La roue de secours a vécu. Autrefois bien visible, elle s'est compactée comme une galette, et sera bientôt remplacée par une bombe anticrevaison pas toujours efficace.

L'enquête a été menée en Belgique, mais ses conclusions concernent, à l'évidence, l'ensemble de la planète automobile. Réalisée le mois dernier, elle révèle que huit véhicules neufs sur dix n'ont plus de roue de secours.

Huit sur dix. Il y a trois ans, le VAB, un club automobile belge, avait dirigé une étude similaire et le ratio était alors de quatre sur dix. Pas la peine de sortir la calculette, c'est clair: la roue de secours est vouée à disparaître à brève échéance. Et pas seulement elle, mais toute la quincaillerie qui l'accompagne: le cric et la clé de démontage. Surpris? Ce n'est tout de même pas la première chose qui disparaît de nos véhicules. Tenez, les fumeurs, par exemple, pleurent toujours le retrait du cendrier et de l'allume-cigarette. Et les mauvais conducteurs, l'époque où les pare-chocs avaient des butoirs.

Pourquoi sacrifier la roue de secours? Après tout, n'a-t-elle pas été intégrée aux codes esthétiques de certaines marques automobiles, comme Lincoln? Celle-ci a longtemps dessiné le couvercle du coffre de ses produits comme si cette cinquième roue se trouvait positionnée à l'arrière, à la verticale. Et que dire de ces utilitaires (Honda CR-V, Toyota RAV4 et autres Jeep) qui, signe d'aventure, collaient une roue de secours à leur arrière-train?

Le plaidoyer de l'industrie automobile en faveur de la suppression de la roue de secours ne manque pas d'arguments. Selon sa taille, une roue de secours pèse entre 10 et 20 kilogrammes. Son élimination entraîne instantanément une diminution de 1 ou 2 g/km des émissions de CO2. De plus, sa disparition permet d'aménager un nouvel espace de rangement, d'augmenter la capacité du réservoir de carburant ou encore d'implanter plus aisément la batterie supplémentaire que réclame un modèle à motorisation hybride (mi-essence, mi-électrique).

Un bon pas pour l'environnement. Mais qu'en est-il de la sécurité? Les crevaisons se font de plus en plus en rares. Si l'on prête foi aux fabricants de pneus, celles-ci se produisent en moyenne à tous les 70 000 kilomètres. Êtes-vous rassuré? À votre place, je ne le serais pas. L'état de nos routes et les particularités de notre climat - l'hiver surtout - rendent la bombe anticrevaison en pratique inopérante. Celle-ci ne peut vous venir en aide si le pneu est entaillé ou complètement à plat. Dans ce dernier cas, mentionnons que certains modèles proposent en complément un compresseur électrique. Certains, mais pas tous. Autre solution, les pneus dits «run flat» chaussés par certains véhicules haut de gamme, mais ceux-ci comportent des flancs très rigides (adieu confort de roulement) et ne parviennent pas, eux non plus, à colmater les grosses fissures.

Est-ce cela le progrès?