«Que dites-vous?... C'est inutile?... Je le sais! Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès! Non! Non! C'est bien plus beau lorsque c'est inutile!»

Cette tirade tirée du roman d'Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac), Victor Muller doit la connaître par coeur. Le patron de la Swedish Automobile, propriétaire de Saab, ne pourra éviter la sortie de route. Et comme le célèbre personnage de Rostand, on lui arrachera tout, sauf son panache. Mais Muller s'épuise et chacun de ses plans de relance finit dans la corbeille à papier. Cela fait deux ans que le cauchemar dure. Combien de temps encore durera cette agonie?

Déjà, les chaines de montage de Trollhättan sont muettes depuis avril. Pourquoi les réanimer et surtout avec qui? Les salaires des employés n'ont pas été versés ces dernières semaines. Plusieurs concessionnaires ont remis leurs franchises faute de produits et de clients. Et la future 9-3 à moteur BMW annoncée pour le salon de Francfort n'y sera pas présente. Saab non plus d'ailleurs. On peut comprendre pourquoi: l'entreprise vient d'annoncer des pertes de quelque 240 millions dollars au premier semestre de 2011.

Victor Muller ne désespère pas. Il dit toujours attendre un retour d'appel d'un investisseur potentiel. Il attend toujours, mais sait-il qu'il ne viendra pas? Les investisseurs chinois pressentis peinent à faire débloquer les fonds promis auprès de leur gouvernement. Même son «complice» de la première heure, Vladimir Atanov ne rappelle plus. En fait, il n'ose pas. L'homme d'affaires russe qui a racheté de Muller sa fabrique de voitures sport néerlandaise, Spyker, a déjà indiqué être prêt à injecter une centaine de millions dans l'affaire en échange d'une participation dans la Swedish Automobile. La Banque Européenne d'Investissement (BEI) s'y oppose, sans fournir la moindre explication. Il faut rappeler qu'au moment de la cessation de Saab, General Motors s'était également objectée à la présence de l'homme d'affaires longtemps soupçonné d'entretenir des liens avec le crime organisé en Russie. Il a été blanchi depuis, mais visiblement la méfiance demeure.

Pour peu que l'on aime l'automobile, la disparition d'une marque désole toujours un peu. Certaines plus que d'autres. Et la disparition de Saab appartient à ce groupe. Contrairement aux marques satellitaires (Plymouth, Mercury, Pontiac, Saturn ou Oldsmobile) des grandes multinationales, Saab ne gravitait plus dans aucune galaxie et ne laissera donc rien derrière. Que des souvenirs. Comme celui d'avoir été l'un des pionniers de la suralimentation par turbocompresseur et l'un des ardents défenseurs de la carrosserie à hayon. À cela, il convient d'ajouter les lubies de ce constructeur comme de loger la clé de contact entre les baquets avant, de permettre d'illuminer seulement les informations utiles la nuit venue (Night Panel), de proposer des buses de ventilation réglables aussi bien horizontalement que verticalement (idée reprise par Cadillac depuis) ou cette poche de Kangourou cousue sur les assises des sièges. Me voilà bien nostalgique! Normal, j'en ai déjà eu une.

DIRECTION FRANCFORT

L'Auto prépare la rentrée automobile. Dans quelques jours s'ouvrira le salon automobile de Francort, première grande manifestation de l'année dans ce secteur. Déjà, plusieurs nouveautés s'affichent avant l'heure et nous vous invitons à les découvrir sur notre site Internet www.monvolant.ca

>>>> Réagissez au billet d'Éric LeFrançois sur monvolant.cyberpresse.ca/lefrancois

Photo: Audi via Bloomberg

Le pavillon d'Audi au salon de Francfort.