Le concept imaginé par Ferdinand Piëch (ingénieur d'abord, capitaine d'industrie ensuite) et de Joerg Bensinger, spécialiste châssis, ne manquait pas d'audace. Celui-ci consistait à transposer à la voiture de monsieur et madame Tout-le-Monde ce qu'ils avaient appris des 4 x 4 militaires.

L'idée n'était pourtant pas nouvelle. Le rouage à quatre roues motrices était déjà employé à cette époque par la firme Jensen pour son modèle Interceptor. Cette technique avait également fait de furtives apparitions en compétition automobile (y compris en Formule 1) plusieurs années auparavant. Piëch et Bensinger n'ont rien inventé. En revanche, ils ont permis la démocratisation de cette application aujourd'hui reprise par l'ensemble des constructeurs automobiles.

La petite histoire raconte que l'idée est venue tout à fait par hasard au cours d'une séance d'essais hivernale menée dans les années 70. L'un des prototypes dont Audi était à parfaire la mise au point s'était enlisé dans la neige à la suite d'une sortie de route. On a alors fait appel au véhicule d'assistance, un Iltis, projet destiné à remplacer celui utilisé alors par l'armée allemande. Joerg Bensigner était sur place et a été étonné de l'aisance avec laquelle l'Iltis circulait sur la neige. Il en a fait part à Ferdinand Piëch, qui a ordonné la mise en chantier du système Quattro pour une application routière.

Au départ, la firme allemande ne nourrissait pas de très grands espoirs de succès pour cette technologie. En effet, Audi estimait être en mesure de commercialiser 400 exemplaires de ce modèle. Il faut rappeler qu'à cette époque, ce coupé à quatre roues motrices était vendu sensiblement le même prix qu'une Porsche 911... Pourtant, l'Ur-Quattro a connu une réussite commerciale inespérée. En fait, quelques 12 000 d'entre elles ont vu le jour entre 1980 et 1991. Il faut dire que les succès remportés avec cette auto dans les épreuves de rallye ont très certainement contribué à accroître sa notoriété.

La technologie a beaucoup évolué depuis. Aujourd'hui, grâce à la révolution électronique et électrique, il est possible de faire varier la puissance en fonction de l'adhérence et de détecter l'amorce de patinage, source de perte de maîtrise. À ce sujet, nous vous invitons à consulter notre dossier sur le sujet en pages 10 et 11.

Tous les constructeurs ont emprunté cette voie, car cette solution demeure, dans une province comme la nôtre et toute autre contrée frappée régulièrement par la neige et le froid, la plus efficace et aussi la plus sûre. Elle n'est pas indispensable pour autant. Les immenses progrès réalisés par l'industrie du pneumatique conjugués à l'ajout de nombreuses aides à la conduite comme l'antipatinage et l'antidérapage amènent aujourd'hui certains consommateurs à se questionner sur la valeur réelle de ce dispositif à quatre roues motrices. Il n'est pas indispensable, c'est vrai, mais sa présence rend toujours la conduite plus sûre, plus apaisante, et ce, qu'il y ait de la neige ou pas.