La question est maintes fois posée dans notre courrier: faut-il avoir peur d'un moteur suralimenté par turbocompresseur? Hier sans doute, mais plus aujourd'hui.

«Accessoire» autrefois consacré aux performances pures, sans souci pour la consommation (et les émanations), la suralimentation par turbocompresseur retrouve sa place sous les capots, y compris sous celui de notre véhicule au banc d'essai cette semaine, le Ford Edge. Une solution qui, lorsque nécessaire, permet de soutenir la comparaison côté puissance avec un moteur de cylindrée plus importante et de préserver la sécurité active (dépassements rapides, décisifs et sécurisants). Sans consommer davantage qu'un moteur de cylindrée équivalente.

L'idée n'est pas nouvelle. Le principe de la suralimentation par turbocompresseur a été breveté en 1905, par un Suisse nommé Büchi. Sa première application s'est faite dans le domaine aéronautique lors de la Première Guerre mondiale.

Dans le domaine automobile, il faut remonter au Salon de Francfort 1977 pour le voir apparaître dans un modèle de grande diffusion.

Au cours de cet événement, Saab dévoilait la 99 Turbo. Animé d'un moteur quatre cylindres de 2 L, ce modèle de grande série produisait 145 chevaux grâce à la magie de la suralimentation. Une cavalerie peu impressionnante aujourd'hui. Mais pour obtenir pareille puissance il y a près de 50 ans, un moteur atmosphérique comportait deux fois plus de cylindres, était 50 kg plus lourd et consommait 30% plus de carburant.

Est-il besoin d'ajouter que cette initiative du constructeur scandinave a marqué le début d'une nouvelle ère dans l'industrie automobile? Saab démocratisait une technologie qui, pendant de très longues années, avait été le quasi-apanage des voitures à vocation sportive. La suralimentation par turbocompresseur était, en ces temps-là, une technologie difficile à mettre au point.

Principe intéressant

Son principe de fonctionnement est particulièrement intéressant. Cette technique permet d'utiliser l'énergie des gaz d'échappement, avant de la laisser disparaître par le tuyau d'échappement comme le fait un moteur à aspiration normale.

Conséquemment, la turbocompression permet au moteur d'admettre beaucoup plus d'air qu'il ne peut en aspirer en temps normal, ce qui a pour effet de produire une meilleure combustion, plus d'énergie et donc plus de puissance. S'il n'est pas sollicité (il tourne tout de même bien à 30 000 tr/min), un moteur suralimenté ne consomme pas plus de carburant qu'un moteur à aspiration normale de même taille.

Les avantages du turbocompresseur sont multiples, mais qu'en est-il de sa durabilité?

Il est aussi solide qu'un moteur classique. Il faut savoir qu'avant de se voir greffer un turbocompresseur, un moteur doit au préalable faire l'objet de plusieurs transformations. La culasse, le bloc-moteur, le vilebrequin, les bielles, les pistons, en un mot toute la quincaillerie doit être renforcée. D'où la nécessité d'utiliser des matériaux de meilleure qualité (donc plus chers) pour supporter sans problème ce surplus d'air introduit à l'intérieur des cylindres.

Lubrification importante

L'un des problèmes les plus aigus que présente un moteur turbocompressé était et demeure celui de la lubrification. Compte tenu du régime de rotation incroyablement élevé de la turbine lorsque celle-ci est sollicitée (environ 240 000 tr/min), il y a risque de surchauffe. C'est pourquoi les constructeurs recommandent des vidanges d'huile plus fréquentes pour éviter la formation de particules de matière calcinée qui, à terme, risquent d'obstruer les conduits.

La fiabilité du turbocompresseur - et de plusieurs organes mécaniques d'ailleurs - est généralement compromise par son utilisateur. En effet, un moteur suralimenté, comme tout autre moteur d'ailleurs, ne doit jamais être sollicité durement avant d'avoir atteint sa température optimale. Dans le cas contraire, il risque à terme de griller.

Toutefois, l'obligation d'alimenter exclusivement cette mécanique d'essence super ne tient presque plus. Naturellement, une essence à fort indice d'octane demeure la plus indiquée pour tirer toute la quintessence de cette mécanique.

Autre idée qui ne tient plus la route: l'obligation de faire refroidir le moteur quelques minutes pour éviter une montée de chaleur dans le mécanisme.

Synonyme de puissance, tel est trop souvent l'argument qu'utilise l'industrie automobile pour décrire les bienfaits de la suralimentation par turbocompresseur. L'ennui, c'est que trop souvent, elle omet d'indiquer comment faire bon usage de cet accessoire né il y a plus d'un siècle.