 2008 et il était inévitable que le moteur évolue à court terme. Non seulement cette évolution constitue la plus importante nouvelle de la gamme Spyder en 2014, mais sa nature représente aussi une surprise considérable, puisqu'il ne s'agit plus d'un V-Twin. Le tout nouveau moteur mis au point par BRP/Rotax se veut plutôt un tricylindre en ligne transversal de 1330 cc, le plus gros du marché de la moto si l'on fait abstraction du monstre longitudinal de 2300 cc qui anime la Triumph Rocket III. Notons que ce moteur n'anime pour le moment que le modèle de tourisme RT et que les RS et ST 2014 sont toujours livrés avec le V-Twin de 1 litre.

L'âme d'une moto ou d'un véhicule comme le Spyder est sa mécanique, et il est extrêmement rare qu'un constructeur en change la nature de manière aussi marquante que c'est le cas ici. En général, un V-Twin est remplacé par un autre V-Twin, un quatre-cylindres par un quatre-cylindres, et ainsi de suite. En installant un tricylindre en ligne là où se trouvait depuis toujours un bicylindre en V, BRP a complètement changé le caractère de son Spyder RT.

Un doux murmure

Aux commandes du modèle 2014, si l'environnement riche en équipement et axé sur le tourisme qui attend le pilote et son passager est essentiellement le même qu'auparavant, tout change dès l'instant où le bouton du démarreur est enfoncé. Le doux et discret murmure du nouveau tricylindre Rotax 1330 ACE qui prend alors vie n'a plus rien à voir avec le grondement du V-Twin de la version 2013. Alors qu'à l'arrêt, cette nature étonnamment réservée se montre d'autant plus évidente que le régime de ralenti passe de 1400 tr/min à tout juste 800 tr/min, une fois en route, la sonorité s'avère tellement feutrée qu'on croirait avoir affaire à un quatre-cylindres en ligne, du moins jusqu'à ce que les mi-régimes soient atteints. À partir de ce point, la musique typique d'un tricylindre commence à être audible, surtout lorsque l'accélérateur est généreusement ouvert.

En matière de performances, BRP a, là encore, fait preuve d'une retenue évidente. Une mécanique de cette cylindrée disposant des toutes dernières avancées technologiques aurait pu transformer le Spyder RT en petite machine à brûler le pneu arrière, mais selon le constructeur de Valcourt, cela n'aurait absolument pas correspondu aux demandes de la clientèle. Celle-ci réclamait avant tout une amélioration de la puissance au moment des dépassements sur l'autoroute, ce qu'offre effectivement le Spyder RT 2014 grâce à ses 115 chevaux et à son couple de 96 lb-pi, soit 15 chevaux et 16 lb-pi de plus que le V-Twin Rotax original. Quant à la toute nouvelle transmission à six rapports - un de plus que sur les modèles équipés du V-Twin -, elle fonctionne sans accrocs et a la particularité d'abaisser considérablement les régimes sur l'autoroute, ceux-ci passant d'environ 4500 tr/min à un peu plus de 3000 tr/min à vitesse légale.

On note par ailleurs que le comportement du Spyder RT 2014 démontre une nette amélioration grâce à de nouveaux amortisseurs avant, tandis qu'au chapitre du confort, BRP a eu l'ingénieuse idée de non seulement déplacer les radiateurs complètement à l'avant du véhicule, mais aussi d'inverser le sens de rotation des ventilateurs à l'arrêt. L'avantage est instantanément ressenti dans la circulation, la chaleur du moteur étant alors repoussée vers l'avant, loin du pilote et du passager plutôt que directement sur eux.

L'arrivée d'une toute nouvelle configuration mécanique dans les entrailles du Spyder représente l'un des plus importants moments de la courte histoire de cet engin signé BRP. Un tricylindre constitue-t-il le bon choix? La même question ayant été posée à l'égard du concept tout entier lorsqu'il a été dévoilé il y a une demi-douzaine d'années, il semblerait que l'instinct des décideurs de la marque de Valcourt se soit jusqu'à maintenant avéré étonnamment juste. D'ailleurs, devinez un peu quel type de mécanique l'on commence tout juste à voir de plus en plus dans l'univers de la moto? Le tricylindre en ligne transversal.

Fiche technique

Modèle: Spyder RT

Prix: 25 499$

Garantie: 2 ans/kilométrage illimité

Moteur: tricylindre de 1330 cc refroidi par liquide

Transmission: à 6 rapports, entraînement final par courroie

Poids: 459 kg (à sec)

Frein avant: 2 disques avec étriers à 4 pistons

Frein arrière: 1 disque avec étrier à 2 pistons

Pneus avant: 165/55-15

Pneu arrière: 225/50-15

Photo fournie par BRP