Depuis longtemps, les constructeurs et les concessionnaires disent qu'il n'y a pas d'argent à faire avec les petites autos. Les toutes nues surtout; vous savez, celles dont les glaces s'ouvrent (encore) à l'aide de manivelles.

Voilà l'explication derrière la frilosité de certaines marques à mettre au point, voire à renouveler leur offre dans les segments des citadines et des sous-compactes. Elles soutiennent difficilement la comparaison avec la catégorie supérieure, les compactes. Ces dernières proposent, parfois à meilleur prix, plus d'espace, une technologie plus avancée et consomment sensiblement la même quantité d'essence. Où est le réel avantage d'opter pour une petite? Plus maniable. Oui, mais encore. Plus mignonne? Elles ne sont pas toutes aussi craquantes qu'une Fiat 500, tout de même.

La problématique demeure entière, mais une solution existe: transformer les petites autos en camions. Cela ne les rendra que plus attrayantes, donc plus faciles à vendre et, ultimement, elles permettront d'encaisser de marges plus juteuses. Voilà la nouvelle poule aux oeufs d'or de l'industrie, la nième déclinaison de cette catégorie fourre-tout que sont les multisegments ou crossovers. Ceux-ci proposent une habitabilité ainsi qu'un volume de chargement sensiblement plus avantageux et des possibilités de modularité accrues. Et, en prime, certains vont jusqu'à offrir un rouage intégral.

La General Motors - pour une fois, pas en retard d'un train - déguise depuis peu la Sonic de la sorte. Les Chevrolet Trax et Buick Encore dérivent en effet étroitement de la sous-compacte de Chevrolet. Il suffisait de la grimper sur de grosses roues, de hausser sa position de conduite pour vous installer au-dessus du trafic, et voilà, le tour était joué.

GM n'invente rien. Le succès du Nissan Juke, VUS de poche au style vraiment déjanté, comme celui du Kia Soul, à l'allure plus sage quoique typée, s'expliquent largement par la capacité des constructeurs à renouveler l'apparence des petites voitures.

Dans les prochains mois, cette famille de véhicules verra se multiplier les lancements. Des modèles plus compacts encore. D'ailleurs, certains roulent déjà sur d'autres continents. C'est le cas de l'EcoSport (dérivé de la Fiesta) que Ford songe proposer d'ici deux ou trois ans. Cet utilitaire des villes fait moins de 4 m de long. Il a amorcé sa carrière dans les pays émergents (l'Inde, la Chine et le Brésil notamment) pour ensuite migrer vers l'Europe. L'Amérique du Nord, c'est pour demain? La direction de Ford reste accrochée à sa cassette: «Nous ne discutons pas de nos futurs produits.»

Même vieux disque usé chez Mazda qui, sourire en coin, ne veut rien dire du CX-3, multisegment dérivé de la Mazda2.

D'ordinaire très secret, Honda ne fait pas de mystère sur la commercialisation d'une version «utilitaire» de sa Fit. La marque japonaise a d'ailleurs donné un avant-goût de ses formes lors de son passage au salon automobile de Detroit, en janvier dernier. Pas plus que Chrysler, que l'on soupçonne de travailler sur un Jeep urbain. On a hâte de voir tout cela, car cette catégorie fait l'envie. Et compte tenu du nombre de nouveautés en préparation, elle devrait connaître quelques années fastes. S'il n'y a pas d'argent à faire avec les petites autos, il y en a forcément à faire avec les petits camions.